Nations Unies

CRC/C/MLT/CO/3-6

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

26 juin 2019

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’enfant

Observations finales concernant le rapport de Malte valant troisième à sixième rapports périodiques *

I.Introduction

1.Le Comité a examiné le rapport de Malte valant troisième à sixième rapports périodiques (CRC/C/MLT/3-6) à ses 2376e et 2377e séances (voir CRC/C/SR.2376 et 2377), les 14 et 15 janvier 2019, et a adopté les présentes observations finales à sa 2400e séance, le 31 mai 2019.

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de Malte valant troisième à sixième rapports périodiques, ainsi que les réponses écrites à la liste de points (CRC/C/MLT/Q/3-6/Add.1), qui lui ont permis de mieux appréhender la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de l’État partie.

II.Mesures de suivi adoptées et progrès réalisés par l’État partie

3.Le Comité salue les progrès accomplis par l’État partie dans divers domaines, notamment la ratification de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en 2015, du Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, en 2019, et de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, en 2014.

4.Le Comité prend note avec intérêt des mesures législatives adoptées pour mettre en œuvre la Convention, en particulier les modifications introduites au paragraphe 1 de l’article 35 du Code pénal en vue de faire passer de 9 à 14 ans l’âge de la responsabilité pénale des enfants et celles apportées à l’article 339 du Code pénal en vue d’interdire toute forme de châtiment corporel.

5.Le Comité se félicite des mesures institutionnelles et des politiques relatives aux droits de l’enfant qui ont été adoptées depuis son dernier examen, notamment la politique nationale en faveur de l’enfance (2017-2024), la politique stratégique nationale pour l’éducation positive (2016-2024), la politique nationale en faveur de la jeunesse à l’horizon 2020, la politique relative à l’assiduité scolaire (2014), la politique de lutte contre le comportement de harcèlement dans les écoles (2014), la politique pour une alimentation saine et l’exercice d’une activité physique (2015) et la stratégie nationale d’alphabétisation (2014-2019).

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

6.Le Comité rappelle à l’État partie le caractère indivisible et interdépendant de tous les droits consacrés par la Convention et souligne l’importance de toutes les recommandations figurant dans les présentes observations finales. Il appelle l’attention de l’État partie sur les recommandations concernant les domaines ci-après, dans lesquels il est urgent de prendre des mesures : les droits de l’enfant et les entreprises (par. 17), l’enregistrement des naissances et la nationalité (par. 23), les pratiques préjudiciables (par. 29), l’éducation, y compris la formation et l’orientation professionnelles (par. 39), les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants (par. 42) et l’administration de la justice pour mineurs (par. 45).

7. Le Comité recommande à l’État partie d’assurer la réalisation des droits de l’enfant conformément à la Convention, à son Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et à son Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, dans le cadre de l’exécution du Programme de développement durable à l’horizon 2030. De surcroît, il invite instamment l’État partie à faire en sorte que les enfants participent activement à la conception et à la mise en œuvre des politiques et des programmes les concernant adoptés aux fins de la réalisation des 17 objectifs de développement durable.

A.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6))

Législation

8. Le Comité recommande à l’État partie d’accélérer l’adoption du projet de loi sur la protection des mineurs (protection de remplacement) et de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer son entrée en vigueur et son application effective dans le plein respect de la Convention, en particulier en créant les structures nécessaires à cette fin. Il lui recommande également de veiller à allouer des ressources humaines, techniques et financières suffisantes à son application.

Politique et stratégie globales

9. Le Comité salue l’adoption de la politique nationale en faveur de l’enfance (2017-2024) et recommande à l’État partie d’élaborer, sur la base de cette politique, une stratégie assortie d’objectifs clairs et de plans d’action coordonnés aux fins de l’application de la Convention, et d’allouer des ressources humaines, techniques et financières suffisantes à l’exécution, au suivi et à l’évaluation de ces plans d’action.

Coordination

10. Le Comité félicite l’État partie d’avoir ajouté les droits de l’enfant dans l’intitulé du Ministère de la famille, des droits de l’enfant et de la solidarité sociale, et lui recommande de veiller à ce que ce Ministère soit doté d’un mandat clair et dispose des ressources humaines, techniques et financières dont il a besoin pour coordonner toutes les activités liées à la mise en œuvre de la Convention aux niveaux intersectoriel, national, régional et local.

Allocation de ressources

11. À la lumière de son observation générale n o 19 (2016) sur l’élaboration des budgets publics aux fins de la réalisation des droits de l’enfant, le Comité recommande à l’État partie d’élaborer ses budgets en tenant compte des droits de l’enfant, d’affecter des crédits à l’action en faveur des enfants et d’établir des indicateurs et un mécanisme de suivi expressément destinés à vérifier que les ressources allouées à la mise en œuvre de la Convention sont réparties de manière appropriée, efficace et équitable. Il lui recommande notamment  :

a) De fixer des objectifs de performance reliant les buts des programmes pour l’enfance aux crédits alloués et aux dépenses réelles, afin de pouvoir suivre les résultats obtenus et leur incidence sur les enfants, y  compris les enfants en situation de vulnérabilité ou de marginalisation.

b) De prévoir des lignes et codes budgétaires détaillés pour toutes les dépenses actuelles, prévues, adoptées et révisées qui concernent directement les enfants  ;

c) D’utiliser des nomenclatures budgétaires qui permettent de rendre compte des dépenses effectuées en faveur des droits de l’enfant, de les suivre et de les analyser  ;

d) De veiller à ce que les fluctuations ou les réductions de crédits alloués à la prestation de services ne conduisent pas à une réduction des ressources consacrées aux droits de l’enfant  ;

e) De renforcer les audits pour accroître la transparence et l’application du principe de responsabilité en matière de dépenses publiques dans tous les secteurs, et de renforcer les moyens dont il dispose pour détecter les actes de corruption, enquêter à leur sujet et poursuivre les auteurs, compte tenu de la cible 16.5 des objectifs de développement durable.

Collecte de données

12. Renvoyant à son observation générale n o 5 (2003) sur les mesures d’application générales de la Convention relative aux droits de l’enfant, le Comité recommande à l’État partie de continuer d’améliorer son système de collecte de données et de collecter régulièrement des données couvrant toutes les questions sur lesquelles portent la Convention et des Protocoles facultatifs s’ y  rapportant, en les ventilant par âge, sexe, handicap, origine ethnique et nationale et situation socioéconomique, et d’analyser les informations ainsi recueillies, de manière à pouvoir mieux examiner la situation de tous les enfants, en particulier les enfants en situation de vulnérabilité.

Suivi indépendant

13. Renvoyant à son observation générale n o 2 (2002) concernant le rôle des institutions nationales indépendantes de défense des droits de l’homme dans la protection et la promotion des droits de l’enfant, le Comité réitère sa recommandation antérieure (CRC/C/MLT/CO/2, par.  19) et engage l’État partie à prendre les mesures voulues pour garantir l’indépendance du Bureau du Commissaire à l’enfance et faire en sorte que celui-ci dispose en propre de ressources humaines, techniques et financières suffisantes et bénéficie des immunités nécessaires pour s’acquitter efficacement de sa mission, y  compris pour traiter rapidement et de manière appropriée les plaintes qu’il reçoit de la part ou au nom d’enfants.

Diffusion, sensibilisation et formation

14. Tout en prenant note des efforts déployés par l’État partie pour mettre en œuvre des programmes de sensibilisation, notamment faire en sorte que des cours sur les droits de l’enfant soient dispensés dans les écoles et que les personnes travaillant pour et avec les enfants soient dûment formées, le Comité recommande à Malte  :

a) De redoubler d’efforts pour diffuser des informations sur la Convention et les Protocoles facultatifs s’ y  rapportant, notamment en menant des activités de sensibilisation auprès des enfants, d’une manière adaptée à ceux-ci, ainsi qu’auprès des familles, du grand public, des organisations religieuses, des législateurs et des juges  ;

b) D’organiser régulièrement des sessions de formation consacrées à la Convention et aux Protocoles facultatifs à l’intention de toutes les personnes qui travaillent pour et avec des enfants.

Coopération avec la société civile

15. Le Comité est profondément préoccupé par le fait que certaines opérations de recherche et de sauvetage de réfugiés et de migrants, parmi lesquels des enfants, menées en Méditerranée par des organisations de la société civile ont été considérées comme des actes criminels. Il prie instamment l’État partie de garantir les droits et la liberté d’action de la société civile et de veiller à ce que le sauvetage de migrants ne soit pas considéré comme une infraction.

Droits de l’enfant et entreprises

16.Le Comité est préoccupé par le manque d’informations sur les mesures prises pour donner suite à ses précédentes recommandations en ce qui concerne les droits de l’enfant et des entreprises (CRC/C/MLT/CO/2, par. 25), en particulier les mesures prises pour lutter contre l’exploitation sexuelle des enfants dans le contexte des voyages et du tourisme.

17. Renvoyant à son observation générale n o 16 (2013) sur les obligations des États concernant les incidences du secteur des entreprises sur les droits de l’enfant et aux Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, approuvés par le Conseil des droits de l’homme en 2011, le Comité recommande à l’État partie  :

a) De revoir et d’adapter son cadre législatif pour garantir que les entreprises et filiales opérant sur le territoire de l’État partie ou administrées depuis le territoire de l’État partie ne portent pas atteinte aux droits de l’enfant et pour interdire expressément l’exploitation sexuelle des enfants, en particulier dans le contexte du tourisme et des voyages, en vue d’éliminer ce phénomène  ;

b) D’établir des mécanismes de suivi pour que les atteintes aux droits de l’enfant fassent l’objet d’enquêtes et donnent lieu à réparation, afin de renforcer la transparence et l’application du principe de responsabilité et de prévenir les violations de la Convention et du protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants  ;

c) De mener des programmes de sensibilisation auprès des acteurs du secteur du tourisme et du grand public en vue de faire évoluer les mentalités et d’encourager le signalement des mauvais traitements, et de diffuser largement le Code mondial d’éthique du tourisme de l’Organisation mondiale du tourisme auprès des agences de voyages.

d) De coopérer davantage encore à l’effort international mené pour lutter contre l’exploitation sexuelle des enfants dans le secteur du voyage et du tourisme dans le cadre d’accords multilatéraux, régionaux et bilatéraux visant à prévenir et éliminer ce phénomène.

B.Définition de l’enfant (art. 1)

18. Renvoyant à la recommandation générale/observation générale conjointe n o 31 du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et n o 18 du Comité des droits de l’enfant sur les pratiques préjudiciables (2014), le Comité recommande à l’État partie de modifier sa loi sur le mariage et sa loi sur les unions civiles afin d’en supprimer toutes les exceptions à l’interdiction de se marier ou de contracter une union civile avant l’âge de 18  ans .

C.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12)

Principe de non-discrimination

19. Le Comité accueille avec satisfaction les modifications introduites dans la loi sur l’égalité entre les hommes et les femmes et dans le Code pénal pour interdire la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre et la religion. Compte tenu de la cible 10.3 des objectifs de développement durable, le Comité rappelle ses précédentes recommandations (CRC/C/MLT/CO/2, par.  29) et recommande à l’État partie  :

a) D’adopter et d’appliquer une stratégie globale de lutte contre toutes les formes de discrimination prévoyant l’exécution de programmes de sensibilisation et des programmes éducatifs à l’intention des enfants, des familles, du public en général et des organisations religieuses  ;

b) D’intensifier les efforts faits pour lutter contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y  est associée, autant de comportements qui ont des effets préjudiciables sur les enfants, en particulier les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants  ;

c) Prendre des mesures d’action positive en faveur des enfants, en particulier les enfants vulnérables et marginalisés, tels que les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants, les enfants handicapés et les enfants nés hors mariage.

Intérêt supérieur de l’enfant

20. Notant que le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant est pris en compte dans le projet de loi sur la protection des mineurs (protection de remplacement) et renvoyant à son observation générale n o 14 (2013) sur le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale, le Comité recommande à l’État partie  :

a) De veiller à ce que ce droit soit également pris en compte dans tous les textes législatifs qui concernent les enfants et qui ont une incidence sur eux, y  compris la loi (modifiée) sur l’immigration  ;

b) De définir des critères permettant de déterminer l’intérêt supérieur de l’enfant dans chaque domaine et d’en faire une considération primordiale, et de veiller à ce que toutes les personnes en position d’autorité apprennent à évaluer comme il se doit l’intérêt supérieur de l’enfant chaque fois qu’une décision doit être prise concernant un enfant.

Respect de l’opinion de l’enfant

21. Prenant note des efforts que l’État partie déploie pour garantir le respect de l’opinion de l’enfant, en particulier dans le cadre du mandat du Commissaire à l’enfance, le Comité rappelle ses précédentes observations finales (CRC/C/MLT/CO/2, par.  33) et, renvoyant à son observation générale n o 12 (2009) sur le droit de l’enfant d’être entendu, recommande à l’État partie  :

a) De s’employer plus activement à garantir le respect du droit de tous les enfants − y  compris les enfants vulnérables et marginalisés, tels que les enfants handicapés et les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants − d’être entendus sur toutes les questions les concernant, au sein de la famille, à l’école, devant les tribunaux et dans toute procédure administrative ou autre, et de veiller à ce que l’opinion des enfants soit dûment prise en compte eu égard à l’âge et au degré de maturité de chacun  ;

b) De veiller à ce que toutes les personnes qui travaillent avec et pour les enfants apprennent à écouter les enfants et à tenir compte de leur opinion dans toutes les décisions les concernant, compte étant tenu de l’âge et à du degré de maturité de chacun  ;

c) De mener des programmes et des campagnes de sensibilisation du public en vue de promouvoir la participation active et véritable de tous les enfants à la vie de leur famille, de leur communauté et de leur école, notamment au sein des conseils d’élèves, en accordant une attention particulière aux enfants en situation de vulnérabilité et de marginalisation  ;

d) De faire en sorte que l’Outil d’évaluation de la participation des enfants du Conseil de l’Europe soit adopté et effectivement mis en œuvre afin que la pratique consistant à consulter les enfants et à les faire participer aux décisions qui les concernent devienne standard.

D.Libertés et droits civils (art. 7, 8 et 13 à 17)

Enregistrement des naissances et nationalité

22.S’il prend note des modifications apportées au Code civil en vue de permettre aux enfants nés en mer à bord d’un navire non immatriculé d’être enregistrés dans l’État partie pour des raisons humanitaires, le Comité est néanmoins gravement préoccupé par le fait que des enfants, notamment des enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants, n’obtiennent pas de certificat de naissance et risquent d’être apatrides.

23. Compte tenu de la cible 16.9 des objectifs de développement durable, le Comité prie instamment l’État partie  :

a) De redoubler d’efforts pour enregistrer la naissance des enfants dont les parents n’ont pas de documents d’identité  ;

b) De s’employer plus activement à établir la nationalité des enfants dont la nationalité est inconnue, conformément au Code civil et à la loi sur la nationalité maltaise  ;

c) D’établir une procédure efficace et rationnelle de détermination du statut d’apatride associée d’un mécanisme d’identification et d’orientation des enfants sans papiers exposés au risque d’apatridie  ;

d) D’accélérer son adhésion à la Convention relative au statut des apatrides (1954) et d’envisager de ratifier la Convention sur la réduction des cas d’apatridie (1961), la Convention européenne sur la nationalité (1977) et la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention des cas d’apatridie en relation avec la succession d’États (2009)  ;

e) De solliciter l’assistance technique du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), entre autres, pour mettre en œuvre les présentes recommandations.

Droit à l’identité

24. Le Comité note avec satisfaction que la loi sur la protection de l’embryon a été modifiée pour donner aux enfants conçus par procréation assistée le droit d’accéder aux informations sur leurs origines. Le Comité recommande à l’État partie de continuer de s’employer à faire de l’intérêt supérieur des enfants conçus par procréation assistée une considération primordiale et d’envisager dans ce contexte de fournir aux parents l’accompagnement et le soutien voulus.

E.Violence à l’égard des enfants (art. 19, 24 (par. 3), 28 (par. 2), 34, 37 a) et 39)

Châtiments corporels

25. Tout en se félicitant que l’article 339 du Code pénal ait été modifié pour interdire expressément toutes les formes de châtiments corporels, le Comité, renvoyant à son observation générale n o 8 (2006) sur le droit de l’enfant à une protection contre les châtiments corporels et les autres formes cruelles ou dégradantes de châtiments et recommande à l’État partie  :

a) De veiller à ce que l’interdiction des châtiments corporels soit appliquée dans tous les contextes, à savoir à la maison, à l’école, dans les institutions pour enfants, y  compris les établissements de prise en charge de la petite enfance et les structures de protection de remplacement, et soit prise en compte dans l’administration de la justice  ;

b) De renforcer et d’élargir l’action qu’il mène pour sensibiliser les parents, les personnes travaillant avec et pour les enfants et le grand public aux conséquences néfastes des châtiments corporels  ;

c) D’encourager le recours à des formes positives, non violentes et participatives d’éducation et de discipline.

Maltraitance et négligence

26. S’il note que des mesures de prévention et d’intervention et des programmes de formation ont été mis en œuvre pour lutter contre la maltraitance et la négligence à l’égard des enfants, en particulier en application du cadre respect pour tous (2014) et des programmes pour des écoles sûres, le Comité, renvoyant à son observation générale n o 13 (2011) sur le droit de l’enfant d’être protégé contre toutes les formes de violence et à la cible 16.2 des objectifs de développement durable, recommande à l’État partie  :

a) D’accélérer l’entrée en vigueur du projet de loi sur la protection des mineurs (protection de remplacement) et de faire appliquer les mesures visant à protéger les enfants contre la violence, les mauvais traitements et la négligence  ;

b) D’élaborer et de mettre en œuvre une stratégie globale visant à prévenir et combattre la violence, la maltraitance et la négligence à l’égard des enfants dans tous les contextes, en s’attaquant aux causes profondes de ces phénomènes  ;

c) De créer une base de données nationale recensant tous les cas de violence, de maltraitance et de négligence à l’égard des enfants, y  compris les cas de violence familiale, et de procéder à une évaluation complète de l’ampleur, des causes et de la nature de ces phénomènes  ;

d) De prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer pleinement la mise en œuvre du concept de Maison des enfants, d’encourager les tribunaux à utiliser cette structure interinstitutions adaptée aux enfants pour recueillir les témoignages des enfants, et de doter cette structure de ressources humaines, techniques et financières suffisantes  ;

e) De veiller à ce que les enfants victimes aient accès à des services de réadaptation et de réinsertion, tels que ceux proposés dans la Maison des enfants, ainsi qu’à des programmes d’indemnisation appropriés  ;

f) De veiller à ce que des ressources humaines, techniques et financières suffisantes soient allouées au Bureau du Directeur chargé de la protection de l’enfance pour que celui-ci soit en mesure de donner suite aux signalements d’enfants victimes de maltraitance et d’enquêter sur ces cas.

Exploitation sexuelle et violences sexuelles

27. Le Comité note avec préoccupation les cas de violences sexuelles perpétrées sur des enfants par des membres de leur famille et/ou par des personnes de leur cercle de confiance, y  compris par le personnel religieux de l’Église catholique. Il demeure préoccupé par le manque de données disponibles sur les violences sexuelles et l’exploitation sexuelles des enfants et par la sensibilisation insuffisante à ces questions dans l’État partie. Le Comité engage instamment l’État partie  :

a) À mener des activités de sensibilisation sur la violence sexuelle à l’égard des enfants, y  compris dans le contexte familial et en ligne, et à lutter contre la stigmatisation des victimes d’exploitation sexuelle et de violence sexuelles  ;

b) À mettre en place des mécanismes, des procédures et des lignes directrices accessibles, efficaces, adaptés aux enfants et respectant l’anonymat pour que les cas d’exploitation sexuelle d’enfants et de violences sexuelles à l’égard d’enfants soient obligatoirement signalés et que les victimes soient orientées vers les services compétents  ;

c) À protéger les enfants contre de nouvelles violences, entre autres en empêchant ou en décourageant tout contact entre des enfants et les personnes reconnues coupables de telles violences, en particulier dans l’exercice de leurs fonctions  ;

d) À veiller à ce que des enquêtes transparentes soient effectivement menées sur tous les cas de violences sexuelles, à ce que les auteurs supposés soient poursuivis au pénal et à ce que les personnes reconnues coupables reçoivent une sanction pénale adaptée  ;

e) À mettre en place une commission d’enquête indépendante et impartiale chargée d’examiner les affaires dans lesquelles des violences sexuelles auraient été infligées à des enfants par des membres du clergé catholique  ; de veiller à ce que les auteurs supposés soient poursuivis au pénal, à ce que les personnes reconnues coupables reçoivent une sanction pénale adaptée  ;

f) À recueillir des données ventilées sur les violences sexuelles infligées aux enfants et sur le nombre de plaintes déposées, de poursuites engagées et de condamnations prononcées.

Pratiques préjudiciables

28.Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour éliminer les pratiques préjudiciables aux enfants, notamment la modification de l’article 251 du Code pénal qui érige en infraction pénale les mutilations génitales féminines, la stérilisation forcée et le mariage forcé, et l’adoption de la loi sur l’identité de genre, l’expression du genre et les caractéristiques sexuelles qui dispose que l’identité sexuelle est fondée sur l’auto-identification de chacun plutôt que sur des pratiques médicales et chirurgicales préjudiciables, le Comité note avec préoccupation :

a)Que les mariages d’enfants et les mutilations génitales féminines sont des phénomènes fréquents au sein des communautés de migrants qui restent peu signalés, et que sur 486 filles originaires de pays où les mutilations génitales féminines sont pratiquées, 39 à 57 % seraient exposées à un risque de mutilation génitale féminine ;

b)Que des enfants intersexués auraient subi des interventions chirurgicales ou d’autres procédures médicalement inutiles, sans donner leur consentement à ces mesures qui ont souvent des conséquences irréversibles et peuvent causer de graves souffrances physiques et psychologiques ; et que ces enfants n’ont eu droit à aucune réparation ni indemnisation dans ces affaires.

29. Renvoyant à la recommandation générale/observation générale conjointe n o 31 du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et n o 18 du Comité des droits de l’enfant sur les pratiques préjudiciables (2014) et tenant compte de la cible 5.3 des objectifs de développement durable, le Comité demande instamment à l’État partie  :

a) De renforcer ses programmes de sensibilisation du public, y  compris les campagnes de sensibilisation, sur les effets préjudiciables des mariages d’enfants et des mutilations génitales féminines sur la santé physique et mentale des enfants et sur le bien-être de ces derniers  ;

b) De dispenser une formation systématique aux fonctionnaires, aux enseignants, aux juges, aux procureurs, aux agents des forces de l’ordre et aux travailleurs sociaux afin que ceux-ci soient en mesure de reconnaître les victimes potentielles de mariage d’enfants et de mutilations génitales féminines et de les orienter vers les services compétents  ;

c) De renforcer les dispositifs de protection et les programmes de prise en charge pour les personnes qui sont victimes ou risquent d’être victimes de mariages d’enfants et de mutilations génitales féminines  ;

d) De veiller à ce qu’aucun enfant intersexué ne soit soumis à des procédures médicale ou chirurgicales inutiles pendant l’enfance ou la petite enfance, de garantir l’intégrité physique, l’autonomie et l’ autodétermination des enfants concernés et d’apporter aux familles d’enfants intersexués les conseils et l’appui appropriés  ;

e) De mener des enquêtes efficaces sur les cas d’enfants intersexués ayant subi des interventions chirurgicales et des traitements médicaux sans donner leur consentement éclairé, et d’offrir une réparation aux victimes de telles pratiques, y  compris une indemnisation adéquate et des mesures de réadaptation.

F.Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 9 à 11, 18 (par. 1 et 2), 20, 21, 25 et 27 (par. 4))

Enfants privés de milieu familial

30. Le Comité se félicite des efforts déployés par l’État partie pour améliorer le système de protection de remplacement pour les enfants privés de protection parentale, en particulier des mesures prises pour renforcer les capacités de l’ Aġenzija Appoġġ et encourager le placement en famille d’accueil des enfants qui ne peuvent pas rester dans leur famille. Il demeure toutefois préoccupé par le nombre d’enfants qui sont encore placés dans des « foyers d’accueil » et par le fait que certaines de ces structures hébergent des enfants de tous âges, ce qui est susceptible d’exacerber les vulnérabilités des plus jeunes , notamment vis - à-vis des plus âgés. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur les Lignes directrices relatives à la protection de remplacement pour les enfants (résolution 64/142 de l’Assemblée générale, annexe) et lui recommande :

a) De continuer à revoir ses politiques concernant la protection de remplacement pour les enfants privés de milieu familial afin de réduire le nombre d’enfants placés dans des foyers d’accueil, y  compris des foyers administrés par des organisations religieuses ;

b) De veiller à ce que l’enfant ne soit retiré à sa famille qu’en dernier recours, après une évaluation en bonne et due forme de son intérêt supérieur et compte tenu de son opinion, à ce que le placement soit adapté aux besoins de l’enfant, et à ce que les plus jeunes ne soient pas placés dans le même « foyer d’accueil » que les plus âgés ;

c) De favoriser et de faciliter la prise en charge des enfants en milieu familial et de renforcer le système de placement en famille d’accueil pour les enfants qui ne peuvent pas rester dans leur famille ;

d) D’établir un cadre de réunification familiale qui tient compte de l’intérêt supérieur de l’enfant et prévoit la fourniture d’un accompagnement psychosocial et d’une aide économique à la famille si elle en a besoin.

G.Handicap, santé de base et bien-être (art. 6, 18 (par. 3), 23, 24, 26, 27 (par. 1 à 3) et 33)

Enfants handicapés

31. Renvoyant à son observation générale n o 9 (2006) sur les droits des enfants handicapés, le Comité demande instamment à l’État partie d’adopter une approche du handicap fondée sur les droits de l’homme et de prendre les mesures suivantes :

a) Organiser la collecte de données sur les enfants handicapés, et établir, en collaboration avec les organisations de personnes handicapées, notamment les organisations d’enfants handicapés, un système efficace d’évaluation du handicap, dont il est nécessaire de se doter si on veut élaborer des budgets, des politiques et des programmes répondant aux besoins des enfants handicapés ;

b) Adopter des normes nationales minimales en ce qui concerne l’éducation et la protection de la petite enfance et l’adaptation des qualifications et de la formation du personnel éducatif aux droits et aux besoins éducatifs des enfants handicapés ;

c) Élaborer et mettre en œuvre une stratégie de placement en milieu ouvert prévoyant des solutions efficaces de prise en charge à domicile ou dans des structures ouvertes, notamment la fourniture d’une aide aux parents pour leur permettre s’occuper de leurs enfants handicapés ;

d) Renforcer la politique d’éducation inclusive à l’école en prenant des mesures visant à faire en sorte que les élèves handicapés, y  compris ceux qui ont un handicap intellectuel ou psychosocial , bénéficient d’aménagements raisonnables, et former le personnel et les enseignants spécialisés afin qu’ils puissent fournir aux enfants qui ont des difficultés d’apprentissage un accompagnement individualisé et toute l’attention nécessaire ;

e) Mener des campagnes de sensibilisation à l’intention des agents de la fonction publique, des familles et de la population en général afin de combattre la stigmatisation et les préjugés dont les enfants handicapés sont victimes et de donner une image positive de ces enfants.

Santé mentale

32. Compte tenu de la cible 3.4 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie  :

a) De continuer à améliorer la disponibilité et l’accessibilité des services et programmes de santé mentale destinés aux enfants et aux adolescents, en particulier les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants ;

b) D’allouer aux services et programmes de santé mentale des ressources humaines, techniques et financières leur permettant de s’attacher les services d’un nombre suffisant de professionnels de la santé qualifiés, notamment des pédopsychologues et des pédopsychiatres, pour répondre aux besoins des enfants ;

c) De veiller à ce que les enfants qui sont diagnostiqués comme souffrant d’un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité et qui présentent des troubles du comportement soient soumis à des examens approfondis, la prescription de médicaments soit une solution de dernier recours envisagée uniquement après évaluation de l’intérêt supérieur de l’enfant concerné, et les enfants et leurs parents soient dûment informés des effets secondaires que les médicaments prescrits peuvent avoir, ainsi que des solutions non médicamenteuses à leur disposition.

Santé des adolescents

33. Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie pour fournir une aide et un accompagnement aux adolescentes enceintes, mais constate avec préoccupation que l’avortement constitue toujours une infraction au regard du Code pénal quelles que soient les circonstances, y  compris lorsque la grossesse met en péril la vie ou la santé de l’adolescente ou résulte d’un acte criminel comme un viol ou un inceste . Renvoyant à son observation générale n o 4 (2003) sur la santé et le développement de l’adolescent dans le contexte de la Convention et à son observation générale n o 20 (2016) sur la mise en œuvre des droits de l’enfant pendant l’adolescence, le Comité recommande à l’État partie :

a) D’élaborer et d’appliquer une politique globale de santé sexuelle et procréative à l’intention des adolescents et de veiller à ce que l’éducation à la santé sexuelle et procréative soit inscrite dans les programmes scolaires obligatoires, s’adresse aux adolescents des deux sexes et mette tout particulièrement l’accent sur la prévention des grossesses précoces et des infections sexuellement transmissibles ;

b) De faire en sorte que les adolescents aient accès à des services de santé sexuelle et procréative adéquats, et en particulier aux moyens de contraception modernes ;

c) De dépénaliser l’avortement en toutes circonstances et de garantir l’accès des adolescentes à l’avortement sécurisé et aux soins après avortement en veillant à ce que les décisions soient prises en tenant dûment compte de l’avis des intéressées.

Consommation de drogues et toxicomanie

34. Ayant à l’esprit la cible 3.5 des objectifs de développement durable et accueillant avec satisfaction l’adoption de la loi sur la pharmacodépendance (qui privilégie le traitement par rapport à la détention) et de la politique nationale relative à la consommation d’alcool (2018-2023), le Comité recommande à l’État partie de continuer de s’employer à lutter contre la consommation d’alcool, de drogues et de tabac par les adolescents, notamment en fournissant aux enfants et aux adolescents des informations justes et objectives à ce sujet et en leur apprenant comment éviter de tomber dans la toxicomanie, et de mettre en place des services de désintoxication et de réduction des risques accessibles et adaptés aux jeunes.

Nutrition

35. Le Comité se félicite des mesures prises pour appliquer la politique de 2015 relative à l’alimentation saine et à l’activité physique et recommande à l’État partie de s’employer plus activement à promouvoir l’adoption d’un mode de vie sain, à sensibiliser la population à l’importance d’une alimentation saine et, surtout, à lutter contre l’obésité infantile.

Allaitement maternel

36. Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption de la politique nationale et du plan d’action en faveur de l’allaitement maternel (2015-2020) et recommande à l’État partie de mettre pleinement en œuvre le Code international de commercialisation des substituts du lait maternel et l’initiative Hôpitaux amis des bébés et de redoubler d’efforts pour encourager et favoriser l’allaitement maternel, notamment en menant des campagnes visant à en faire connaître les avantages sur le long terme pour la mère et pour l’enfant et en mettant des services de conseil à la disposition des mères dans les hôpitaux et les autres établissements de soins.

Salubrité de l’environnement

37. Le Comité est préoccupé par les répercussions néfastes que la forte pollution atmosphérique dans l’État partie, qui est due en particulier au trafic routier, a sur le climat et sur la santé des enfants. Compte tenu de la cible 3.9 des objectifs de développement durable, il recommande à l’État partie :

a) De veiller à l’application effective de son cadre réglementaire et d’accélérer la mise en œuvre de plans visant à réduire les taux de pollution atmosphérique tels que le plan national pour la qualité de l’air, en particulier près des écoles et des zones résidentielles ;

b) De placer les droits et la participation des enfants au centre des stratégies nationales et internationales d’adaptation aux changements climatiques et d’atténuation de leurs effets.

H.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28 à 31)

Éducation et formation et orientation professionnelles

38.Le Comité salue les efforts faits par l’État partie pour réduire la proportion d’enfants qui arrêtent l’école à l’âge de 16 ans, au terme de leur scolarité obligatoire, ainsi que pour combattre le harcèlement scolaire et intégrer les enfants demandeurs d’asile ou réfugiés dans l’enseignement ordinaire. Il constate toutefois avec préoccupation que les enfants vulnérables et marginalisés, notamment les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants et les enfants handicapés, continuent de se heurter à des obstacles qui les empêchent d’avoir accès à une éducation de qualité, du fait notamment de l’enregistrement tardif des demandes d’asile ou de l’absence d’aménagements raisonnables pour les enfants handicapés dans les écoles ordinaires. Le Comité est également en outre préoccupé par le phénomène du harcèlement et du cyberharcèlement, qui touche les enfants à l’école et ailleurs.

39. Compte tenu des cibles 4.5 et 4.a des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie :

a) De prendre les mesures qui s’imposent pour améliorer l’accessibilité et la qualité de l’éducation, notamment pour les enfants vulnérables et marginalisés, tels que les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants et les enfants handicapés, et de faire en sorte que l’ensemble du système éducatif s’inscrive dans une approche fondée sur les droits de l’homme de sorte qu’il soit plus inclusif et aide tous les enfants à réaliser leurs aspirations ;

b) De renforcer encore l’application, le suivi et l’évaluation du Cadre pour la stratégie d’éducation (2014-2024) et d’ y  allouer des ressources humains, techniques et financières suffisantes ;

c) De continuer de s’employer à mettre en œuvre le programme d’enseignement non traditionnel et de promouvoir l’élaboration programmes de formation professionnelle de qualité afin de permettre aux enfants et aux jeunes, en particulier ceux qui ont arrêté l’école, d’acquérir de nouvelles compétences ;

d) De renforcer les mesures visant à combattre le harcèlement, en particulier le cyberharcèlement, et à sensibiliser l’opinion à ses effets néfastes, notamment en veillant à ce que le programme pour des écoles sûres soit dûment appliqué en allouant des ressources humaines, techniques et financières suffisantes au service de la sécurité de l’enfant et à l’unité de lutte contre le harcèlement ;

e) De revoir les programmes scolaires et les méthodes d’enseignement afin de mettre davantage l’accent sur l’importance de l’éducation, de la pensée critique, de l’acceptation des différences, du respect de la diversité et du renforcement de la cohésion sociale.

Éducation aux droits de l’homme

40. Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer et de mettre à exécution un plan d’action national pour l’éducation aux droits de l’homme, comme recommandé dans le cadre du Programme mondial en faveur de l’éducation aux droits de l’homme .

I.Mesures de protection spéciales (art. 22, 30, 32, 33, 35, 36, 37 b) à d) et 38 à 40)

Enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants

41.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures législatives et les mesures de politique générale prises pour améliorer les garanties et procédures applicables aux enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants, notamment la modification de la loi sur l’immigration, en 2015, et l’adoption de la stratégie relative à l’accueil des demandeurs d’asile et des migrants en situation irrégulière, en 2016. Il se félicite que l’État partie ait mis un terme, en 2015, à la détention automatique des demandeurs d’asile et des réfugiés, y compris les enfants, et que les enfants non accompagnés bénéficient d’une protection temporaire pour motif humanitaire. Il constate toutefois avec une profonde préoccupation que :

a)Les autorités tardent à donner l’autorisation de débarquer les migrants et les réfugiés secourus, y compris les enfants, dans le lieu sûr le plus proche, si bien que ces personnes se retrouvent bloquées en mer, ce qui aggrave encore leur vulnérabilité ;

b)L’évaluation de l’âge n’est pas effectuée par une équipe pluridisciplinaire et la transparence et l’indépendance des décisions laissent à désirer, de même que la procédure de désignation de tuteurs et le respect du des principes de l’intérêt supérieur de l’enfant et du bénéfice du doute ;

c)Le mécanisme de placement sous tutelle des enfants non accompagnés n’est pas doté de tous les moyens humains, techniques et financiers nécessaires et n’est pas suffisamment indépendant, ce qui est susceptible de provoquer des conflits d’intérêts et de nuire à l’intérêt supérieur de l’enfant ;

d)Le règlement sur l’accueil des demandeurs d’asile portant application de la loi sur les réfugiés autorise toujours le placement en détention des enfants demandeurs d’asile ou réfugiés à titre de mesure de dernier recours (art. 14, par. 1), ainsi que le placement des enfants non accompagnés de 16 ans et plus dans les centres accueillant les demandeurs d’asile adultes (art. 15) ;

e)Le statut de bénéficiaire d’une protection temporaire pour motif humanitaire qui est accordé aux enfants non accompagnés, ainsi que les droits et privilèges connexes, ne sont pas réglementés par la loi.

42. Renvoyant à son observation générale n o 6 (2005) sur le traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine , ainsi qu’aux observations générales n o s 3 et 4 (2017) du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et n o s 22 et 23 (2017) du Comité des droits de l’enfant sur les droits de l’homme des enfants dans le contexte des migrations internationales, le Comité demande instamment à l’État partie :

a) De continuer à revoir les lois, règlements, politiques et pratiques pertinentes afin qu’elles n’exposent pas les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants à de nouvelles vulnérabilités et qu’elles n’exacerbent ni n’accroissent celles auxquelles ils sont déjà exposés, notamment en adoptant une approche axée sur les droits de l’homme tenant compte du genre et du handicap et adaptée au jeune âge des enfants ;

b) D’adopter, en ce qui concerne la détermination de l’âge, un protocole standard prévoyant l’intervention d’une équipe pluridisciplinaire, respectueux des droits des enfants et destiné à être utilisé uniquement en cas de doute sérieux quant à l’âge déclaré de l’intéressé et en tenant compte des pièces documentaires et autres disponibles, et de garantir l’accès à des mécanismes de recours efficaces ;

c) De veiller à ce que, dès leur arrivé à la frontière, les enfants non accompagnés soient placées sous la tutelle d’une personne dûment compétente dont les intérêts ne risquent pas d’être en conflit avec l’exercice de sa mission, et à ce que l’intérêt supérieur de l’enfant soit évalué à tous les stades de la procédure d’asile ;

d) De traiter les demandes d’asile ou d’octroi du statut de réfugié concernant des enfants, notamment celles qui concernent des enfants non accompagnés, dans un esprit positif et avec humanité et diligence, afin de trouver des solutions durables, de garantir le plein respect du principe de non-refoulement et de faciliter l’accès à la procédure d’asile pour les enfants ayant besoin d’une protection internationale, conformément aux articles 6, 22 et 37 de la Convention ;

e) De veiller à ce que les services de protection de l’enfance soient rapidement informés lorsqu’un enfant non accompagné ou séparé arrive dans l’État partie et prennent part à la procédure de détermination de l’intérêt supérieur de l’enfant, conformément au droit international, notamment en dispensant aux gardes ‑ frontière une formation sur les droits de l’enfant et les procédures adaptées aux enfants ;

f) D’interdire en droit la détention administrative des enfants migrants, demandeurs d’asile ou réfugiés et de veiller à ce que cette interdiction soit appliquée dans la pratique, et de prévoir de véritables mesures de substitution à la détention afin que les enfants puissent séjourner avec des membres de leur famille ou avec leur tuteur dans en milieu ouvert, dans le respect de leur intérêt supérieur ;

g) De faire une priorité du transfert immédiat des enfants demandeurs d’asile et de leur famille hors du centre de premier accueil et de trouver des solutions de réinstallation permanentes et viables pour les réfugiés, en particulier pour les enfants et leur famille ;

h) D’inscrire dans la législation la politique consistant à accorder une protection temporaire aux enfants non accompagnés pour motif humanitaire, de façon que les droits et l’intérêt supérieur des intéressés soient protégés même lorsque ceux-ci n’ont pas besoin d’une protection internationale.

Vente, traite et enlèvement

43. Constatant que les enfants qui sont les plus vulnérables et les plus marginalisés, tels que les enfants demandeurs d’asile, réfugiés ou migrants, sont particulièrement exposés au risque d’être victimes de traite à des fins d’exploitation sexuelle ou économique, le Comité recommande à l’État partie, compte tenu de son observation générale n o 13 (2011) sur le droit de l’enfant d’être protégé contre toutes les formes de violence et de la cible 16.2 des objectifs de développement durable :

a) De faire en sorte que le prochain plan d’action contre la traite des enfants tienne pleinement compte des droits de l’enfant, en accordant une attention particulière aux enfants les plus vulnérables et les plus marginalisés ;

b) De revoir son mécanisme d’orientation des victimes vers les services compétents et ses procédures opérationnelles, et de se doter de dispositifs permettant de prendre des mesures coordonnées pour repérer et protéger les enfants victimes de traite et d’exploitation sexuelle, et notamment d’échanger systématiquement et rapidement des informations entre les responsables concernés ;

c) De renforcer encore les moyens dont disposent les agents de police, les gardes-frontière et les travailleurs sociaux pour repérer et protéger les enfants victimes de la traite ;

d) De poursuivre et j uger sans tarder les personnes soupçonnées de s’être livrées à la traite des enfants, de punir les coupables comme il se doit, et de prendre des mesures de réparation et de réadaptation en faveur de tous les enfants victimes.

Administration de la justice pour mineurs

44.S’il se félicite que le paragraphe 1 de l’article 35 du Code pénal ait été modifié pour relever à 14 ans l’âge de la responsabilité pénale, le Comité demeure toutefois préoccupé de constater que :

a)Les enfants mis en cause aux côtés de personnes âgées de plus de 16 ans sont traités comme des adultes ;

b)Les enfants âgés de 16 à 18 ans relèvent du système pénal pour adultes ;

c)Il arrive que des enfants soient détenus avec des adultes ;

d)Les enfants qui auraient détourné le navire venu leur porter secours au large des côtes libyennes en mars 2019 ont été accusés de terrorisme et traduits devant la Court of Magistrates au lieu d’être renvoyés devant le tribunal pour mineurs et ont initialement été placés en détention dans le quartier de haute sécurité d’une prison pour adultes (le centre pénitentiaire de Corradino) ;

e)Les dispositions qui prévoient des mesures de substitution à la privation de liberté ne sont pas pleinement appliquées.

45. Renvoyant à son observation générale n o 10 (2007) sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour mineurs, le Comité invite instamment l’État partie à mettre son système de justice pour mineurs en parfaite conformité avec la Convention et les autres normes applicables. Rappelant ses recommandations antérieures, il engage l’État partie :

a) À revoir la législation nationale afin que tous les mineurs de 18  ans en conflit avec la loi soient traités comme des enfants et relèvent du système de justice pour mineurs, y  compris lorsque leurs coaccusés sont des adultes, et restreindre davantage encore la durée de la détention avant jugement des enfants et le recours à cette mesure ;

b) À veiller à ce que la détention soit une mesure de dernier recours imposée pour la période la plus courte possible et que l’opportunité d’ y  mettre fin soit régulièrement examinée ;

c) À faire en sorte, lorsque le placement en détention est inévitable, que les enfants ne soient pas détenus avec des adultes et que leurs conditions de détention soient conformes aux normes internationales, notamment en ce qui concerne l’accès aux services d’éducation et de santé ;

d) À encourager l’application de mesures extrajudiciaires telles que la déjudiciarisation, la médiation et l’accompagnement psychologique pour les enfants accusés d’infractions pénales et, chaque fois que cela est possible, l’imposition de peines non privatives de liberté comme la liberté surveillée et le travail d’intérêt général.

Suivi donné aux précédentes observations finales et recommandations du Comité sur l’application du Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés

46.Le Comité regrette le manque d’informations fournies en ce qui concerne la mise en œuvre des observations finales qu’il avait formulées en 2006 (CRC/C/OPAC/MLT/CO/1) au sujet du rapport initial de l’État partie soumis en application du Protocole facultatif à la Convention, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.

J.Ratification du Protocole facultatif établissant une procédure de présentation de communications

47. Le Comité recommande à l’État partie de ratifier le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications afin de renforcer encore le respect des droits de l’enfant .

K.Ratification d’instruments internationaux relatifs aux droits del’homme

48. Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille afin de renforcer encore le respect des droits de l’enfant.

49. Le Comité demande instamment à l’État partie de s’acquitter de l’obligation de présenter des rapports qui lui est faite par le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, et rappelle que le rapport sur l’application de cet instrument devait être présent au plus tard le 28 octobre 2012 .

L.Coopération avec les organismes régionaux

50. Le Comité recommande à l’État partie de coopérer avec le Conseil de l’Europe à la mise en œuvre de la Convention et des autres instruments relatifs aux droits de l’homme, sur son territoire comme sur celui d’autres États membres du Conseil de l’Europe.

V.Mise en œuvre et soumission de rapports

A.Suivi et diffusion

51. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour que les recommandations figurant dans les présentes observations finales soient pleinement mises en œuvre. Il recommande également que le rapport valant troisième à sixième rapports périodiques, les réponses écrites à la liste de points et les présentes observations finales soient largement diffusés dans les langues du pays.

B.Mécanisme national chargé de l’établissement des rapports et du suivi

52. Le Comité recommande à l’État partie de se doter d’un mécanisme national permanent chargé de coordonner et d’élaborer les rapports devant être soumis aux mécanismes internationaux et régionaux des droits de l’homme, de nouer un dialogue avec ces mécanismes et de coordonner et de suivre l’exécution des obligations conventionnelles et la mise en œuvre des recommandations et des décisions émanant desdits mécanismes. Le Comité souligne que cette structure devrait bénéficier de l’appui permanent de personnes travaillant exclusivement pour elle et pouvoir consulter systématiquement le Bureau du Commissaire à l’enfance et la société civile.

C.Prochain rapport

53. Le Comité invite l’État partie à soumettre son septième rapport périodique le 29 octobre 2024 au plus tard et à y  faire figurer des renseignements sur la suite donnée aux présentes observations finales. Ce rapport devrait être conforme aux directives spécifiques à l’instrument (CRC/C /58/Rev.3) que le Comité a adoptées le 31 janvier 2014, et ne pas dépasser 21 200 mots (voir la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, par.  16). Si l’État partie soumet un rapport dont le nombre de mots excède la limite fixée, il sera invité à en réduire la longueur de manière à se conformer à la résolution susmentionnée. S’il n’est pas en mesure de remanier son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de ce rapport aux fins d’examen par le Comité ne pourra être garantie.

54. Le Comité invite en outre l’État partie à soumettre un document de base actualisé qui ne dépasse pas 42 400 mots et est conforme aux prescriptions applicables aux documents de base figurant dans les directives harmonisées concernant l’établissement des rapports destinés aux organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (voir HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I) et au paragraphe 16 de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale.