Observations finales concernant les septième et huitième rapports périodiques (présentés en un seul document) de la Mongolie *

Le Comité a examiné le rapport unique (valant huitième et neuvième rapports périodiques) de la Mongolie (CEDAW/C/MNG/8-9) lors de ses 1381e et 1382e séances, le 19 février 2016 (voir CEDAW/C/SR.1381 et 1382). La liste des points et questions du Comité figure dans le document CEDAW/C/MNG/Q/8-9 et les réponses du Gouvernement mongol sont publiées dans le document CEDAW/C/MNG/Q/8-9/Add.1.

A.Introduction

Le Comité se félicite que l’État partie ait rendu ses huitième et neuvième rapports périodiques. Il sait également gré à l’État partie de ses réponses écrites à la liste des points et questions soulevés par le Groupe de travail d’avant session, et il remercie la délégation pour sa présentation orale et les nouveaux éclaircissements apportés en réponse aux questions posées verbalement par les membres du Comité au cours du dialogue.

Le Comité félicite l’État partie pour sa délégation, dirigée par la Secrétaire d’État du Ministère du développement démographique et de la protection sociale, Mme Gocho Narangerel, délégation constituée par des représentants du Ministère de la santé et des sports, du Ministère du travail, du Ministère du développement démographique et de la protection sociale, du Ministère de la justice, de la Mission permanente de la Mongolie auprès de l’Office des Nations Unies à Genève et d’autres organisations internationales à Genève.

B.Aspects positifs

Le Comité prend note avec satisfaction des avancées réalisées depuis l’examen en 2008 du septième rapport périodique de l’État partie (CEDAW/C/MNG/7) dans l’adoption de réformes législatives, notamment des textes suivants :

a)Loi sur les personnes handicapées, en 2016;

b)Loi relative aux services de crèches et garderies, en 2015;

c)Code pénal révisé, qui érige en infraction pénale la violence familiale, interdit la discrimination fondée sur divers motifs et proscrit les actes de violence haineux et les discours incitant à la haine, en 2015;

d)Loi relative à la protection des victimes et des témoins, qui apporte une protection aux filles et aux femmes victimes d’actes de violence, en 2013;

e)Loi sur la lutte contre la traite des personnes, en 2012;

f)Loi sur la promotion de l’égalité des sexes, en 2011.

Le Comité se félicite des efforts déployés par l’État partie pour améliorer son cadre législatif visant à accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et à promouvoir les droits des femmes, notamment grâce à l’adoption des mesures suivantes :

a)Stratégie et Plan d’action à moyen terme concernant l’application de la loi relative à l’égalité des sexes (2013-2016), en 2013;

b)Stratégie nationale sur la santé maternelle et infantile (2011-2015).

Le Comité se félicite du fait que, au cours de la période écoulée depuis l’examen du rapport précédent, l’État partie a ratifié les instruments internationaux suivants ou y a adhéré :

a)Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en 2015;

b)Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en 2015;

c)Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort, en 2012;

d)Convention relative aux droits des personnes handicapées, en 2009.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Grand Khoural (Parlement)

Le Comité souligne le rôle crucial qui incombe au pouvoir législatif de veiller à l ’ application intégrale de la Convention (voir la déclaration du Comité sur ses relations avec les parlementaires, adoptée à sa quarante-cinquième session, en 2010). Il invite le Grand Khoural à prendre, d ’ ici à la prochaine période de présentation des rapports au titre de la Convention et conformément à son mandat, les mesures nécessaires à la mise en œuvre des présentes observations finales.

Cadre constitutionnel et législatif

Le Comité se félicite de l’adoption de la loi sur la promotion de l’égalité des sexes (2011), qui interdit la discrimination fondée sur le sexe. Il est toutefois préoccupé :

a)De ce que les nouvelles réformes législatives en vue de la promotion de la femme ne se voient pas attribuer des ressources suffisantes pour leur mise en œuvre et le respect du principe de responsabilité;

b)Par le fait que les organes et institutions de l’État ne connaissent pas suffisamment les droits que la Convention et le Protocole facultatif confèrent aux femmes, ni la notion d’égalité réelle entre les sexes et les recommandations générales du Comité;

c)Par l’absence d’informations sur l’accès des femmes à la justice, et sur les affaires dans lesquelles les dispositions de la Convention ont été directement invoquées ou appliquées;

d)Par le fait que les femmes elles-mêmes, en particulier celles qui vivent dans les zones rurales et celles qui appartiennent à des groupes défavorisés, ignorent les droits que leur reconnait la Convention et ne disposent donc pas des informations nécessaires pour s’en prévaloir.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de :

a) Mettre en place de solides mécanismes d ’ application du principe de responsabilité, et allouer des ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour l ’ application des lois conformément aux droits des femmes énoncés par la Constitution et les dispositions de la Convention;

b) Veiller à ce que la Convention, son Protocole facultatif et les recommandations générales du Comité soient suffisamment connues et appliquées par tous les organes de l ’ État, y compris par l ’ appareil judiciaire, et servent de cadre de référence pour les lois, les décisions de justice et les politiques en matière d ’ égalité des sexes et de promotion de la femme;

c) Mieux informer les femmes sur leurs droits et sur les voies de recours qui leur sont ouvertes en cas de violation des droits que leur reconnaît la Convention, et veiller à ce que les informations sur la Convention, son Protocole facultatif et les recommandations générales du Comité soient diffusées auprès de toutes les femmes, y compris celles vivant en milieu rural.

Accès à la justice et mécanisme de recours judiciaire

Le Comité note que la Commission nationale des droits de l’homme est habilitée à recevoir et à examiner les plaintes faisant état de discrimination fondée sur le sexe ainsi qu’à assurer le suivi de l’application de la Convention. Il constate toutefois avec préoccupation que les femmes, en particulier celles vivant dans les zones rurales, sont très mal informées en matière d’accès à la justice et sur les mécanismes juridiques des plaintes. Il s’inquiète également de l’absence de mesures visant à garantir un suivi efficace de l’application de la Convention et des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme.

Le Comité recommande à l ’ État partie de  :

a) Faire en sorte que les femmes soient mieux informées de leurs droits et aient des notions juridiques élémentaires dans tous les domaines, afin d ’ être en mesure de faire valoir les droits qu ’ elles tiennent de la Convention;

b) Renforcer la Commission nationale des droits de l ’ homme pour garantir son indépendance, en la dotant de ressources humaines, techniques et financières qui lui permettent de surveiller efficacement l ’ application de la Convention;

c) Améliorer la collaboration entre la Commission nationale des droits de l ’ homme et les organisations de la société civile et d ’ autres parties prenantes, pour garantir la protection et la mise en application des droits de tous les groupes de femmes, sans discrimination.

Mécanisme national de promotion de la femme

Le Comité relève avec inquiétude que, en 2014, le secrétariat de la Commission nationale sur l’égalité des sexes, pilier central du mécanisme national pour la promotion de la femme dans l’État partie, a été placé sous la houlette du Ministère du développement démographique et de la protection sociale, et que ses ressources financières et humaines ont été réduites, ce qui risque de freiner l’application de la Convention. Tout en prenant acte de l’adoption de la Stratégie et Plan d’action à moyen terme concernant l’application de la loi sur la promotion de l’égalité des sexes (2013-2016), le Comité s’inquiète de ce qu’aucun mécanisme de surveillance ou de responsabilisation n’ait été mis en place. Il regrette également qu’aucune information ne lui ait été soumise sur la collaboration de la Commission nationale avec le Parlement et la société civile, dans le domaine des droits de la femme.

Le Comité recommande à l ’ État partie de :

a) Renforcer la Commission nationale sur l ’ égalité des sexes en la dotant des ressources humaines, techniques et financières qui lui permettront d ’ appliquer efficacement la Convention, et veiller à ce que la Commission fonctionne de manière décentralisée;

b) Mettre en place des mécanismes de suivi afin d ’ évaluer régulièrement les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs fixés dans la Stratégie et le Plan d ’ action à moyen terme concernant l ’ application de la loi sur la promotion de l ’ égalité des sexes (2013-2016);

c) S ’ assurer que la Commission nationale sur l ’ égalité des sexes collabore avec le Parlement et la société civile, en particulier les organisations de femmes, quant à la mise en œuvre de la Stratégie et du Plan d ’ action à moyen terme.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a rétabli l’obligation d’un quota minimum de 30 % de femmes dans les listes de candidatures des partis politiques aux élections législatives. Il est toutefois préoccupé par l’absence de mise en œuvre concrète de mesures temporaires spéciales dans l’État partie.

Conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention, et rappelant sa recommandation générale n o  25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales, le Comité recommande à l ’ État partie de :

a) Renforcer les capacités de l ’ ensemble des fonctionnaires de l ’ État, des décideurs et des partis politiques, en particulier sur la notion de mesures temporaires spéciales, adopter et appliquer des mesures de ce type, y compris des objectifs et des quotas assortis de délais précis, aux fins de l ’ instauration d ’ une égalité de fait entre les femmes et les hommes dans tous les domaines où les femmes sont sous-représentées ou défavorisées, notamment dans la vie publique et politique, l ’ éducation, la santé et l ’ emploi;

b) S ’ attaquer aux causes profondes de l ’ application insuffisante des mesures temporaires spéciales existantes et se doter d ’ une législation visant à encourager le recours à ces mesures aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé.

Stéréotypes

Le Comité demeure préoccupé par la persistance, dans les médias et la société, de conceptions patriarcales profondément enracinées et de stéréotypes discriminatoires concernant les rôles et responsabilités des femmes et des hommes dans la famille, qui perpétuent la subordination des femmes dans la famille et la société et se reflètent, entre autres, dans les choix éducatifs et professionnels des femmes, leur participation limitée à la vie politique et publique, leur participation inégalitaire au marché du travail et leur statut inégal dans les rapports familiaux. Le Comité rappelle que ces stéréotypes discriminatoires font aussi partie des causes profondes de la violence à l’égard des femmes et note avec préoccupation qu’à ce jour, l’État partie n’a pas pris de mesures à long terme pour faire évoluer ou pour éliminer les stéréotypes discriminatoires et les attitudes traditionnelles préjudiciables.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de :

a) Mettre en place, sans tarder, une stratégie globale assortie de mesures dynamiques et soutenues visant les femmes et les hommes à tous les niveaux de la société, pour venir à bout des stéréotypes discriminatoires et des attitudes patriarcales concernant les rôles et responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société;

b) Prendre des mesures novatrices en direction des médias afin de mieux faire comprendre l ’ égalité fondamentale des hommes et des femmes, et renforcer une image positive et non stéréotypée de la femme dans tous les domaines, en insistant tout particulièrement sur le système éducatif.

Violence à l’égard des femmes

Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption, en 2015, du Code pénal révisé, qui érige en infraction pénale la violence familiale et d’autres formes de violence telles que le harcèlement, les menaces et l’exploitation sexuelle à l’encontre des femmes et des filles, y compris celles appartenant à des minorités sexuelles, et il se réjouit de ce que les auteurs de tels actes ne puissent plus désormais se soustraire aux sanctions par le biais d’une réconciliation avec les victimes. Il note également que le projet de loi révisé sur la lutte contre la violence familiale comporte une définition élargie de la violence au sein de la famille. Il demeure toutefois préoccupé par le retard pris dans l’adoption de ce projet de loi. Il reste également inquiet de la forte prévalence, dans l’État partie, de la violence à l’égard des femmes, en particulier de la violence familiale et sexuelle, et de l’absence de statistiques dans ces domaines. Tout en relevant la création au sein de la police d’un service spécialisé dans la prévention de la violence intrafamiliale et les infractions pénales commises contre les enfants, le Comité constate avec préoccupation qu’il n’existe qu’un seul foyer public pour les victimes d’actes de violence. Il s’inquiète aussi de ce que les femmes et les filles handicapées n’ont pas accès aux foyers pour les victimes d’actes de violence, à une prise en charge appropriée, ou aux services d’appui aux victimes, et qu’aucune formation n’est dispensée aux fonctionnaires, aux travailleurs sociaux ou au personnels médicaux sur les besoins et la vulnérabilité spécifiques des femmes handicapées victimes d’actes de violence.

Rappelant sa recommandation générale n o  19 sur la violence à l ’ égard des femmes (1992), le Comité demande instamment à l ’ État partie de :

a) Hâter l ’ adoption du projet de loi sur la prévention de la violence familiale, adopter des mesures globales pour prévenir et combattre la violence à l ’ égard des femmes et des filles, veiller à ce que les femmes et les filles victimes de violence aient accès à des mesures de réparation immédiates, notamment d ’ indemnisation et de protection, et à ce que les auteurs soient poursuivis en justice et punis comme il convient;

b) Mettre en place des programmes de formation continue obligatoires à l ’ intention des juges, des procureurs, des policiers et autres agents de la force publique, sur l ’ application rigoureuse de la législation pénale réprimant la violence à l ’ égard des femmes et sur les procédures particulières à suivre lors de la prise en charge de femmes victimes d ’ actes de violence, en particulier celles qui sont handicapées;

c) Fournir une aide et une protection adéquates aux femmes victimes de violence en créant des refuges, y compris dans les zones rurales, et en intensifiant la collaboration avec les organisations non gouvernementales qui accueillent les victimes et leur proposent des services de réadaptation;

d) Recueillir des données statistiques, ventilées par âge et type de lien entre la victime et l ’ auteur, sur la violence familiale, la violence sexuelle et d ’ autres formes de violence;

e) Mettre en place des conditions adéquates pour que les femmes handicapées victimes de violence puissent obtenir réparation et bénéficier d ’ une aide à la réadaptation.

Traite et exploitation de la prostitution

Le Comité prend note de la création, en 2012, de la Sous-Commission de la prévention de la traite, qui est chargée de coordonner la mise en œuvre de la loi relative à la lutte contre la traite d’êtres humains (2012). Il est toutefois préoccupé par :

a)Le peu de ressources financières affectées à l’application de la législation et des programmes existants, en particulier aux programmes de prévention, pour faire face aux causes profondes de la traite dont sont victimes les filles et leur famille démunies, et par l’insuffisance des mesures de protection et de réadaptation en faveur des femmes et des filles victimes de la traite;

b)Le retard pris dans l’adoption du Plan national de lutte contre la traite des personnes;

c)L’absence de renseignements sur le nombre de plaintes, d’enquêtes, de poursuites et de condamnations se rapportant à des affaires de traite des femmes et des filles et d’exploitation de la prostitution, ainsi que sur les programmes d’assistance et de réadaptation destinés aux victimes;

d)L’absence d’initiatives visant à sensibiliser davantage les membres de l’appareil judiciaire et les agents de la force publique, ainsi que les fonctionnaires chargés du contrôle aux frontières, les travailleurs sociaux et le personnel médical quant à l’importance de l’orientation précoce des victimes de la traite et la nécessité d’une prise en charge soucieuse de leur situation particulière en raison de leur sexe;

e)La discrimination et la stigmatisation dont sont victimes les prostituées, par l’absence de foyers d’accueil et de centres d’urgence spécifiquement destinés aux prostituées et adaptés à leurs besoins, ainsi que par l’absence de programmes de réinsertion à l’intention des femmes qui souhaitent sortir de la prostitution.

Le Comité recommande à l ’ État partie de :

a) Mettre pleinement en œuvre sa législation relative à la traite d ’ êtres humains et d ’ augmenter les ressources financières allouées à l ’ application des lois et des programmes visant à combattre la traite;

b) Finaliser et adopter sans délai un plan d ’ action national contre la traite d ’ êtres humains;

c) Renforcer les capacités des membres de l ’ appareil judiciaire, de la police et de la police des frontières, des travailleurs sociaux et des personnels de santé eu égard à l ’ orientation précoce des victimes de la traite et à la nécessité d ’ une prise en charge soucieuse de leur situation particulière en raison de leur sexe;

d) S ’ attaquer aux causes profondes de la traite en améliorant les perspectives d ’ éducation et les perspectives économiques des filles, des femmes et de leur famille, afin de réduire leur vulnérabilité face aux auteurs de la traite;

e) Se doter d ’ une stratégie globale pour faire face au phénomène de la prostitution, mettre à la disposition des femmes qui souhaitent sortir de la prostitution des foyers d ’ accueil et des centres d ’ urgence, des programmes de soutien et de réinsertion, ainsi que d ’ autres moyens de gagner leur vie, et prendre des mesures pour réduire la demande;

f) Fournir, dans son prochain rapport périodique, des renseignements et des données exhaustives sur la traite des femmes et des filles, notamment sur le nombre de poursuites engagées et de condamnations prononcées à l ’ encontre des auteurs, ainsi que sur les femmes prostituées.

Participation à la vie politique et publique

Tout en se félicitant de la représentation accrue des femmes dans la fonction publique et dans l’appareil judiciaire, le Comité demeure préoccupé par le faible pourcentage de femmes participant à la vie politique et publique, en particulier aux postes de prise de décisions, notamment au Parlement, malgré le quota de 30 % de candidates sur les listes des partis politiques et dans l’administration publique, en raison de la persistance des attitudes traditionnelles et patriarcales, de l’absence de mesures temporaires spéciales, de l’accès limité des femmes aux réseaux politiques, du peu de moyens déployés pour renforcer les capacités des éventuelles candidates et du financement insuffisant de leurs campagnes, ainsi que par la contribution financière obligatoire, dite « taxe candidature ». Le Comité note également avec préoccupation l’absence de toute nomination de femme à un poste de gouverneur de province ou de ville. Il s’inquiète aussi de ce que l’article 11.5 de la loi électorale (2015) restreigne le droit des personnes handicapées, notamment des femmes, à voter et se porter candidates à une élection.

Le Comité recommande à l ’ État partie de  :

a) Prendre des mesures pour tendre davantage vers l ’ égalité de participation des femmes à la vie politique et publique à tous les niveaux et dans tous les secteurs, en particulier aux postes décisionnels, au Parlement et au Gouvernement, à savoir :

i) Mettre effectivement en œuvre le quota actuel de 30  % de candidatures féminines sur les listes électorales des partis politiques, notamment en veillant à ce que les candidates figurent à des positions élevées sur les listes électorales et/ou des circonscriptions électorales;

ii) Renforcer les capacités des candidates, en particulier sur la façon de faire campagne efficacement, sur l ’ accès aux réseaux de financement et aux réseaux politiques et sur l ’ utilisation des médias;

b) Se doter de mesures ciblées, notamment des programmes de formation, de modes de recrutement faisant place aux femmes et de mesures temporaires spéciales, pour que des femmes soient nommées à des postes décisionnels tant au niveau national que localement, sur un pied d ’ égalité avec leurs homologues masculins, conformément à la recommandation générale n o  23 du Comité sur la participation des femmes à la vie politique et publique;

c) Supprimer la « taxe candidature », qui constitue un obstacle majeur pour les candidates;

d) Travailler à sensibiliser la classe politique, les responsables locaux, les journalistes et l ’ opinion publique à l ’ importance de la participation des femmes aux prises de décisions, pour faire prendre davantage conscience qu ’ une participation pleine, libre et démocratique des femmes à la vie politique et publique, dans des conditions d ’ égalité avec les hommes, est indispensable à la mise en œuvre intégrale de la Convention et au développement de la société et de l ’ économie;

e) Faire en sorte de nommer des femmes à des postes de responsabilité, des postes de gouverneur de province ou de ville par exemple;

f) Abroger sans délai les dispositions de la loi électorale (2015) qui restreignent le droit de vote des personnes handicapées, y compris des femmes, et faire en sorte que la discrimination fondée sur le handicap soit interdite par la loi.

Éducation

Le Comité prend note avec satisfaction des taux élevés d’alphabétisation des femmes et d’inscription des filles dans l’enseignement primaire et secondaire. Il demeure toutefois préoccupé :

a)Du fait que l’on ne décèle pas clairement une démarche soucieuse de l’égalité entre les sexes, alors même que la santé sexuelle et procréative et les droits dans ce domaine ont été inclus dans les programmes scolaires;

b)Par la persistance de la violence, notamment la violence sexuelle et les sévices sexuels, dans les écoles et les dortoirs des internats, qui entraînent un nombre élevé de grossesses chez les adolescentes;

c)Par la pratique consistant à expulser de l’école les élèves enceintes et à leur donner des formes d’éducation différentes, plutôt que des possibilités de réintégration dans le système éducatif formel;

d)Du fait que la législation nationale ne prévoit aucun système d’accès inclusif à l’éducation pour les filles handicapées.

Le Comité recommande à l ’ État partie de :

a) Mettre en place dans les programmes scolaires un enseignement adapté à l ’ âge des élèves et portant sur la santé sexuelle et procréative et les droits dans ce domaine, et, pour les adolescentes et les adolescents, une éducation sexuelle intégrant les relations entre les sexes et les comportements sexuels responsables;

b) Mener des enquêtes et engager des poursuites dans les affaires de violence sexuelle ou de sévices sexuels perpétrés dans les écoles et dans les dortoirs des internats par des enseignants ou d ’ autres élèves, veiller à ce que les auteurs soient dûment punis et à ce que les victimes obtiennent réparation et bénéficient d ’ une réadaptation;

c) Prendre des mesures pour le maintien des élèves enceintes dans l ’ école et leur réintégration après l ’ accouchement;

d) Modifier la législation nationale afin que les filles handicapées puissent bénéficier d ’ une éducation inclusive et accessible, y compris dans les zones rurales, et former les enseignants aux besoins éducatifs spéciaux de ces filles.

Emploi

Le Comité note avec préoccupation :

a)La persistance d’un écart de rémunération considérable et croissant entre les hommes et les femmes dans tous les secteurs, la ségrégation professionnelle sur le marché du travail et la concentration des femmes dans les emplois faiblement rémunérés des secteurs formel et informel;

b)La liste des emplois interdits aux femmes, qui paraît excessivement défensive en ce qu’elle vise un éventail d’emplois et d’activités ne justifiant objectivement pas l’interdiction, ce qui a pour effet de limiter les perspectives économiques des femmes dans un certain nombre de domaines, en particulier dans l’industrie minière;

c)Le mandat, les moyens et l’efficacité limités du système national d’inspection du travail;

d)L’âge de la retraite, anticipé pour les femmes, ce qui limite leurs chances de trouver un emploi et, éventuellement, réduit leur pension de vieillesse;

e)L’absence de renseignements sur la législation interdisant le harcèlement sexuel sur le lieu de travail et prévoyant des voies de recours civiles et/ou pénales, sur le nombre de poursuites et de condamnations et sur les sanctions infligées aux auteurs des faits.

Le Comité recommande à l ’ État partie de  :

a) Redoubler d ’ efforts pour créer un environnement favorable permettant aux femmes de devenir plus indépendantes financièrement, notamment en sensibilisant les employeurs des secteurs public et privé quant à l ’ interdiction de la discrimination des femmes, y compris des femmes handicapées, en matière d ’ emploi, et pour promouvoir l ’ insertion des femmes dans l ’ économie formelle, notamment en leur offrant des formations professionnelles et techniques;

b) Mettre effectivement en œuvre la législation qui garantit l ’ égalité salariale pour un travail de valeur égale, se doter de mesures visant à réduire et combler l ’ écart de rémunération entre les sexes, et revaloriser régulièrement les salaires dans les secteurs à forte concentration de main-d ’ œuvre féminine;

c) Renforcer la qualité et la capacité du système national d ’ inspection du travail de manière à ce que les conditions de travail des femmes fassent l ’ objet d ’ un contrôle efficace, sanctionner comme il se doit les employeurs qui se livrent à des pratiques discriminatoires à l ’ égard des femmes et améliorer l ’ accès des travailleuses à la justice;

d) Passer en revue la liste des professions et secteurs interdits, promouvoir et faciliter l ’ accès des femmes aux professions jusque-là interdites en améliorant les conditions de travail ainsi que l ’ hygiène et la sécurité au travail;

e) Élever progressivement l ’ âge de la retraite des femmes pour l ’ aligner sur celui des hommes, en vue d ’ ouvrir aux femmes de meilleures possibilités d ’ emploi;

f) Adopter une loi définissant et interdisant expressément le harcèlement sexuel sur le lieu de travail.

Santé

Le Comité salue les progrès accomplis pour réduire les taux de mortalité maternelle et infantile. Il note toutefois avec préoccupation :

a)L’absence d’éducation globale à la santé sexuelle et procréative et aux droits en la matière, notamment en ce qui concerne les comportements sexuels responsables, le manque de services de planification de la famille ainsi que le niveau élevé de besoins de contraception non satisfaits chez les femmes et les filles;

b)La mise en œuvre de la politique nataliste, qui accentue les stéréotypes discriminatoires à l’encontre des femmes et peut conduire à la pauvreté;

c)L’absence d’information des femmes et des filles souffrant de handicaps, ainsi que des lesbiennes, bisexuelles, transgenres et intersexuées, en ce qui concerne la santé sexuelle et procréative et les droits en la matière, et le manque de formation du personnel médical s’agissant des besoins particuliers de ces femmes;

d)Le manque d’information des femmes et des filles sur la prévalence du cancer du col de l’utérus et du cancer du sein dans l’État partie, ainsi que sur les traitements dont elles peuvent bénéficier.

Conformément à sa recommandation générale n o  24 (1999) sur les femmes et la santé, le Comité demande à l ’ État partie de prendre les mesures suivantes :

a) Renforcer l ’ éducation à la santé sexuelle et procréative et aux droits en la matière en informant très largement sur les moyens de contraception disponibles, accessibles et d ’ un coût abordable et sur la planification de la famille, afin de réduire le nombre des grossesses non désirées et des grossesses précoces;

b) Faire en sorte que la politique nataliste ne renforce pas les stéréotypes discriminatoires et, pour cela, adopter des stratégies de réduction de la pauvreté, prendre des mesures d ’ amélioration de la qualité de vie des mères en charge d ’ enfants et créer des structures d ’ accueil pour les enfants;

c) Améliorer la qualité des informations fournies aux femmes et aux filles handicapées ainsi qu ’ aux lesbiennes, bisexuelles, transgenres et intersexuées, en ce qui concerne la santé sexuelle et procréative et les droits en la matière, et former des personnels médicaux pour répondre à leurs besoins particuliers;

d) Collecter des données ventilées sur la prévalence du cancer du col de l ’ utérus et du cancer du sein dans l ’ État partie, et former des médecins et d es professionnels de la santé au dépistage précoce de ces maladies, y compris dans les zones rurales.

Autonomisation économique des femmes

Le Comité note l’adoption, en 2014, de la sous-stratégie relative à la promotion des perspectives économiques et des capacités de direction des femmes, mais reste préoccupé par la persistance de la pauvreté des femmes, en particulier dans les zones rurales et dans les ménages dirigés par une femme, ainsi que par l’accès limité des femmes à la propriété, au crédit et aux prêts hypothécaires. Il relève également avec préoccupation qu’aucune mesure ciblée n’a été prise pour que les femmes âgées et les femmes handicapées puissent participer aux prises de décisions dans des projets de développement et bénéficier de leur mise en œuvre.

Le Comité recommande à l ’ État partie de continuer à renforcer ses programmes de lutte contre la pauvreté et à favoriser l ’ autonomisation économique des femmes en veillant à ce que celles-ci, et notamment les femmes chefs de famille, les femmes âgées et les femmes handicapées, aient accès à ces programmes à égalité avec les hommes, en particulier dans les zones rurales.

Femmes en milieu rural

Le Comité note avec préoccupation :

a)La difficile condition de la femme dans les zones rurales, et regrette l’absence de données sur leur situation et le fait que l’État partie n’ait pas pris de mesures pour s’attaquer à la pauvreté des femmes en milieu rural et garantir leur droit à la propriété et à l’exploitation des terres, ainsi que leur accès à la justice, à l’éducation, à la santé, au logement, à l’eau potable, à l’assainissement, à un emploi dans le secteur structuré, au développement des compétences et aux possibilités de formation, aux activités génératrices de revenu et au microcrédit;

b)La faible participation des femmes des milieux ruraux aux processus décisionnels au niveau local;

c)Les incidences des changements climatiques et des catastrophes liées aux phénomènes climatiques, ainsi que les conséquences environnementales dommageables de l’activité industrielle dans l’État partie, principalement du secteur minier, qui touchent les femmes des milieux ruraux de manière disproportionnée.

Le Comité recommande à l ’ État partie de  :

a) Solliciter l ’ assistance et la coopération internationales, selon ce qu ’ il convient, pour améliorer les infrastructures dans les zones rurales, et formuler des politiques de lutte contre la pauvreté des femmes en milieu rural afin d ’ assurer leur accès à la justice, à l ’ éducation, au logement, à l ’ eau potable, à l ’ assainissement, à l ’ emploi dans le secteur structuré, à l ’ amélioration des compétences et aux possibilités de formation professionnelle, aux activités génératrices de revenu et au microcrédit, ainsi que leur droit à la propriété et à l ’ exploitation des terres, en tenant compte de leurs besoins spécifiques;

b) Assurer la participation des femmes des milieux ruraux à la prise de décisions au niveau local, au même titre que les hommes;

c) Examiner les incidences des stratégies sociales et économiques de développement rural sur les droits fondamentaux des femmes et rassembler des données précises et ventilées;

d) Intégrer une démarche soucieuse d ’ égalité entre les sexes dans les politiques nationales et les plans d ’ action nationaux se rapportant aux changements climatiques, aux secours en cas de catastrophe et à la réduction des risques, ainsi qu ’ aux conséquences environnementales et socioéconomiques dommageables des activités industrielles, principalement celles du secteur minier, en considérant les femmes non seulement comme des victimes mais aussi comme des participantes potentielles à l ’ élaboration et à la mise en œuvre de ces politiques.

Femmes handicapées et femmes âgées

Le Comité s’inquiète de l’absence de politiques et de mesures publiques visant à protéger les droits des femmes et des filles handicapées, y compris leurs droits à une éducation inclusive, aux soins de santé, à l’emploi, au logement et à la participation à la vie politique et publique, ainsi que de l’absence de mécanismes de protection des femmes et des filles handicapées contre les formes de discrimination convergentes, la violence et les mauvais traitements. Il est en outre préoccupé par la situation des femmes âgées et leurs difficultés d’accès aux soins de santé et à une protection contre la violence et les mauvais traitements.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de :

a) Se doter de politiques et de programmes d ’ ensemble afin de protéger les droits des femmes et des filles handicapées, en leur assurant l ’ égalité d ’ accès à l ’ éducation, à l ’ emploi, au logement, aux soins de santé et aux autres services de base ainsi qu ’ à la protection sociale, et promouvoir leur autonomie et leur accès aux services communautaires ainsi que leur participation à la vie politique et à la vie publique;

b) Mettre en place des partenariats avec la société civile, les associations locales et la communauté internationale pour identifier, y compris dans les zones rurales et les zones reculées de l ’ État partie, les femmes et les filles handicapées et les femmes âgées qui sont confrontées à des formes convergentes de discrimination fondées sur le handicap, l ’ âge ou d ’ autres motifs, ainsi qu ’ à l ’ enfermement et à différentes formes de violences physiques et psychologiques.

Mariage et rapports familiaux

Le Comité s’inquiète de la situation des mères célibataires et des femmes chefs de famille, et notamment de la faiblesse des prestations familiales et du manque de programmes de soutien aux mères célibataires et à leurs enfants, qui courent un risque croissant de pauvreté, de discrimination et de mauvais traitements.

Le Comité recommande à l ’ État partie de :

a) Revoir régulièrement à la hausse et ajuster le niveau des prestations familiales destinées aux mères célibataires et aux femmes chefs de famille pour leur garantir, ainsi qu ’ à leurs enfants, un niveau de vie suffisant;

b) Se doter de mesures et de programmes ciblés pour favoriser l ’ autonomisation des femmes célibataires sur le plan économique, faire en sorte qu ’ elles aient accès de façon abordable à des logement décents, à l ’ éducation, à la formation professionnelle, aux soins de santé et à la vie culturelle, et les protéger contre la discrimination et les mauvais traitements.

Collecte des données

Le Comité est préoccupé par le manque général de données statistiques à jour, ventilées en fonction du sexe, de l’âge, de l’origine ethnique, du handicap, de la situation géographique et du contexte socioéconomique, pourtant indispensables si l’on veut évaluer précisément la situation des femmes et déterminer si elles sont victimes de discrimination, élaborer des politiques éclairées et ciblées et suivre et évaluer systématiquement les avancées vers la réalisation de l’égalité de fait entre les femmes et les hommes, dans tous les domaines visés par la Convention.

Le Comité demande à l ’ État partie de mettre au point un système d ’ indicateurs de la condition féminine pour améliorer la collecte de données ventilées par sexe et autres facteurs pertinents indispensables pour évaluer les effets et l ’ efficacité des politiques et des programmes visant à institutionnaliser l ’ égalité des sexes et améliorer l ’ exercice, par les femmes, de leurs droits fondamentaux. À cet égard, le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur sa recommandation générale n o  9 (1989) relative aux données statistiques concernant la situation des femmes, l ’ encourage à solliciter l ’ assistance technique des organismes des Nations Unies compétents et à resserrer sa collaboration avec les associations de femmes qui pourraient l ’ aider à collecter des données précises.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité invite l ’ État partie à utiliser la Déclaration et Programme d ’ action de Beijing dans ses initiatives visant à mettre en œuvre les dispositions de la Convention.

Programme de développement durable à l’horizon 2030

Le Comité appelle à la réalisation de l ’ égalité effective entre les sexes, conformément aux dispositions de la Convention, tout au long du processus de mise en œuvre du Programme de développement durable à l ’ horizon 2030.

Diffusion

Le Comité demande à l ’ État partie de veiller à la diffusion rapide des présentes observations finales, dans sa langue officielle, auprès des institutions publiques pertinentes de tous niveaux (national, régional, local), en particulier du Gouvernement, des ministères, du Parlement et de l ’ appareil judiciaire, afin d ’ en assurer l ’ application intégrale.

Assistance technique

Le Comité recommande à l ’ État partie de rechercher l ’ assistance et la coopération internationales et de recourir à l ’ assistance technique pour élaborer et mettre en œuvre un vaste programme visant à faire appliquer lesdites recommandations et l ’ ensemble de la Convention. Le Comité invite aussi l ’ État partie à poursuivre sa coopération avec les institutions spécialisées et les programmes du système des Nations Unies.

Ratification d’autres traités

Le Comité note que l ’ adhésion de l ’ État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme permettrait aux femmes de jouir de leurs droits fondamentaux et de leurs libertés fondamentales dans tous les aspects de la vie. C ’ est pourquoi il encourage l ’ État partie à envisager de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, à laquelle il n ’ est pas encore partie.

Suite donnée aux observations finales

Le Comité prie l ’ État partie de lui fournir par écrit, dans un délai de deux ans, des enseignements sur les mesures prises pour donner suite aux recommandations figurant aux paragraphes 17 a) et 19 a), b) et e) ci-dessus.

Établissement du prochain rapport

Le Comité invite l ’ État partie à présenter son dixième rapport périodique en mars 2020.

Le Comité demande à l ’ État partie de suivre les directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, englobant le document de base et les rapports pour chaque instrument ( HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).