* Adoptées par le Comité lors de sa sixième session (16 février-6 mars 2015).

Observations finales concernant le cinquième rapport périodique de l’Azerbaïdjan

1.Le Comité a examiné le cinquième rapport périodique de l’Azerbaïdjan (CEDAW/C/AZE/5) lors de ses 1279e et 1280e réunions le 18 février 2015 (voir CEDAW/C/SR.1279 et 1280). La liste des préoccupations et des questions du Comité est contenue dans le document CEDAW/C/AZE/Q/5 et les réponses de l’Azerbaïdjan se trouvent dans le document CEDAW/C/AZE/Q/5/Add.1.

A.Introduction

2.Le Comité se félicite que l’État partie ait soumis son cinquième rapport périodique. Il se réjouit également des réponses écrites que l’État partie a fourni à la liste des préoccupations et des questions soulevées par le groupe de travail d’avant-session et apprécie le dialogue constructif avec la délégation ainsi les éclaircissements supplémentaires fournis en réponse aux questions orales posées par le Comité durant le dialogue.

3.Le Comité félicite l’État partie pour sa délégation de haut niveau qui était dirigée par le Président du Comité d’État pour les questions relatives à la famille, aux femmes et aux enfants, Hijran Huseynova, et comprenait les vice-Ministres de l’intérieur, de la santé, du travail et de la protection sociale, de l’économie et de l’industrie, de la jeunesse et des sports puis de l’éducation, le vice-président du Comité d’État des statistiques, les représentants des ministères de la justice, des affaires étrangères et des finances ainsi que le Représentant permanent de l’Azerbaïdjan auprès de l’Office des Nations unies et d’autres organisations internationales à Genève.

B.Aspects positifs

4.Le Comité salue les progrès réalisés depuis l’examen en 2009 du quatrième rapport périodique (CEDAW/C/AZE/CO/4) de l’État partie en ce qui concerne les réformes législatives, en particulier l’adoption de :

a)La loi portant modification du Code familial et fixant en 2011 l’âge minimum du mariage à 18 ans tant pour les femmes que pour les hommes.

b)Modifications du Code pénal érigeant en infraction la traite des personnes, y compris une disposition sur le mariage forcé et le mariage des enfants (article 176-1) en 2011.

c)La loi sur la prévention de la violence domestique en 2010.

5.Le comité note avec satisfaction les efforts fournis par l’État partie pour améliorer son cadre institutionnel et stratégique visant à accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et à promouvoir l’égalité entre les sexes, y compris les mesures suivantes :

a)Le programme de l’État sur la réhabilitation et la réintégration sociale des enfants victimes de la traite humaine adopté en 2014;

b)Le plan stratégique du Ministère de la santé pour la période 2014-2020 garantissant l’accès aux méthodes modernes de contraception adopté en 2014;

c)La stratégie de développement appelée « Azerbaïdjan : Vision 2020 », qui fait de l’égalité des sexes un objectif transversal approuvé en 2012;

d)Le troisième plan national d’action (2014-2018) de lutte contre la traite des êtres humains.

6.Le Comité se réjouit du fait que depuis l’examen du rapport précédent, l’État partie a ratifié les instruments internationaux suivants :

a)La Convention sur les travailleurs ayant des responsabilités familiales, 1981 (n° 156) de l’Organisation internationale du travail;

b)Convention sur la protection de la maternité, 2000 (n° 183) de l’Organisation internationale du travail;

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Assemblé nationale

7. Le Comité met l ’ accent sur le rôle crucial du pouvoir législatif pour ce qui est de garantir la pleine application de la Convention (voir la déclaration du Comité sur ses relations avec les parlementaires adoptée lors de sa quarante-cinquième session en 2010). Il invite l ’ Assemblée nationale, conformément à son mandat, à prendre les mesures nécessaires concernant l ’ application des présentes observations finales entre maintenant et la prochaine période considérée dans le rapport.

Visibilité de la Convention et du Protocole facultatif

8.Le Comité prend note des deux décisions de la Cour d’appel de Ganja qui font référence à la Convention (affaires Ahmadov et Mammadov), évoquées par l’État partie dans ses réponses à la liste des préoccupations et des questions (CEDAW/C/AZE/Q/5/Add.1). Il note toutefois avec préoccupation que la Convention manque de visibilité et n’est pas appliquée directement, et qu’il y a encore peu d’affaires de discrimination fondée sur le sexe ou sur le genre portées devant les tribunaux nationaux.

9. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ informer les femmes de leurs droits au titre de la Convention et des procédures prévues par le Protocole facultatif;

b) D ’ encourager les femmes à porter plainte pour discrimination fondée sur le sexe ou sur le genre auprès des organes judiciaires ou quasi-judiciaires compétents;

c) De renforcer la formation en droit et les programmes de renforcement des capacités à l ’ intention des juges, des procureurs et des avocats concernant la Convention, le Protocole facultatif, les recommandations générales du Comité et les constatations du Comité concernant les communications et les requêtes émanant de particuliers, pour qu ’ ils soient à même d ’ invoquer les dispositions de la Convention ou de s ’ y référer directement pour interpréter la législation nationale conformément à la Convention.

Participation des femmes au processus de paix

10.Le Comité prend note avec satisfaction des efforts que fait l’État partie pour associer davantage de femmes aux initiatives de consolidation de la paix et salue la création à cet effet du Congrès régional des femmes du Caucase du Sud. Il se félicite que la délégation de l’État partie ait reconnu l’importance de l’élaboration d’un plan national d’action visant à mettre en œuvre la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité. Il regrette qu’aucun calendrier n’ait été défini pour l’adoption de ce plan national d’action.

11. Le Comité invite instamment l ’ État partie à établir un calendrier précis pour l ’ élaboration et l ’ adoption d ’ un plan national d ’ action visant à mettre en œuvre la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, en coopération avec des représentants d ’ organisations de femmes, et :

a) À prendre en considération l ’ ensemble du programme de travail du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité, tel que reflété dans les résolutions 1820 (2008), 1888 (2009), 1889 (2009) et 2122 (2013) du Conseil, ainsi que la recommandation générale no 30 (2013) sur les femmes dans la prévention des conflits, les conflits et les situations d ’ après conflit;

b) À faire en sorte que les femmes participent en tant que négociatrices et médiatrices à toutes les négociations de paix, y compris les négociations engagées par des États tiers participant aux processus de règlement du conflit, soit à titre individuel, soit en tant que membres d ’ organisations internationales;

c) À offrir aux femmes des formations à l ’ exercice des responsabilités, pour garantir leur participation effective aux processus de règlement des conflits et aux processus politiques d ’ après conflit.

Femmes et filles déplacées à l’intérieur du pays

12.Le Comité prend note des programmes publics mis en œuvre ces dernières années pour aider les personnes déplacées à l’intérieur du pays, dont la majorité sont des femmes et des filles. Il reste toutefois préoccupé par leurs conditions de vie et leur taux de chômage élevé, ainsi que par le manque de sources de revenus. . Il note avec préoccupation que les femmes et les filles déplacées à l’intérieur du pays font face à un risque élevé de violence familiale, de mariages précoces et forcés, d’exploitation par le travail et de traite, de pauvreté, ainsi que de discrimination dans l’accès à l’éducation et aux soins de santé et dans la participation à la vie politique et publique. Il est en outre préoccupé par la faible participation des femmes déplacées à l’intérieur du pays à la planification et à la mise en œuvre de politiques et de programmes visant à répondre à leurs besoins.

13. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De garantir la sécurité des femmes et des filles déplacées à l ’ intérieur du pays et d ’ adopter des mesures pour assurer leur protection, en particulier en cas de violence, de mettre davantage l ’ accent sur la prévention de la violence contre les femmes et les filles déplacées à l ’ intérieur du pays et de poursuivre les auteurs;

b) D ’ allouer des ressources suffisantes pour répondre aux besoins des femmes déplacées à l ’ intérieur du pays, en particulier leur accès à des sources de revenus et à des possibilités d ’ éducation appropriées pour elles-mêmes et pour leurs enfants;

c) De veiller à ce que les femmes et les filles déplacées à l ’ intérieur du pays aient un accès approprié aux services de soins de santé et à l ’ éducation, et à ce qu ’ elles jouissent de la liberté de circulation.

Mécanisme national pour la promotion de la femme

14.Le Comité note avec préoccupation que, malgré le soutien des responsables politiques nationaux, l’action du Comité d’État pour la famille, les femmes et les enfants en faveur de la promotion de la femme est entravée par le caractère imprécis et fragmenté de son mandat et par le fait qu’il n’a pas les pouvoirs nécessaires pour faire en sorte que tous les acteurs du gouvernement intègrent, dans tous leurs processus décisionnels, une perspective relative à l’égalité des sexes. Il note également avec préoccupation que les coordonnateurs pour les questions relatives au genre, au sein des institutions publiques compétentes, n’ont pas de pouvoir de décision, n’existent pas dans toutes les régions et n’ont pas les moyens de promouvoir effectivement l’adoption d’une perspective de genre dans tous les textes de loi, les politiques, les programmes et les projets. Le Comité constate en outre avec préoccupation qu’il n’existe toujours pas de plan national d’action visant à promouvoir l’égalité des sexes et à réduire l’écart entre les textes relatifs à l’égalité et la réalité sur le terrain.

15. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D e renforcer les capacités du Comité d ’ État pour la famille, les femmes et les enfants en le transformant en ministère à part entière, afin d ’ améliorer son fonctionnement effectif en tant que mécanisme national chargé de l ’ autonomisation de la femme et de la pleine application de la Convention, de définir un mandat clair pour les coordonnateurs pour les questions relatives au genre au sein des administrations publiques, et d ’ allouer à ces coordonnateurs des ressources humaines, financières et techniques suffisantes;

b) D ’ adopter un plan national d ’ action pour l ’ égalité des sexes et la promotion de la femme, en tenant compte, notamment, des recommandations contenues dans les présentes observations finales;

c) De nommer des coordonnateurs pour les questions relatives au genre dans toutes les régions et dans tous les secteurs et veiller à ce que ces coordonnateurs aient un pouvoir de décision.

Organisations non gouvernementales et défenseuses des droits de l’homme

16.Le Comité note avec préoccupation qu’une série de modifications législatives adoptées en 2014 pourraient entraver le fonctionnement des ONG indépendantes dans le pays. S’il est nécessaire de réglementer le financement et d’en garantir la transparence, le Comité estime que certaines de ces modifications pourraient avoir des incidences négatives sur les activités des organisations non gouvernementales et des organisations de la société civile, en particulier des organisations de femmes, et restreindre indûment leurs opérations. Il est également préoccupé par les informations faisant état de restrictions imposées au travail des femmes journalistes ou défenseuses des droits de l’homme, voire, dans certains cas, d’arrestations et de placements en détention.

17. Le Comité invite instamment l ’ État partie :

a) À revoir les modifications législatives et à s ’ assurer qu ’ elles n ’ ont pas d ’ incidences négatives sur les activités des organisations non gouvernementales et des organisations de la société civile, en particulier des organisations de femmes, et à créer un environnement propice dans lequel des organisations de femmes peuvent se créer, opérer et mobiliser des ressources en toute liberté;

b) À faire en sorte que les droits des femmes journalistes ou défenseuses des droits de l ’ homme soient pleinement respectés.

Mesures temporaires spéciales

18.Le Comité note avec préoccupation qu’en dépit des dispositions de l’article 3.2.6 de la loi garantissant l’égalité des sexes, les mesures temporaires spéciales ont été sous utilisées par l’État partie pour accélérer la réalisation de facto de l’égalité, lutter contre la sous-représentation des femmes dans la vie publique et politique et améliorer la situation des femmes défavorisées et marginalisées qui sont soumises à des formes croisées de discrimination, comme les femmes des zones rurales, les femmes handicapées, les femmes déplacées à l’intérieur du pays, les réfugiées et les femmes âgées.

19. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter des mesures temporaires spéciales, y compris des quotas, conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et à la recommandation générale no 25 du Comité sur le sujet, dans le cadre d ’ une stratégie nécessaire pour accélérer l ’ instauration d ’ une égalité de fait entre femmes et hommes. Il lui recommande également d ’ adopter des mesures temporaires spéciales ciblant les groupes de femmes défavorisés et marginalisés, dont les femmes des zones rurales, les femmes handicapées, les femmes déplacées à l ’ intérieur du pays, les réfugiées et les femmes âgées, d ’ évaluer les effets de ces mesures et de mettre les résultats de cette évaluation, y compris des statistiques pertinentes, à la disposition du public.

Stéréotypes et pratiques préjudiciables

20.Le Comité note avec préoccupation que, malgré les recommandations qu’il a formulées dans ses précédentes observations finales (CEDAW/C/AZE/CO/4, par. 20), les attitudes patriarcales et les stéréotypes relatifs au rôle et aux responsabilités des hommes et des femmes dans la famille et dans la société restent profondément ancrés, qui explique en partie la préférence pour les fils, qui est à l’origine d’une surmasculinité prononcée à la naissance, avec 116 garçons pour 100 filles. Le Comité note que les stéréotypes sont exacerbés par les ouvrages scolaires et par la représentation des femmes dans les médias, qui reflète les stéréotypes existants concernant la position dominante des hommes dans la société azerbaïdjanaise, sape le statut social des femmes et leur participation dans des conditions d’égalité à la vie publique et contribue à leur sous-représentation dans l’emploi rémunéré.

21. Le Comité invite instamment l ’ État partie :

a) À adopter sans retard un plan d ’ action multisectoriel visant à mettre un terme à la préférence pour les fils;

b) À s ’ attaquer énergiquement aux stéréotypes qui sous-tendent la préférence pour les fils, en redoublant d ’ efforts pour informer les femmes et les hommes, y compris les agents publics, et les sensibiliser aux stéréotypes sexistes qui persistent dans tous les secteurs de la société, en vue de les éliminer;

c) À sensibiliser les médias, y compris la radio, la télévision et la presse écrite, à la nécessité de mettre un terme aux stéréotypes sexistes en donnant une image positive des femmes, en tant que participantes actives à la vie sociale, économique et politique;

d) À surveiller et à examiner régulièrement les mesures prises pour éliminer les stéréotypes sexistes, afin d ’ évaluer leurs effets.

Violence contre les femmes

22.Le Comité se réjouit de l’information fournie par la délégation de l’État partie concernant l’examen actuel par le Conseil des ministres de la stratégie nationale et du plan national d’action sur la prévention de la violence conjugale ainsi que de la création d’une de base de données en ligne sur la violence contre les femmes. Le Comité reste cependant préoccupé par :

a)La non application de la loi sur la prévention de la violence conjugale tel que reflété par le petit nombre de cas signalés et d’ordonnances de protection à long et à court terme émises;

b)L’absence de collecte systématique de données sur la violence conjugale;

c)Le nombre limité de centres de soutien et de référence pour les victimes de violence conjugale qui sont généralement dirigés par des organisations non gouvernementales;

d)Le petit nombre (actuellement trois seulement) de foyers financés par l’État, destinés aux femmes victimes de la violence conjugale et placés sous la supervision du Ministère des affaires sociales et de la protection de l’emploi;

e)Le retard observé dans la ratification de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à égard des femmes et la violence domestique.

23. Rappelant sa recommandation n° 19 sur la violence à l ’ égard des femmes, le Comité invite instamment l ’ État partie à :

a) Adopter sans retard la stratégie nationale sur la prévention de la violence conjugale et le plan national d ’ action sur la prévention de la violence conjugale et d ’ allouer des ressources suffisantes à leur mise en œuvre;

b) Mettre en place un système de collecte de données complètes sur toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes, ventilées par âge, en fonction des régions urbaines et rurales et de la relation entre la victime et l ’ auteur de la discrimination;

c) Créer des centres de soutien et de référence financés par l ’ État destinés aux victimes de violence à travers le pays et renforcer, à cet effet, la collaboration avec les organisations non gouvernementales concernées.

d) Augmenter le nombre de foyers financés par l ’ État, destinés aux femmes victimes de violence, notamment dans les régions, et créer un service d ’ assistance téléphonique qui fonctionne jour et nuit pour les victimes;

e) Définir un calendrier pour la ratification de la Convention du Conseil de l ’ Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l ’ égard des femmes et la violence domestique.

Traite et exploitation de la prostitution

24.Le Comité relève pour s’en féliciter les mesures législatives, de politique générale et les programmes adoptés en vue de garantir la protection effective des femmes et des filles qui sont victimes de la traite. Il note toutefois avec préoccupation :

a)Que l’État partie reste un pays d’origine, de transit et de destination pour la traite des femmes et des filles à des fins d’exploitation sexuelle et de travail forcé;

b)Que l’application du cadre de politique générale relatif au mécanisme national d’orientation visant à lutter contre la traite des êtres humains reste insuffisante;

c)Que le Code pénal ne contient pas de dispositions interdisant expressément la pornographie mettant en scène des enfants, y compris des filles, et que la législation interne ne permet pas de poursuivre pénalement des personnes morales pour de telles infractions;

d)Que les mesures de rétablissement et de réinsertion prévues par l’État ne s’appliquent qu’aux victimes de la traite et ne prennent pas suffisamment en considération les besoins des femmes et des filles exploitées dans le cadre de la pornographie et des filles victimes de vente et de prostitution;

e)Qu’il n’existe pas de statistiques officielles sur les enfants des rues, en particulier les filles, qui sont très exposés au risque de traite;

f)Qu’aucun travail de recherche n’a été entrepris sur les causes profondes de la prostitution dans le pays.

25. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ allouer aux commissions locales pour les questions relatives aux mineurs et les droits de l ’ homme des mineurs les ressources humaines, financières et techniques nécessaires pour leur permettre de détecter de traiter et de prévenir les cas dans lesquels des femmes et des filles sont vendues pour être prostituées ou sont victimes de trafic d ’ organe ou de travail servile, de restructurer le système national de protection de l ’ enfance ou de lui donner les moyens de mettre en œuvre les éléments clefs de la politique de protection de l ’ enfance, en particulier en ce qui concerne les filles;

b) D ’ assurer la pleine application du cadre de politique générale relatif au mécanisme national d ’ orientation visant à lutter contre la traite des êtres humains;

c) De modifier la législation pour incriminer la pornographie mettant en scène des enfants, en particulier des filles, et établir la responsabilité pénale des personnes morales dans ce type d ’ affaire;

d) De veiller à ce que les mesures de rétablissement et de réinsertion prévues par l ’ État tiennent compte des besoins des enfants victimes d ’ infractions liées à la vente, à la prostitution et à la pornographie, en particulier ceux des filles;

e) D ’ améliorer la collecte de données sur la situation des enfants des rues, en particulier des filles, pour assurer une collecte systématique de données ventilées par sexe;

f) De mener des travaux de recherche sur les facteurs qui conduisent les femmes à la prostitution, et de mettre à la disposition des femmes et des filles qui veulent sortir de la prostitution davantage de programmes et de centres de réadaptation et de réinsertion.

Participation à la vie politique et publique

26.Le Comité prend note avec satisfaction des informations données par la délégation de l’État partie au sujet de l’augmentation du nombre de femmes occupant des postes à l’échelon municipal (35 % en 2014), et de l’ordonnance présidentielle spéciale relative à la nomination de femmes aux postes de chefs adjoints des pouvoirs exécutifs régionaux. Il relève cependant avec préoccupation que les femmes restent nettement sous-représentées dans les organes législatifs nationaux et locaux, au Gouvernement et dans la fonction publique, en particulier dans les postes de direction et de prise de décisions.

27. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les femmes participent pleinement à la vie politique et publique, dans des conditions d ’ égalité, et soient représentées dans la fonction publique, en particulier aux échelons supérieurs et décisionnels. En particulier, il lui recommande d ’ introduire des quotas obligatoires de candidates sur les listes électorales des partis politiques ou un autre système pour garantir que les femmes représentent au moins 30 % des élus, et d ’ adopter d ’ autres mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et à la recommandation générale no 25 du Comité, par exemple un système de parité des sexes pour les nominations et un recrutement accéléré de femmes dans les postes de direction.

Éducation

28.Le Comité prend note avec satisfaction des taux élevés d’alphabétisation chez les femmes et les hommes, ainsi que du taux officiel d’inscription des filles dans l’enseignement secondaire. Toutefois, il reste préoccupé par :

a)Le faible taux de scolarisation des filles dans l’enseignement secondaire dans les zones rurales et dans les zones d’installation de réfugiés et de personnes déplacées à l’intérieur du pays, et le taux réel d’abandon scolaire des filles au niveau de l’enseignement secondaire, en partie à cause du mariage des enfants;

b)Le taux d’admission des femmes dans les programmes d’études de premier cycle de l’enseignement supérieur, qui est inférieur à celui des hommes;

c)Les choix stéréotypés des domaines d’études, qui se traduisent par la concentration des femmes dans des métiers où elles sont traditionnellement majoritaires, dans des domaines tels que les soins de santé et l’industrie des services;

d)La persistance de stéréotypes de genre dans le matériel pédagogique;

e)Le fait que les droits des femmes et l’égalité des sexes ne soient pas des sujets obligatoires dans les programmes scolaires et dans la formation professionnelle des enseignants.

29. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a)De prendre toutes les mesures nécessaires pour réduire le taux d’abandon scolaire chez les filles, y compris en empêchant les mariages d’enfants;

b)De prendre les mesures nécessaires, y compris le recours à des mesures temporaires spéciales, conformément à l’article 4 de la Convention et à la recommandation générale no 25 du Comité portant sur les mesures temporaires spéciales, pour accroître la présence des femmes et des filles dans les établissements d’enseignement supérieur, par exemple grâce à l’octroi de bourses;

c)D’intensifier les activités d’orientation professionnelle afin d’encourager les filles et les jeunes femmes à choisir des domaines d’étude et des carrières non traditionnels;

d)D’entreprendre une révision des manuels scolaires et autres matériels didactiques et de supprimer, à titre prioritaire, tous les stéréotypes de genre discriminatoires;

e)D’introduire l’éducation obligatoire aux droits des femmes et à l’égalité des sexes dans les programmes scolaires et dans la formation professionnelle des enseignants à tous les niveaux de l’éducation.

Emploi

30.Le Comité note que selon les statistiques officielles, le taux de chômage des femmes est faible. Il est néanmoins préoccupé par la persistance d’une ségrégation horizontale et verticale sur le marché du travail où les femmes sont concentrées dans des emplois faiblement rémunérés et informels, l’écart de rémunération important entre les hommes et les femmes, le manque de structures d’accueil pour les enfants et le fait que les prestations de retraite des femmes soient inférieures à celles des hommes.

31.  Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De prendre des mesures pour accroître la participation des femmes à l ’ emploi formel et pour renforcer les efforts visant à éliminer les inégalités structurelles et la ségrégation professionnelle, tant horizontale que verticale, des femmes et des hommes;

b) D ’ adopter des mesures pour mettre en œuvre le principe du salaire égal pour un travail de valeur égale afin de réduire et de combler l ’ écart de rémunération entre les hommes et les femmes, tout en examinant régulièrement leurs salaires dans tous les secteurs;

c) De faciliter la conciliation de la vie professionnelle et de la vie privée pour les femmes et les hommes, notamment en augmentant le nombre de structures d ’ accueil pour les enfants et d ’ introduire un congé de paternité obligatoire;

d) De lutter contre les incidences négatives que les interruptions de carrière liées aux grossesses, l ’ emploi à temps partiel et l ’ écart de rémunération entre les hommes et les femmes ont sur les pensions de retraite et sur d ’ autres prestations de sécurité sociale des femmes.

Santé

32.Le Comité prend note des efforts faits par l’État partie pour améliorer l’accès de tous les citoyens à des services de soins de santé abordables. Toutefois, il reste préoccupé par l’insuffisance des dépenses de l’État dans le domaine de la santé et par le pouvoir de décision limité qu’ont les femmes en ce qui concerne leur état de santé, ainsi que par les divergences entre les indicateurs officiels de la mortalité maternelle et les estimations internationales; par la mortalité infantile, en particulier la différence entre les indicateurs de la mortalité infanto-juvénile chez les garçons et chez les filles, révélée par l’Enquête sur la démographie et la santé en Azerbaïdjan en 2011; par les taux élevés d’anémie chez les femmes; par le fait que le recours à l’avortement est un des principaux moyens de planification familiale; par la très faible utilisation de méthodes contraceptives modernes; par l’insuffisance des infrastructures de soins de santé, en particulier dans les zones rurales, et l’insuffisance des compétences des prestataires de services. Le Comité est aussi préoccupé par l’absence de loi sur la santé sexuelle et procréative.

33. Le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ améliorer l ’ accès des femmes à des soins de santé de qualité, conformément à sa recommandation générale no 24 sur les femmes et la santé, et de prendre des mesures pour :

a) Intensifier les mesures visant à réduire la mortalité maternelle, notamment en communiquant des informations précises sur les taux de prévalence de ce phénomène, sa définition et la façon dont il est mesuré;

b) Assurer la qualité des soins prénatals, des soins obstétricaux et des soins aux nouveau-nés afin de réduire la mortalité maternelle et néonatale;

c) Promouvoir la planification familiale et l ’ éducation à la santé procréative, notamment en dispensant dans les écoles une éducation sexuelle adaptée à l ’ âge des enfants;

d) Promouvoir l ’ utilisation de contraceptifs modernes dans la population, y compris en inscrivant ces contraceptifs sur la liste des médicaments essentiels du Ministère de la santé;

e) Adopter sans plus tarder la loi relative à la santé procréative de la population et à la planification familiale;

f) Adopter la loi sur l ’ enrichissement des aliments pour remédier aux carences en micronutriments chez les femmes et les enfants;

g) Assurer une couverture plus large des programmes et services de prévention de la transmission de la mère à l ’ enfant, en particulier dans les zones rurales;

h) Mener des campagnes de sensibilisation pour garantir l ’ élimination de la stigmatisation sociale liée au VIH.

L’autonomisation économique des femmes

34.Le Comité est préoccupé par la discrimination dont souffrent les femmes dans leurs efforts pour parvenir à l’autonomie financière et par le fait qu’elles rencontrent de nombreuses difficultés pour accéder au crédit en raison des stéréotypes traditionnels qui la confinent au rôle de gagne-pain complémentaire, dépourvu de compétences appropriées ainsi que par les barrières institutionnelles qui découragent les femmes de solliciter des prêts bancaires.

35. Le Comité recommande que l ’ État partie consente un plus grand effort pour encourager et soutenir l ’ autonomisation économique des femmes ainsi que leur entreprenariat, notamment parmi les femmes rurales, en leur donnant accès au crédit, à la terre et d ’ autres ressources, en les formant à la création et à la gestion de microentreprises et en évaluant l ’ impact de ces initiatives sur les femmes.

Femmes rurales

36.Le Comité note avec préoccupation que les femmes des zones rurales ont un accès limité à la terre et aux ressources connexes, aux services sociaux, aux services de santé, aux possibilités économiques, aux nouvelles formes de technologie et que leur participation à la vie politique et publique, notamment aux processus de prise de décisions au niveau des collectivités, est limitée. Il est également préoccupé par l’absence dans les zones rurales de structures d’accueil pour les enfants ainsi que de foyers et autres services destinés aux victimes de violence conjugale.

37. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les femmes des zones rurales aient un accès approprié à la terre et aux ressources connexes, aux services sociaux, aux services de santé et autres services de base ainsi qu ’ aux possibilités économiques, et aux nouvelles technologies et à ce qu ’ elles bénéficient de l ’ égalité des chances en ce qui concerne la participation à la vie politique et publique, en particulier dans les processus de prise de décisions au niveau des collectivités. Il lui recommande de veiller à qu ’ il existe des structures d ’ accueil pour les enfants ainsi que des foyers pour les victimes de violence conjugale dans les zones rurales.

Relations familiales et mariages précoces

38.Le Comité note avec satisfaction que l’âge légal minimum du mariage a été fixé à 18 ans pour les femmes comme pour les hommes. Toutefois, il est toujours préoccupé par le nombre croissant de mariages d’enfants, le fait que ces mariages n’apparaissent pas dans les statistiques officielles et l’absence d’enquêtes et de poursuites dans ces affaires Il est en outre préoccupé par la persistance des mariages religieux non enregistrés (« Kabin ») qui laissent les femmes et les enfants sans protection juridique. Il est également préoccupé par le régime matrimonial en vigueur, qui n’intègre pas dans les biens des époux qui doivent être répartis également en cas de divorce les biens incorporels tels que les droits à la pension.

39. Le Comité invite instamment l ’ État partie :

a) D ’ empêcher les mariages précoces et les mariages d ’ enfants en surveillant l ’ abandon scolaire chez les filles ainsi qu ’ en chargeant les organes de détection et de répression d ’ enquêter sur ces faits et de poursuivre et de punir systématiquement toutes les personnes impliquées;

b) De prendre toutes les mesures nécessaires pour faire respecter l ’ interdiction de célébrer des mariages religieux («Kabin») sans les faire au préalable enregistrer officiellement, ainsi que des mesures pour protéger les droits des filles et des femmes dont le mariage n ’ est pas enregistré et ceux de leurs enfants;

c) De prendre les mesures législatives nécessaires pour que les biens incorporels, tels que les pensions de retraite et les prestations d ’ assurance, soient considérés comme des biens communs qui doivent être divisés en cas de divorce.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

40. Le Comité invite l ’ État partie à s ’ appuyer sur la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing dans ses efforts pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention.

Les objectifs de développement pour le millénaire et le Cadre de développement pour l’après 2015

41. Le Comité appelle à la prise en compte d ’ une perspective relative à l ’ égalité des sexes, conformément aux dispositions de la Convention, dans tous les efforts visant à réaliser les objectifs de développement pour le millénaire et dans le Cadre de développement de l ’ après 2015.

Diffusion

42. Le Comité rappelle l ’ obligation de l ’ État partie d ’ appliquer systématiquement et continuellement les dispositions de la Convention. Il invite instamment l ’ État partie à accorder une attention prioritaire à la mise en œuvre des présentes observations finales et recommandations entre maintenant et la soumission du prochain rapport périodique. Le Comité demande par conséquent que les présentes observations finales soient diffusées à temps et dans la langue officielle de l ’ État partie auprès de toutes les institutions concernées de l ’ État à tous les niveaux (national, régional et local), en particulier auprès du gouvernement, des ministères, de l ’ Assemblée nationale et du judiciaire, en vue de leur pleine application. Il encourage l ’ État partie à collaborer avec toutes les parties prenantes concernées, notamment les associations patronales, les syndicats, les organisations des droits de l ’ homme et les organisations féminines, les université, les institutions de recherche et les média. Il recommande que les présentes observations finales soient diffusées sous une forme appropriée au niveau des collectivités locales pour garantir leur mise en œuvre. Il prie également l ’ État partie de continuer à assurer la diffusion auprès de toutes les partie prenantes de la Convention et son Protocole facultatif, de la jurisprudence pertinente et des recomma ndations générales du Comité.

Assistance technique

43. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ associer la mise en œuvre de la Convention à ses efforts de développement et d ’ avoir, à cet effet, recours à l ’ assistance technique régionale et internationale.

Ratification des autres traités et des instruments des droits de l’homme

44. Il note que l ’ adhésion de l ’ État partie aux neufs instruments internationaux majeurs des droits de l ’ homme améliorera la jouissance par les femmes de leurs droits de l ’ homme et de leurs libertés fondamentales dans tous les aspects de la vie. Le Comité encourage par conséquent l ’ État partie à envisager la ratification de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées dont il n ’ est pas encore signataire ainsi que du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant sur une procédure de communication.

Suite à donner aux observations finales

45. Le Comité prie l ’ État partie de soumette, dans un délai de deux ans, des informations écrites sur les mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations contenues dans les paragraphes 15 (a) et (b) puis 23 ci-dessus.

Préparation du prochain rapport

46. Le Comité invite l ’ État partie à soumettre son sixième rapport périodique en mars 2019.

47.Le Comité prie l’État partie de se conformer aux Directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant les directives sur le document de base commun et les rapports pour chaque instrument (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I).