Observations finales concernant les sixième et septièmerapports périodiques de Madagascar, soumis en un seul document*

Le Comité a examiné, le 10 novembre 2015, les sixième et septième rapports périodiques de Madagascar, soumis en un seul document (CEDAW/C/MDG/6-7), à ses 1355e et 1356e réunions (voir CEDAW/C/SR.1355 et 1356). La liste des problèmes et des questions soulevés par le Comité figure dans le document CEDAW/C/MDG/Q/6-7 et les réponses de Madagascar dans le document CEDAW/C/MDG/Q/6-7/Add.1.

A.Introduction

Le Comité remercie l’État partie pour sa soumission, en un seul document, de ses sixième et septième rapports périodiques. Il exprime également ses remerciements à l’État partie pour les réponses écrites qu’il a présentées à la liste des préoccupations et des questions soulevées par le groupe de travail de présession et accueille avec satisfaction l’exposé oral de la délégation et les clarifications supplémentaires fournies en réponse aux questions posées oralement par le Comité au cours du dialogue.

Le Comité félicite l’État partie pour le haut niveau de la composition de sa délégation, qui était dirigée par la Ministre de la justice, Noeline Ramanantenasoa, et comprenait des représentants du Ministère de la justice, du Ministère de la population, de la protection sociale et de la promotion de la femme, du Ministère des affaires étrangères, du Ministère de l’éducation nationale et de la Mission permanente de Madagascar auprès de l’Office des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève.

B.Aspects positifs

Le Comité accueille avec satisfaction les progrès accomplis depuis l’examen en 2008 des deuxième, troisième, quatrième et cinquième rapports, soumis en un seul document, de l’État partie (CEDAW/C/MDG/5) dans la mise en route des réformes législatives, en particulier l’adoption des lois suivantes :

a)Loi de répression de la traite, qui criminalise le mariage forcé, entre autres formes d’exploitation, en 2014;

b)Loi portant création d’une commission indépendante nationale des droits de la personne, en juillet 2014.

Le Comité note avec intérêt les efforts de l’État partie pour améliorer le cadre de ses institutions et de ses politiques visant à accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et à promouvoir l’égalité des sexes, comme l’adoption des mesures suivantes :

a)Le plan national de lutte contre la traite d’êtres humains, en 2015;

b)La stratégie relative au genre et au processus électoral, qui couvre la période 2015-2020, visant à accroître la représentation des femmes et leur participation aux prises de décisions.

Le Comité prend note avec approbation de la ratification par l’État partie de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille ainsi que de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, en mai 2015 et juin 2015, respectivement.

C.Principales préoccupations et recommandations

Parlement

Le Comité rappelle le rôle crucial du pouvoir législatif pour assurer la pleine application de la Convention (voir la déclaration du Comité sur ses relations avec les parlementaires, adoptée à la quarante-cinquième session, en 2010). Il invite le Parlement, conformément à son mandat, à prendre les mesures appropriées à la mise en œuvre des présentes observations finales d’ici la prochaine période de déclaration prévue par la Convention.

Contexte général

Le Comité note que la période de crise politique et institutionnelle qu’a traversée l’État partie a empêché la mise en œuvre de la plupart de ses précédentes recommandations. Le Comité note avec faveur les efforts de l’État partie pour renforcer l’état de droit, mais se déclare préoccupé par les graves obstacles que la corruption, le déficit de gouvernance, l’intégration insuffisante de l’égalité des sexes dans le processus de consolidation et la pauvreté générale opposent au plein exercice de leurs droits par les femmes de l’État partie.

Eu égard à l’importance que revêtent le respect des droits de la personne et leur plein exercice par les femmes et les filles dans les processus de réconciliation, de renforcement des institutions et de retour à l’ordre constitutionnel en cours, le Comité recommande que l’État partie :

a) Accorde la priorité à la poursuite de l’égalité des sexes et veille à assurer la participation des femmes dans le processus de retour à l’ordre constitutionnel en cours et de normalisation des relations avec ses principaux partenaires;

b) Renforce la protection des droits des femmes, notamment en renforçant l’état de droit et en intensifiant la lutte contre la corruption et l’impunité qui mettent la démocratie en péril;

c) Intensifie la lutte contre la corruption au sein de l’appareil judiciaire, de la police et des autres institutions publiques, notamment par des enquêtes bien menées et l’ouverture de poursuites contre les auteurs;

d) Confère des attributions étendues à la commission nationale indépendante des droits fondamentaux, et lui alloue des ressources suffisantes pour faire progresser les droits fondamentaux des femmes et pour encourager l’égalité entre femmes et hommes, notamment en s’attaquant aux multiples formes de discrimination et en portant les affaires devant les tribunaux;

e) Intègre les recommandations contenues dans les présentes observations finales dans son plan de mise en œuvre des recommandations émanant des mécanismes des droits de l’homme, avec un échéancier précis et des priorités claires, et ratifie, à titre prioritaire, le Protocole facultatif à la Convention, ainsi qu’il a été annoncé au cours de l’examen périodique universel (voir A/HRC/14/13 , par. 72.4);

f) Continue de coopérer avec les organisations non gouvernementales et communautaires, en particulier les organisations de femmes, pour assurer la mise en œuvre intégrale de ses obligations au titre de la Convention.

Définition de l’égalité et de la non-discrimination

Le Comité se réjouit de ce que la Constitution consacre le principe de l’égalité entre les femmes et les hommes. Il déplore néanmoins que l’État partie n’applique pas la définition de l’égalité prévue à l’article 1 de la Convention, même si sa Constitution garantit l’intégration des traités internationaux ratifiés dans l’ordre juridique dès leur publication, et reconnaît la prééminence des traités sur les lois nationales. Il se déclare préoccupé par la persistance de dispositions discriminatoires dans de nombreuses lois, comme celles sur la nationalité, les successions et le mariage. Il s’inquiète également de l’absence d’un calendrier bien défini pour l’adoption des projets de loi en instance qui ont des conséquences pour l’exercice des droits des femmes, concernant notamment l’égalité entre les sexes, la violence contre les femmes, la nationalité, la représentation proportionnelle des sexes dans les organes exécutifs et la planification familiale.

Le Comité recommande que l’État partie :

a) Fasse usage de la définition de la discrimination à l’égard des femmes, qui comprend à la fois la discrimination directe et indirecte dans la sphère publique comme dans la sphère privée, contenue dans l’article 1 de la Convention;

b) Ab roge toutes les dispositions discriminatoires, notamment celles contenues dans les lois sur la nationalité, les successions et le mariage;

c) Adopte promptement les projets de loi qui influent sur l’exercice des droits des femmes mentionnés au paragraphe 10 ci-dessus;

d) Fasse effectivement respecter la législation existante destinée à éliminer les discriminations à l’égard des femmes;

e) Développe et mette en œuvre à l’intention des juges, procureurs et avocats des programmes de renforcement des capacités concernant les droits fondamentaux des femmes, portant notamment sur la Convention.

Accès à la justice

Le Comité note que l’État partie entend renforcer les centres d’aide juridique et accroître leur nombre. Il constate toutefois avec préoccupation que de nombreux obstacles continuent d’entraver l’accès des femmes à la justice, en particulier dans les affaires de divorce et de violence sexiste, comme l’analphabétisme des femmes, l’absence de reconnaissance des droits des femmes dans l’État partie et dans sa législation nationale concernant les droits fondamentaux des femmes, la persistance de clichés sexistes, y-compris parmi le personnel des forces de l’ordre et les chefs traditionnels, l’assujettissement des femmes à des systèmes juridiques coutumiers et traditionnels, la corruption au sein de l’appareil judiciaire, l’inaccessibilité des tribunaux dans les zones rurales, les frais de justice et le coût des certificats médicaux, qui sont supportés par les victimes de la violence.

Rappelant sa recommandation générale n o  33 (2015) relative à l’accès des femmes à la justice, le Comité recommande que l’État partie :

a) Renforce les centres d’aide juridique et en accroisse le nombre, améliore leur disponibilité et leur qualité dans toutes les provinces et leur alloue les ressources nécessaires à leur fonctionnement et à la fourniture gratuite d’une aide juridique effective devant tous les tribunaux;

b) Éveille la conscience des femmes à leurs droits fondamentaux et mette en œuvre des programmes d’initiation aux notions élémentaires du droit afin que les femmes soient en mesure de se prévaloir des droits que leur garantit la Convention;

c) Élimine les obstacles auxquels se heurtent les femmes victimes de violence pour accéder à la justice, notamment en instituant la gratuité des frais pour les certificats médicaux;

d) Développe et mette en œuvre des programmes de renforcement des capacités informés par la problématique hommes-femmes à l’intention des juges, des procureurs, des avocats, des officiers de police et des praticiens du droit prestataires de conseils juridiques;

e) Autorise les organisations de femmes disposant d’une compétence juridique qualifiée à engager des poursuites pour le compte des femmes victimes;

f) Élargisse les plans existants de collecte de données sur les violations des droits fondamentaux des femmes dans les affaires criminelles pour couvrir également les affaires civiles.

Mécanisme national de promotion des femmes

Le Comité s’inquiète de la coordination entre le plan de développement national, la politique nationale de promotion des femmes et le plan national d’action sur le genre et le développement, ainsi que des retards dans la mise à jour de ces deux derniers et dans l’adoption du plan national d’action pour la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité. Le Comité est également préoccupé par l’absence d’information sur le rôle que doit jouer le Ministère de la population, de la protection sociale et de la promotion de la femme comme mécanisme national de promotion de la femme pour coordonner les activités relevant du Plan national de développement, y compris les activités de promotion des femmes, afin que la problématique hommes-femmes soit prise en compte dans tous les départements ministériels de l’État partie.

Le Comité recommande que l’État partie :

a) Alloue des ressources humaines, techniques et financières suffisantes au mécanisme national de promotion des femmes pour en assurer le bon fonctionnement;

b) Mette à jour et applique effectivement la politique nationale relative au genre dans le développement et son plan d’action;

c) Adopte et valide le plan national d’action pour la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité;

d) Habilite le Ministère de la population, de la protection sociale et de la promotion de la femme à coordonner les politiques d’intégration de la problématique hommes-femmes et, en particulier, les activités menées dans le cadre du plan national d’action genre et développement et du plan national de développement.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité se déclare de nouveau préoccupé par l’absence de mesures temporaires spéciales visant à accélérer la réalisation d’une égalité de fait entre femmes et hommes (voir CEDAW/C/MDG/CO/5, par. 14 et 15) dans tous les domaines dans lesquels les femmes sont sous-représentées ou désavantagées dans l’État partie.

Le Comité invite instamment l’État partie à adopter et à mettre en œuvre des mesures temporaires spéciales pour accroître la représentation des femmes dans la gouvernance et dans d’autres secteurs, conformément à l’article 4 1) de la Convention ainsi qu’à la recommandation générale n o  25 (2004) du Comité relative aux mesures temporaires spéciales, telles que les objectifs et incitations, les programmes de sensibilisation et de soutien, les quotas et autres mesures volontaristes et axées sur les résultats, ainsi qu’à attribuer des allocations budgétaires spéciales à des mesures dans le domaine de l’éducation, de la santé et du développement économique et social, ainsi que dans tous les domaines couverts par la Convention dans lesquels les femmes sont sous-représentées ou désavantagées.

Stéréotypes et pratiques préjudiciables

Le Comité se déclare une fois de plus préoccupé par la persistance de stéréotypes discriminatoires concernant les rôles et responsabilités des femmes et des hommes dans la société et dans la famille, notamment la notion de « chef de famille », qui attribue ce rôle aux hommes, et la transmission « du nom et des biens du père » aux héritiers mâles. Le Comité prend note des efforts entrepris sous l’égide du Ministère de la justice par diverses parties prenantes, de la ratification de feuilles de route et de l’élaboration de plans d’action visant à attaquer certaines pratiques préjudiciables. Cependant le Comité reste profondément préoccupé par la persistance de pratiques préjudiciables telles que les mariages d’enfants et/ou les mariages forcés, la vente d’épouses, les marchés aux filles (tsenan’ampela), la dot (moletry) et la polygamie (voir CEDAW/C/MDG/CO/5, par. 16 et 17).

Conformément à la recommandation générale commune n o  31 du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes/observation générale n o  18 du Comité des droits de l’enfant sur les pratiques préjudiciables (2014), le Comité recommande que l’État partie :

a) Mette sur pied une stratégie nationale globale comportant des mesures volontaristes soutenues applicables aux femmes et aux hommes à tous les niveaux de la société, y compris aux chefs traditionnels, en vue de lutter contre les stéréotypes discriminatoires tels que la notion de « chef de famille », la transmission « du nom et des biens du père » et les pratiques préjudiciables, en particulier les mariages d’enfants et/ou les mariages forcés, la vente d’épouses, les marchés aux filles ( tsenan’ampela ), la dot ( moletry ) et la polygamie;

b) Fasse effectivement usage du Code pénal et de la loi réprimant la traite d’êtres humains pour punir tous les auteurs de pratiques préjudiciables;

c) Élabore et mette en œuvre, en collaboration avec la société civile, des programmes d’éducation publique, en particulier dans les zones rurales et isolées, pour mieux faire comprendre l’égalité des femmes avec les hommes et pour diffuser des représentations positives et non caricaturales des femmes;

d) Établisse un dispositif de suivi et d’évaluation de la mise en œuvre des mesures adoptées pour venir à bout des clichés sexistes.

Violence à l’égard des femmes

Le Comité constate avec préoccupation :

a)Qu’il n’existe aucune législation criminalisant spécifiquement les violences à l’égard des femmes, en particulier les mariages d’enfants et/ou les mariages forcés et le viol conjugal, et qu’il n’existe pas de politique globale pour lutter contre cette violence;

b)Que la violence sexiste à l’égard des femmes dans la sphère domestique n’est pas prise en considération par les tribunaux dans les décisions relatives à la garde des enfants ou au droit de visite, ce qui contraint les femmes à continuer de faire face à leur agresseur et expose les enfants au risque de nouvelles violences;

c)Que la violence intrafamiliale et la violence sexuelle semblent être socialement acceptées et entourées d’une culture du silence et de l’impunité;

d)Que les cas de violence à l’égard des femmes continuent d’être sous-déclarés, en raison semble-t-il d’un certain manque de confiance dans les institutions judiciaires (voir CEDAW/C/MDG/CO/5, par. 18), et que le recours fréquent à la conciliation dans les affaires de violence à l’égard des femmes est susceptible de porter préjudice aux femmes du fait des préjugés sexistes qui prévalent dans la société;

e)Que l’on manque de données sur les crimes ayant donné lieu à une enquête, à des poursuites et à une condamnation, ainsi que sur les réparations accordées aux victimes par la police et les tribunaux.

Le Comité invite l’État partie à :

a) Adopter une législation criminalisant tous les actes de violence à l’égard des femmes, en particulier les violences intrafamiliales, notamment le viol conjugal, les mariages d’enfants et/ou les mariages forcés et les sévices sexuels sous toutes leurs formes, et à formuler une stratégie générale propre à assurer son application;

b) Adopter et à mettre en œuvre une législation imposant la prise en compte des violences intrafamiliales sexistes à l’égard des femmes dans les décisions relatives à la garde ou au droit de visite des enfants et à sensibiliser les milieux judiciaires à l’influence qu’exercent les violences de ce type sur le développement de l’enfant;

c) Veiller à ce que les femmes et les filles victimes de violence aient accès à des voies de recours effectives, notamment à l’indemnisation et à la protection, et à ce que les auteurs soient poursuivis et condamnés comme il convient;

d) Sécuriser les ressources nécessaires pour finaliser et mettre en œuvre la stratégie nationale de lutte contre la violence sexiste;

e) Fournir une assistance et une protection appropriées aux femmes victimes de violence avec la création de foyers et la fourniture de services d’assistance et de réadaptation aux victimes, en particulier dans les zones rurales, et en coordonnant les interventions, la fourniture des services de soutien et la coopération avec les organisations non gouvernementales et les partenaires internationaux;

f) Continuer de sensibiliser le public, par des campagnes dans les médias et des programmes éducatifs, et de mettre en œuvre des programmes obligatoires de renforcement des capacités à l’intention des membres des forces de l’ordre, du personnel des services de santé, des enseignants et des chefs traditionnels concernant le soutien adapté à apporter aux femmes victimes, de veiller à éviter leur stigmatisation et à les encourager à signaler les actes de violence intrafamiliale ou de violence sexuelle à leur égard;

g) Collecter des données statistiques sur les violences contre les femmes, ventilées par âge, nationalité et relation entre la victime et l’auteur, ainsi qu’à entreprendre des études et/ou des enquêtes sur l’étendue de la violence à l’égard des femmes et ses causes profondes.

Traite et exploitation de la prostitution

Le Comité accueille avec satisfaction les efforts entrepris par l’État partie, en collaboration avec la société civile et la communauté internationale, pour lutter contre la traite et l’exploitation sexuelle des femmes et des jeunes filles et l’exploitation de la prostitution, ainsi que pour établir une base de données électronique avec les pays de la Communauté de développement de l’Afrique australe. Il se félicite également de la création d’un bureau national de lutte contre la traite d’êtres humains, mais note avec préoccupation qu’il n’est pas encore opérationnel et manque de ressources. Il se déclare une nouvelle fois préoccupé par l’ampleur du tourisme sexuel dans l’État partie et par l’absence d’information sur les mesures prises pour prévenir l’exploitation de la prostitution et pour remédier à ses causes profondes ainsi que par l’absence de données statistiques désagrégées sur la traite et l’exploitation de la prostitution.

Le Comité invite instamment l’État partie à :

a) Allouer des ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour une mise en œuvre effective de la loi n o  2014-040 de répression de la traite d’êtres humains, de son plan d’action national et de la base de données nationale sur la traite, et de veiller aussi à ce que le Bureau national de lutte contre la traite d’êtres humains devienne rapidement opérationnel;

b) Continuer de renforcer la coopération internationale, régionale et bilatérale avec les pays d’origine, de transit et de destination afin de prévenir la traite par l’échange d’informations et d’harmoniser les procédures judiciaires destinées à poursuivre les trafiquants;

c) Proposer aux membres des forces de l’ordre des programmes continus de renforcement des capacités d’identifier les victimes et de leur porter assistance;

d) Mener des campagnes nationales d’éducation et de sensibilisation aux dangers et au caractère criminel de la traite;

e) S’attaquer aux causes profondes de la traite et de l’exploitation des femmes et des jeunes filles, en particulier à la pauvreté, afin de leur éviter d’y être exposées et œuvrer en faveur du rétablissement et de la réinsertion sociale des victimes en leur fournissant des services d’assistance, de réadaptation et d’hébergement appropriés (voir aussi CEDAW/C/MDG/CO/5 , par. 21).

Participation à la vie politique et publique

Le Comité demeure préoccupé par la faible représentation des femmes aux postes décisionnels, en particulier au sein du corps diplomatique (aucune ambassadrice ) et dans les organisations internationales, ainsi qu’au niveau local (0 % des responsables régionaux, 5 % des maires et 2,6 % des chefs d’assemblées fokontany). Il est particulièrement préoccupé de constater que les efforts entrepris précédemment devant l’Assemblée nationale pour introduire des mesures, notamment des mesures temporaires spéciales, destinées à améliorer la participation des femmes à la vie politique et publique, n’ont pas abouti.

Le Comité recommande à l’État partie de :

a) Modifier sa loi électorale en introduisant des quotas obligatoires, assortis de sanctions en cas de non-respect, pour accroître la représentation des femmes dans la vie politique et publique, en particulier aux niveaux local et national, et de veiller à ce que le processus de désignation des candidats devant représenter l’État partie dans les organisations internationales soit ouvert et transparent;

b) Mettre en œuvre la stratégie nationale « Genre et élections » pour la période 2015-2020 visant à promouvoir les femmes et à les rendre autonomes à tous les niveaux de la vie politique et publique, en particulier aux postes décisionnels, notamment pour l’élaboration, la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation des politiques de développement et des projets communautaires, et d’adopter des mesures, notamment des mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et des recommandations générales n o  23 (1997) du Comité sur les femmes dans la vie politique et publique et n o  25;

c) Sensibiliser les hommes politiques, les journalistes, les enseignants et les chefs communautaires à la question de l’égalité des sexes afin de leur faire mieux comprendre que la participation véritable, libre et démocratique des femmes et des hommes en qualité d’égaux à la vie politique et publique est indispensable à l’application intégrale de la Convention et au développement économique et social de l’État partie;

d) Proposer aux candidates potentielles des programmes de renforcement de leurs capacités à faire campagne et à diriger afin d’encourager les femmes à participer aux élections.

Nationalité

Le Comité se déclare de nouveau préoccupé (voir CEDAW/C/MDG/CO/5, par. 24) de ce que la législation actuelle sur la nationalité établit une discrimination à l’encontre de la femme malgache, qui ne peut transmettre sa nationalité à son époux étranger ou apatride ou à ses enfants dans les mêmes conditions que l’homme malgache dans la même situation. Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour encourager l’enregistrement des naissances, mais s’inquiète de ce que 20 % des naissances ne sont toujours pas enregistrées, ce qui risque de multiplier les cas d’apatridie, et que les femmes continuent de se heurter à des difficultés pour faire enregistrer leurs enfants.

Le Comité recommande à l’État partie de :

a) Modifier le Code de la nationalité afin de permettre aux femmes malgaches de transmettre leur nationalité à leur époux étranger ou apatride et à leurs enfants dans les mêmes conditions que les hommes, conformément à l’article 9 de la Convention (voir aussi CEDAW/C/MDG/CO/5 , par. 25);

b) Veiller à ce que l’application de la loi soit rétroactive, afin que toute personne actuellement apatride en raison du caractère discriminatoire de la loi accède à la nationalité;

c) Favoriser l’enregistrement de toutes les naissances en allouant les ressources nécessaires aux centres d’enregistrement, en mettant sur pied des services d’enregistrement mobiles ainsi qu’en réduisant les frais et en simplifiant la procédure d’enregistrement.

Éducation

Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour accroître l’accès des femmes et des filles à l’éducation. Il constate néanmoins avec inquiétude que, dès l’école primaire, les taux de scolarisation et d’achèvement de scolarité des filles sont inférieurs à ceux des garçons et que les filles sont souvent victimes de harcèlement et de sévices sexuels à l’école ou sur le chemin. Il est également préoccupé par le taux élevé d’abandon scolaire chez les filles, dû aux grossesses précoces, à l’extrême pauvreté, au travail des enfants (voir CEDAW/C/MDG/CO/5, par. 26) et à la pratique qui consiste à renvoyer les filles enceintes de l’école et à refuser leur retour après l’accouchement. Le Comité constate en outre avec préoccupation l’absence, à tous les niveaux de l’enseignement, d’une information sur les droits et sur la santé sexuelle et génésique dans une perspective soucieuse de l’égalité entre les sexes et adaptée à l’âge des élèves.

Le Comité invite instamment l’État partie à :

a) Améliorer l’accès des filles à l’enseignement élémentaire, en particulier dans les zones rurales et reculées, en veillant à ce que les écoles, surtout celles qui accueillent des adolescentes, soient pourvues d’installations sanitaires adéquates et disposent d’eau potable;

b) Renforcer les programmes visant à sensibiliser les parents et l’ensemble de la population à l’importance de l’éducation pour les possibilités de carrière et les choix de vie des filles;

c) Veiller à ce que les filles enceintes ne soient pas renvoyées de l’école et qu’elles y retournent après l’accouchement;

d) Instaurer des conditions qui permettent aux filles de fréquenter l’école en toute sécurité sans subir de discrimination ni de violences sexuelles, que ce soit en milieu scolaire ou autour des établissements;

e) Mettre en place des mécanismes de signalement et de recherche des responsabilités afin que les enseignants et les élèves auteurs de violences ou de harcèlement sexuels envers des filles à l’école reçoivent les sanctions appropriées;

f) Incorporer dans les programmes scolaires une éducation adaptée à l’âge des élèves sur les droits et la santé sexuelle et génésique, notamment des cours sur le comportement sexuel responsable, les infections sexuellement transmissibles et sur le droit des femmes de prendre librement elles-mêmes les décisions relatives à leur santé génésique et sexuelle, et de former les enseignants à traiter ces sujets dans la perspective de l’égalité entre hommes et femmes.

Emploi

Le Comité salue le cadre juridique détaillé mis en place pour les travailleurs du secteur formel, mais constate avec préoccupation les pratiques discriminatoires des employeurs à l’égard des femmes enceintes, le taux élevé du chômage des femmes et la forte ségrégation verticale et horizontale dont elles font l’objet sur le marché du travail, ainsi que le non-respect des lois, dans ce domaine, concernant notamment l’égalité salariale, ce qu’illustre la persistance d’écarts de salaires entre femmes et hommes dans les secteurs tant public que privé. Le Comité réitère ses inquiétudes au sujet de la proportion élevée de femmes qui travaillent dans le secteur informel, où elles sont en butte à une pauvreté chronique et ne sont pas couvertes par la protection sociale. Le Comité est également préoccupé par la situation précaire des femmes et des jeunes filles qui travaillent comme employées de maison au domicile de particuliers.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’intégrer la perspective du genre dans le plan de développement national, en particulier en y incorporant des mesures visant à lutter contre la discrimination envers les femmes au niveau de l’emploi, et de veiller à ce que les femmes bénéficient des dispositifs en faveur de l’emploi et de l’entrepreneuriat;

b) De renforcer encore les prérogatives des inspecteurs du travail en matière de surveillance des lieux de travail, y compris au domicile des particuliers, ainsi que pour faire respecter le droit du travail en recourant, le cas échéant, à des sanctions appropriées, et en utilisant leurs constatations aux fins de l’examen des politiques et de l’élaboration des pratiques optimales;

c) De prendre des mesures pour combler les écarts salariaux entre femmes et hommes et de mettre en œuvre l’égalité salariale (à travail de valeur égale, salaire égal), conformément à la recommandation générale n o  13 (1989) du Comité relative à la rémunération égale du travail de valeur égale;

d) D’adopter un cadre réglementaire pour le secteur informel garantissant aux femmes qui y travaillent l’accès à la protection et aux prestations sociales (voir aussi CEDAW/C/MDG/CO/5 , par. 29).

Harcèlement sexuel sur le lieu de travail

Le Comité note avec préoccupation que la législation actuelle de l’État partie manque de clarté et qu’elle risque de ne pas protéger convenablement les femmes contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail. Il note aussi avec préoccupation le manque de données statistiques sur les difficultés auxquelles se heurtent les femmes lorsqu’elles veulent prouver la réalité du harcèlement sexuel sur le lieu de travail.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’amender et de clarifier sa législation pour établir une définition large du harcèlement sexuel sur le lieu de travail, alléger la charge de la preuve qui incombe aux femmes victimes et offrir à celles-ci des voies de recours effectives, notamment l’indemnisation;

b) De diffuser largement l’information sur les procédures de déclaration des cas de harcèlement sexuel sur le lieu de travail;

c) De procéder régulièrement à des inspections du travail pour faire respecter le droit du travail et les codes de conduite en matière de harcèlement sexuel;

d) De collecter des données statistiques sur l’ampleur des discriminations sexistes et du harcèlement sexuel sur le lieu de travail et de mener des études sur les moyens de rendre la loi plus efficace.

Employées de maison

Le Comité est préoccupé par la situation précaire dans laquelle travaillent les employées de maison, en particulier les travailleuses migrantes à l’étranger, et par le risque accru qu’elles courent d’être victimes de mauvais traitements et de la traite à des fins d’exploitation sexuelle ou de la main-d’œuvre. Le Comité s’inquiète également de ce que les femmes et les jeunes filles qui migrent à l’étranger sont souvent victimes d’agences de recrutement et d’intermédiaires malhonnêtes et se heurtent à des obstacles pour porter plainte et avoir accès à la justice.

Le Comité recommande à l’État partie de :

a) Ratifier la Convention de 2011 sur les travailleuses et travailleurs domestiques (n o  189) de l’Organisation internationale du Travail;

b) Veiller à ce que les travailleuses domestiques, notamment les travailleuses migrantes, aient accès à la protection sociale et aux autres prestations liées à l’emploi;

c) Réglementer et surveiller effectivement les pratiques des agences de recrutement afin de protéger les travailleuses migrantes des mauvais traitements et de l’exploitation;

d) Sensibiliser les femmes et les jeunes filles, en particulier celles des zones rurales, aux risques auxquels elles peuvent se trouver exposées pendant leur migration et de les informer des moyens dont elles disposent pour porter plainte contre les atteintes à leurs droits fondamentaux;

e) S’attaquer aux causes profondes de la migration des femmes en proposant une alternative, avec la création de conditions rendant possibles des moyens de subsistance durables et l’exercice d’activités rémunératrices.

Santé

Le Comité réitère sa profonde préoccupation devant la pénurie de services de santé adéquats, notamment de services de santé sexuelle et génésique, la persistance des grossesses précoces et des taux de mortalité maternelle et infantile élevés et quasiment inchangés, en particulier parmi les jeunes femmes et jeunes filles, qui sont principalement dus à des complications pendant la grossesse ou l’accouchement ainsi qu’à des avortements non médicalisés. Il trouve préoccupant le fait que les frais médicaux et le coût des traitements ou des médicaments continuent d’exclure la plupart des femmes de l’accès aux soins de santé. Le Comité prend note de l’intention de l’État partie de réduire le niveau des sanctions en cas d’avortement et d’accroître le nombre des motifs pour lesquels l’avortement pourrait devenir légal. Il se déclare toutefois préoccupé par le nombre élevé des avortements, les lois restrictives qui le régissent et la fréquence élevée des complications médicales qui en résultent chez les femmes et les jeunes filles.

Le Comité rappelle sa recommandation précédente (voir CEDAW/C/MDG/CO/5 , par. 31) et invite instamment l’État partie à :

a) Réduire la mortalité maternelle en améliorant l’accès aux soins prénataux et anténataux élémentaires et aux soins obstétriques d’urgence ainsi qu’en assurant la présence à l’accouchement d’un prestataire de soins qualifié, en particulier dans les zones rurales, en s’inspirant des orientations techniques de l’Office du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme relativement à l’application d’une démarche fondée sur le respect des droits de l’homme dans la mise en œuvre de politiques et de programmes de réduction de la mortalité et de la morbidité maternelles évitables (A/HRC/21/22;

b) Faciliter l’accès des femmes et des jeunes filles aux services de santé de base, en donnant la priorité aux zones rurales, et à consacrer des ressources suffisantes à la promotion et à la protection de la santé des femmes;

c) Adopter des mesures pour prévenir les grossesses précoces et pour améliorer l’accès des femmes et des jeunes filles aux services de santé sexuelle et génésique, à des moyens de contraception et services de planification familiale modernes et d’un coût abordable, en particulier en zone rurale;

d) Légaliser l’avortement, au minimum dans les cas où la grossesse est préjudiciable à la santé de la mère ainsi que dans les cas d’inceste, de viol ou de graves malformations fœtales, et d’abroger les mesures punitives applicables aux femmes qui recourent à l’avortement;

e) Missionner, soutenir et financer des études et la collecte de données sur l’ampleur, les causes et les conséquences des avortements illégaux et pratiqués dans des conditions dangereuses ainsi que leur incidence sur la santé et la vie des jeunes filles et des femmes afin de recueillir des éléments factuels à l’appui de l’élargissement des motifs justifiant la légalisation de l’avortement;

f) Contrer l’influence négative des considérations coutumières, traditionnelles ou religieuses susceptibles d’être invoquées pour stigmatiser les femmes et entraver l’exercice de leurs droits en matière de santé sexuelle et génésique;

g) Améliorer l’accès des femmes à des soins postabortifs de qualité, en particulier dans les cas de complications résultant d’avortements illégaux, conformément à la recommandation générale n o  24 (1999) du Comité sur les femmes et la santé.

VIH/sida

Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour fournir un diagnostic et des soins précoces aux jeunes filles et aux femmes enceintes qui vivent avec le VIH. Le Comité est toutefois préoccupé par l’absence d’une politique générale d’égal accès aux soins et traitements préventifs pour toutes les femmes qui vivent avec le VIH ainsi que d’une stratégie pour encourager une éducation des jeunes à la santé sexuelle et génésique adaptée à leur âge. Il s’inquiète également de la persistance de la stigmatisation et de la discrimination qui frappent les femmes qui vivent avec le VIH, notamment les femmes enceintes, et du fait que le rôle des hommes dans la transmission active du VIH est rarement pris en considération.

Le Comité recommande à l’État partie de veiller à l’égalité d’accès des hommes et des femmes à la prévention et au traitement du VIH/sida, notamment la prévention de la transmission du VIH entre la mère et l’enfant. Il recommande également à l’État partie de développer des programmes éducatifs sur les droits et la santé sexuelle et génésique destinés aux jeunes et adaptés à leur âge, portant notamment sur le comportement sexuel responsable. Le Comité recommande en outre à l’État partie de lutter contre la stigmatisation et la discrimination persistantes qui frappent les femmes qui vivent avec le VIH et de sensibiliser les hommes, notamment ceux qui ont des pratiques sexuelles à risque et ceux qui vivent avec le VIH, à la responsabilité qui leur incombe d’éviter de transmettre le VIH à leurs partenaires sexuels.

Autonomisation économique des femmes

Le Comité exprime sa préoccupation de ce que, dans l’État partie, la plupart des femmes, notamment dans les zones rurales, n’ont que peu ou pas d’accès à la formation professionnelle, au crédit financier et à l’emprunt, notamment à un revenu régulier, aux régimes de retraite et de sécurité sociale. Il se déclare également préoccupé par le fait que les ménages de femmes seules, en particulier dans les zones rurales, sont davantage menacés par la pauvreté.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’abroger toute législation discriminatoire à l’égard des femmes en matière d’autonomie économique;

b) D’adopter des mesures pour assurer l’égalité d’accès des femmes et des hommes aux possibilités de formation, comme la formation professionnelle et les ressources financières, notamment les possibilités d’activités génératrices de revenus, le crédit et l’emprunt, les régimes de retraite et de sécurité sociale;

c) De lancer des programmes de renforcement des capacités afin d’accroître le nombre de femmes créatrices d’entreprise;

d) D’intégrer, dans toutes les stratégies de développement de l’État partie, des initiatives visant à favoriser l’autonomie économique des femmes, et d’y inclure des prestations pour certains groupes de femmes ciblés, comme les femmes seules chefs de ménage, en fonction de leurs besoins spécifiques et des diverses formes de discrimination auxquelles elles se heurtent.

Les femmes en zone rurale

Le Comité exprime de nouveau sa préoccupation devant le fait que les femmes des zones rurales font face à des difficultés supplémentaires pour accéder à la justice, aux soins médicaux, à l’éducation, au crédit et aux prêts, aux possibilités économiques et aux services publics, ce qui les empêche souvent de bénéficier pleinement des politiques rurales et agricoles à égalité avec les hommes. Le Comité constate avec inquiétude que :

a)Les pratiques discriminatoires en matière de propriété foncière et d’administration de biens et des successions continuent de limiter l’accès des femmes aux ressources économiques et aux services financiers (voir CEDAW/C/MDG/CO/5, par. 32);

b)Le régime foncier et les politiques de développement rural de l’État partie sont biaisés au préjudice des femmes, et que, en vertu de la loi no 68-012 (1968) relative aux successions, les cohéritiers peuvent convenir d’accorder aux héritières une somme forfaitaire au lieu d’une part égale de l’héritage foncier;

c)La loi no 2007-036 sur l’investissement étranger pourrait avoir une incidence défavorable sur l’accès des femmes à la terre et aux ressources;

d)Le changement climatique et les catastrophes naturelles récurrentes, notamment les phénomènes météorologiques extrêmes et la sécheresse, frappent les femmes de manière disproportionnée.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’abroger les dispositions discriminatoires de la loi n o  68-012 (1968) et d’amender la loi n o  2007-037 pour éliminer toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes en matière de propriété et d’administration foncière, de biens et d’héritage ainsi que pour faciliter l’acquisition et la rétention de terres et de ressources naturelles par les femmes;

b) De veiller à ce que la promotion de l’égalité des sexes soit formellement intégrée à son régime foncier et à ses politiques, plans et programmes de développement rural, en particulier ceux qui ont pour but la réduction de la pauvreté et le développement durable, en s’assurant que les femmes des zones rurales participent pleinement à leur formulation et à leur mise en œuvre (voir aussi CEDAW/C/MDG/CO/5 , par. 33);

c) D’accorder une attention toute spéciale à la situation des femmes des zones rurales, en veillant à ce qu’elles participent aux processus décisionnels dans leur milieu et dans leur famille, et à ce qu’elles accèdent pleinement aux services financiers et aux possibilités de renforcement des capacités, notamment dans le secteur de l’agriculture et de l’élevage;

d) De prendre des mesures volontaristes pour assurer l’accès des femmes des zones rurales à la justice, aux soins médicaux, à l’éducation et aux services communautaires;

e) De veiller à intégrer la perspective du genre et l’autonomisation des femmes r urales aux initiatives prises pour préparer l’adaptation au changement climatique et en atténuer les conséquences.

Les femmes et le handicap

Le Comité exprime sa préoccupation devant les formes croisées de discrimination à l’égard des femmes et des filles handicapées, qui sont souvent victimes de préjugés, de violence et de négligence. Le Comité constate avec préoccupation les obstacles auxquels se heurtent les femmes et les filles handicapées pour prendre part à la vie sociale et l’absence d’une stratégie ou politique claire de promotion de leurs droits fondamentaux.

Le Comité recommande à l’État partie d’accélérer l’élaboration et l’adoption du projet de plan prévoyant la prise en compte du handicap dans les politiques et stratégies nationales et de veiller à sa mise en œuvre, en vue de protéger les droits des femmes et des filles handicapées et d’éliminer les discriminations et les violences à leur égard.

Mariage et relations familiales

Le Comité prend note des efforts de l’État partie pour réguler certains aspects des mariages traditionnels, notamment leur enregistrement et la répartition équitable des biens en cas de dissolution. Il reste préoccupé toutefois par le fait que les mariages traditionnels demeurent largement non enregistrés, ce qui prive les femmes de l’accès à la protection que leur confère la loi no 2007-022 sur le mariage. Il s’inquiète aussi de ce que, en raison des attitudes coutumières et traditionnelles, les femmes sont considérées comme inférieures aux hommes et ne bénéficient pas du droit à l’égalité de traitement dans les affaires conjugales et familiales, notamment le divorce, l’héritage et la garde des enfants, et qu’il subsiste des cas de polygamie. Il se déclare une nouvelle fois préoccupé par l’ignorance généralisée de la loi sur le mariage dans la population, ainsi que par sa non-application.

Le Comité rappelle sa recommandation générale n o  21 (1994) sur l’égalité dans le mariage et les relations familiales et n o  29 (2013) sur l’article 16 de la Convention (conséquences économiques du mariage, relations familiales et leur dissolution) et recommande que l’État partie :

a) Garantisse sans plus attendre l’égalité des droits des femmes et des hommes dans tous les domaines relatifs au mariage et aux relations familiales, ainsi qu’en matière d’héritage, de divorce et de garde des enfants;

b) Popularise et fasse mieux connaître la loi sur le mariage, veille à la faire respecter, facilite l’enregistrement de tous les mariages afin de protéger les droits des femmes membres d’unions de facto et applique effectivement l’interdiction de la polygamie;

c) Procède à de vastes campagnes de sensibilisation et d’éducation pour changer les attitudes et les comportements relatifs au mariage et aux relations familiales parmi les chefs traditionnels et la population générale;

d) Conduise des campagnes de sensibilisation à l’intention des femmes et des filles pour leur faire connaître leurs droits dans le domaine des relations familiales et du mariage.

Mariage des enfants et mariage forcé

Le Comité note que l’âge minimal légal du mariage est de 18 ans. Il demeure cependant préoccupé par l’omniprésence des mariages d’enfants et/ou des mariages forcés, et par le fait que les jeunes filles et les femmes sont privées de leur droit de choisir librement leur époux et de contracter mariage.

Conformément à la recommandation générale commune n o  31 du Comité/observation générale n o  18 du Comité sur les droits de l’enfant, le Comité invite instamment l’État partie à :

a) Prendre toutes les mesures nécessaires pour combattre les mariages d’enfants et les mariages forcés de façon soutenue tout en s’attaquant à leurs causes profondes;

b) Diffuser et à faire connaître la loi interdisant le mariage avant 18 ans, notamment en sensibilisant le public aux conséquences préjudiciables des mariages d’enfants et/ou des mariages forcés sur la santé mentale et génésique des filles et sur la poursuite de leur éducation;

c) Renforcer les activités de sensibilisation sur les effets préjudiciables des mariages d’enfants et des mariages forcés sur les femmes et les filles, en coopération avec des dirigeants traditionnels ou religieux et les médias, afin d’encourager des changements propices à l’élimination de cette pratique pernicieuse , notamment en faisant connaître aux jeunes filles et aux femmes leur droit de contracter librement mariage.

Collecte et analyse de données

Le Comité est préoccupé par la pénurie générale de données ventilées par sexe, qui sont indispensables pour évaluer avec exactitude la situation des femmes et identifier les discriminations, pour informer et orienter l’élaboration des politiques et pour assurer le suivi et l’évaluation systématiques des progrès accomplis vers la réalisation d’une égalité de fait par les femmes.

Le Comité recommande à l’État partie d’améliorer la collecte, l’analyse et la diffusion de données complètes, ventilées par sexe, âge, handicap, ethnicité, lieu de résidence et situation socioéconomique, ainsi que l’emploi d’indicateurs mesurables pour évaluer les tendances de la situation des femmes et les progrès vers la réalisation par les femmes d’une égalité effective dans tous les domaines couverts par la Convention.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité invite instamment l’État partie à faire usage de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing dans ses efforts pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention.

Programme de développement durable à l’horizon 2030

Le Comité appelle à la réalisation d’une égalité effective des sexes, conformément aux dispositions de la Convention, dans la totalité du processus de mise en œuvre du programme de développement durable à l’horizon 2030.

Diffusion

Le Comité rappelle l’obligation de l’État partie d’appliquer de manière systématique et continue les dispositions de la Convention. Il exhorte l’État partie à s’attacher en priorité à la mise en œuvre des présentes observations et recommandations finales d’ici la soumission du prochain rapport périodique. Le Comité demande donc que les présentes observations finales soient diffusées en temps opportun, dans les langues officielles de l’État partie, à tous les niveaux (national, régional et local) des institutions d’État concernées, en particulier au Gouvernement, aux ministères, au Parlement et à l’appareil judiciaire, afin d’en permettre l’application complète. Il encourage l’État partie à collaborer avec toutes les parties prenantes concernées, notamment les associations d’employeurs, les syndicats, les organisations de défense des droits de l’homme et les organisations de femmes, les universités, les institutions de recherches et les médias. Il recommande de diffuser les présentes conclusions sous une forme appropriée au niveau des communautés locales afin de permettre leur mise en application. En outre, le Comité demande à l’État partie de continuer de diffuser à toutes les parties prenantes, outre les recommandations générales du Comité, la Convention, le Protocole facultatif y afférent et la jurisprudence correspondante.

Assistance technique

Le Comité recommande à l’État partie de lier la mise en œuvre de la Convention à ses efforts de développement et de recourir à cette fin à l’assistance technique régionale ou internationale. Le Comité invite instamment l’État partie à poursuivre sa coopération avec les institutions et programmes spécialisés des Nations Unies, notamment l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, la Division de statistique du Conseil économique et social du Secrétariat, le Programme des Nations Unies pour le développement, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance, le Fonds des Nations Unies pour la population, l’Organisation mondiale de la Santé, l’Organisation internationale du Travail, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et l’Organisation internationale pour les migrations.

Ratification d’autres traités

Le Comité note que l’adhésion de l’État partie aux neuf principaux instruments internationaux sur les droits de l’homme permettrait aux femmes d’exercer plus complètement leurs droits et libertés élémentaires dans tous les aspects de la vie. Le Comité encourage donc l’État partie à envisager de ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, ainsi que la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie, auxquelles il n’est pas encore partie.

Suivi des observations finales

Le Comité demande à l’État partie de communiquer par écrit dans les deux ans à venir des informations sur les mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations contenues aux paragraphes 27 a) et 37 d) et e) ci-dessus.

Préparation du prochain rapport

Le Comité invite l’État partie à soumettre son huitième rapport périodique en novembre 2019.

Le Comité demande à l’État partie de respecter les directives harmonisées pour l’établissement de rapports dans le cadre des traités internationaux relatifs aux droits de l’homme, et notamment les directives concernant l’établissement d’un document de base commun et de documents spécifiques à chaque instrument ( HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).