Nations Unies

E/C.12/NOR/CO/6

Conseil économique et social

Distr. générale

2 avril 2020

Français

Original : anglais

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Observations finales concernant le sixième rapport périodique de la Norvège *

1.Le Comité a examiné le sixième rapport périodique de la Norvège (E/C.12/NOR/6) à ses 14e et 15e séances (voir E/C.12/2020/SR.14 et 15), les 25 et 26 février 2020, et adopté les présentes observations finales à sa 30e séance, le 6 mars 2020.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le sixième rapport périodique de l’État partie, soumis selon la procédure simplifiée en réponse à la liste de points établie avant la soumission du rapport conformément à cette procédure (E/C.12/NOR/QPR/6). Il sait gré à l’État partie d’avoir accepté la procédure simplifiée, qui permet d’améliorer la collaboration et de mieux cibler le dialogue entre l’État partie et le Comité. En outre, il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation interministérielle de l’État partie.

B.Aspects positifs

3.Le Comité constate avec satisfaction que l’État partie continue de consacrer 1 % de son revenu national brut à l’aide publique au développement. Il se félicite aussi de l’adoption de la loi sur l’égalité et la lutte contre la discrimination et du plan de lutte contre le racisme et la discrimination fondée sur l’appartenance ethnique et religieuse, conformément à la recommandation qu’il a formulée lors du précédent cycle d’examen, ainsi que des mesures prises par l’État partie dans les domaines liés aux droits consacrés par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, comme indiqué ci-après.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Application du Pacte au niveau national

4.Le Comité accueille avec satisfaction l’introduction, en 2014, d’un chapitre consacré aux droits de l’homme dans la Constitution et prend note de l’explication fournie par la délégation, qui a indiqué que le Parlement avait décidé de ne consacrer dans la Constitution que les obligations en matière de droits de l’homme les plus fondamentales de la Norvège et que le Pacte n’avait pas le même statut que la Constitution, mais primait les autres lois norvégiennes en cas de conflit. Il constate avec préoccupation que les droits consacrés par le Pacte n’ont pas été pleinement pris en compte dans la Constitution et qu’ils ne sont pas considérés comme des droits fondamentaux pleinement opposables, ce qui a empêché l’État partie de ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte. Il est aussi préoccupé par le fait que les professionnels du droit ne sont pas formés aux dispositions du Pacte. Il est en outre préoccupé, malgré l’explication fournie par l’État partie, par la révision des instructions relatives à l’élaboration des mesures du Gouvernement central (utredningsinstruks), qui a supprimé l’obligation expresse d’évaluer, au cours de l’élaboration des lois et des politiques, les effets de ces mesures sur les obligations qui incombent à la Norvège en matière de droits de l’homme.

5. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’incorporer pleinement les droits consacrés par le Pacte dans son ordre juridique interne, à un niveau constitutionnel équivalent à celui des droits civils et politiques ;

b) D’améliorer la formation des juges, des avocats et des fonctionnaires aux dispositions du Pacte et à l’opposabilité des droits qui y sont énoncés ;

c) De ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ;

d) De renforcer les études d’impact sur les droits de l’homme réalisées dans le cadre de l’élaboration des lois et des politiques.

Obligations extraterritoriales au titre du Pacte

6.Le Comité note que le Fonds de pension global du Gouvernement est le plus grand fonds souverain au monde et que le Conseil d’éthique a été créé afin de surveiller le portefeuille du Fonds conformément aux directives éthiques sur la mise en observation et l’exclusion d’entreprises bénéficiant des investissements du Fonds, qui sont en cours de révision. Il est toutefois préoccupé par le fait que le portefeuille d’investissement du Fonds comprend des titres de sociétés dont les activités ont des incidences sur les droits de l’homme, car il a été découvert qu’elles participaient à la démolition de maisons, au développement des implantations israéliennes ou à d’autres activités menées dans le Territoire palestinien occupé. Il s’inquiète également de ce que tous les investissements du Fonds ne font pas l’objet d’une évaluation éthique par le Conseil d’éthique.

7.Le Comité recommande à l’État partie de revoir les investissements que le Fonds de pension global du Gouvernement fait dans des entreprises menant des activités dans le Territoire palestinien occupé, compte tenu des obligations qui lui incombent en vertu de l’avis consultatif rendu le 9 juillet 2004 par la Cour internationale de Justice sur les conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le Territoire palestinien occupé. Il recommande également à l’État partie de veiller à ce que les directives éthiques sur la mise en observation et l’exclusion d’entreprises bénéficiant des investissements du Fonds soient conformes à ses obligations territoriales et extraterritoriales en vertu du Pacte, comme indiqué aux paragraphes 25 à 37 de l’observation générale n o 24 (2017) du Comité sur les obligations des États en vertu du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels dans le contexte des activités des entreprises. Il lui recommande en outre de veiller à ce que le Conseil d’éthique continue de mener une évaluation éthique rigoureuse.

Entreprises et droits de l’homme

8.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption d’un plan d’action national pour la mise en œuvre des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme : mise en œuvre du cadre de référence « protéger, respecter et réparer » des Nations Unies. Il est néanmoins préoccupé par le fait que le plan n’est pas suffisamment mis en œuvre. Il prend note du projet de loi élaboré par le Comité d’information éthique du Gouvernement pour promouvoir le respect des droits de l’homme dans les opérations commerciales et les chaînes d’approvisionnement, mais est préoccupé par le fait que les entreprises domiciliées sur le territoire de l’État partie ou relevant de sa juridiction n’évaluent pas suffisamment les risques que font peser sur les droits de l’homme les activités qu’elles mènent à l’étranger et que l’État partie manque de capacité lorsqu’il s’agit d’évaluer les risques pour les droits de l’homme qui existent dans les pays d’accueil des entreprises. Il est en outre préoccupé par le fait que les non-nationaux qui s’estiment victimes de violations commises à l’étranger par des entreprises norvégiennes rencontrent des difficultés lorsqu’ils essayent d’accéder à des voies de recours dans l’État partie.

9.Le Comité recommande à l’État partie de mettre pleinement en œuvre le plan d’action national pour la mise en œuvre des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme et d’en améliorer l’efficacité, notamment en fixant des objectifs mesurables et des délais concrets. Il recommande également à l’État partie de veiller à ce que les entreprises évaluent comme il se doit les risques que les activités qu’elles mènent à l’étranger font peser sur les droits de l’homme et de renforcer sa capacité, notamment par l’intermédiaire de ses ambassades, à évaluer les risques pour les droits de l’homme qui existent dans les pays d’accueil de ces entreprises. Il lui recommande en outre d’adopter un cadre législatif qui impose aux entreprises d’exercer une diligence raisonnable en matière de droits de l’homme, qui permette de demander des comptes aux entreprises relevant de sa juridiction à raison de violations des droits économiques, sociaux et culturels et qui donne aux non ‑ nationaux victimes de telles violations un accès à des voies de recours dans l’État partie.

Changements climatiques

10.Le Comité prend note de la contribution de l’État partie au Fonds vert pour le climat et des efforts qu’il déploie pour réaliser ses objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030, mais est préoccupé par les licences que l’État partie a délivrées ces dernières années pour l’exploration et l’exploitation de réserves de pétrole et de gaz naturel dans l’océan Arctique et la mer de Barents et par l’impact que ces activités ont sur le réchauffement climatique (art. 2, par. 1).

11.Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour atteindre la contribution déterminée au niveau national au titre de l’Accord de Paris, à savoir réduire, d’ici à 2030, les émissions des gaz à effet de serre d’au moins 50 %, voire jusqu’à 55%, par rapport aux niveaux de 1990, et de promouvoir les énergies de substitution et les énergies renouvelables. Il lui recommande également de reconsidérer sa décision d’accroître l’exploitation du pétrole et du gaz naturel et de faire de ses obligations en matière de droits de l’homme une considération primordiale dans ses politiques d’exploitation et d’exportation des ressources naturelles.

Collecte de données

12.Le Comité est préoccupé par l’absence de données ventilées par origine ethnique ou autochtone dans l’État partie, raison pour laquelle il est difficile d’évaluer dans quelle mesure les Sâmes et les personnes appartenant à des groupes ethniques minoritaires jouissent des droits consacrés par le Pacte.

13. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ améliorer le système de collecte de données afin de recueillir des données ventilées par origine ethnique ou autochtone en vue de suivre les progrès accomplis dans la ré alisation des droits consacrés par le Pacte et d ’ élaborer des mesures efficaces et ciblées pour progresser vers la pleine jouissance par les Sâmes et les personnes appartenant à des groupes ethniques minoritaires des droits consacrés par le Pacte.

Aide juridictionnelle

14.Le Comité note que le système d’aide juridictionnelle fait l’objet d’un examen, mais est préoccupé par le fait que les personnes défavorisées ont un accès limité aux voies de recours lorsqu’elles sont victimes de violations des droits qu’elles tiennent du Pacte en raison de la portée limitée de l’aide juridictionnelle gratuite et des exigences financières irréalistes du système d’aide juridictionnelle soumise à conditions de ressources, qui n’a pas été adapté depuis 2009.

15. Le Comité recommande à l’État partie de réformer le système d’aide juridictionnelle en tenant compte des résultats de l’examen une fois celui-ci publié afin de garantir que l’aide juridictionnelle gratuite soit accessible à toutes les personnes défavorisées et marginalisées.

Loi sur l’égalité et la lutte contre la discrimination

16.Le Comité note que l’article 26 de la loi sur l’égalité et la lutte contre la discrimination dispose que les employeurs des secteurs public et privé sont tenus de prendre des mesures pour promouvoir l’égalité et prévenir la discrimination et que le paragraphe a) de l’article 26, prévoyant l’obligation de faire rapport sur les activités menées au titre dudit article, s’applique aux entreprises privées qui emploient normalement entre 20 et 50 personnes, à la demande des employés ou de leurs représentants. Il est toutefois préoccupé par l’efficacité de cette disposition, car les employeurs privés ayant moins de 50 salariés, qui représentent plus de 97 % des employeurs privés, sont exemptés, totalement ou sous certaines conditions, de cette obligation de rendre compte des mesures prises. Il est également préoccupé par les informations selon lesquelles les obligations faites aux employeurs de prendre des mesures et d’en rendre compte sont peu respectées (art. 2, par. 2).

17. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures efficaces pour garantir que tous les employeurs des secteurs public et privé respectent pleinement l’obligation de prendre des mesures pour promouvoir l’égalité et prévenir la discrimination, comme le prévoit l’article 26 de la loi sur l’égalité et la lutte contre la discrimination. Il lui recommande également de veiller au plein respect des obligations de prendre des mesures et d’en rendre compte, notamment en renforçant les sanctions encourues en cas de non-respect.

Personnes handicapées

18.Le Comité prend note de l’adoption de l’Initiative nationale pour l’inclusion (2018‑2021), mais est préoccupé par le nombre élevé de personnes handicapées qui sont au chômage ou sont exclues du marché du travail. Il est également préoccupé par les informations selon lesquelles un grand nombre de personnes présentant un handicap visuel ont démissionné de leur emploi ou envisagent de le faire en raison des obstacles technologiques qu’ils rencontrent au travail. Il est en outre préoccupé par le fait que, bien que l’obligation de conception universelle prévue par l’article 17 de la loi sur l’égalité et la lutte contre la discrimination soit imposée aux entreprises publiques et privées lorsqu’elles fournissent des services au public, elle ne s’applique pas à l’organisation du travail sur le lieu de travail (art. 2 (par. 2) 6 et 15).

19.Le Comité recommande à l’État partie de mettre pleinement en œuvre l’Initiative nationale pour l’inclusion et de prendre des mesures adaptées aux besoins spécifiques des personnes handicapées en ce qui concerne l’accès à l’emploi. Il lui recommande également de réviser l’article 17 de la loi sur l’égalité et la lutte contre la discrimination en vue d’étendre l’obligation de conception universelle au lieu de travail et d ’ appliquer, sur les lieux de travail, le principe de conception universelle aux technologies de l ’ information et de la communication, y compris aux logiciels.

Personnes issues de l’immigration

20.Le Comité est préoccupé par le fait que les personnes issues de l’immigration continuent d’être victimes de discrimination dans l’exercice des droits qu’elles tiennent du Pacte. Il est particulièrement préoccupé par le fait que le taux de chômage parmi ces personnes est trois fois plus élevé que dans le reste de la population et qu’elles occupent principalement des emplois mal rémunérés. Il est également préoccupé par l’absence de mesures spéciales visant à améliorer leur situation professionnelle. Il est en outre préoccupé par le fait que ces personnes continuent de faire l’objet de discrimination sur le marché du logement et qu’elles sont donc majoritaires parmi les « personnes défavorisées sur le marché du logement » (art. 2 (par. 2), 6 et 11).

21. Le Comité recommande à l’État partie de mettre pleinement en œuvre le plan de lutte contre le racisme et la discrimination fondée sur l’appartenance ethnique et religieuse, en consultation avec les personnes issues de l’immigration et avec la participation de celles-ci. En particulier, il lui recommande :

a) De renforcer, à l’intention de ces personnes, l’enseignement et la formation professionnels et la formation linguistique ainsi que les services relatifs à l’emploi ;

b) De veiller à ce que l’éducation et les qualifications professionnelles de ces personnes ainsi que l’expérience professionnelle qu’elles ont acquise à l’étranger soient dûment reconnues ;

c) De prendre des mesures spéciales pour promouvoir l’emploi des personnes issues de l’immigration ;

d) De prendre des mesures ciblées pour lutter contre la discrimination dont elles sont victimes dans l’accès au logement ;

e) De supprimer les obstacles linguistiques et culturels qui entravent leur accès aux services publics et sociaux.

Égalité entre les hommes et les femmes

22.Le Comité note que le congé parental peut désormais être pris par la mère, le père ou les deux parents à parts égales, mais est préoccupé par le fait que les pères n’ont utilisé que 25,6 % du congé parental qui leur était réservé en 2019, alors que cela représente une augmentation de 20 % par rapport 2018. Il est également préoccupé par la persistance de l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes, qui s’élevait à 12,4 % en 2019 (art. 3, 7 et 10).

23. Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour que les parents prennent tous les jours de congé parental qui leur sont réservés afin d’assurer une répartition équitable des soins et des travaux domestiques entre les hommes et les femmes. Il lui recommande également de redoubler d’efforts pour réduire l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes.

Sécurité et santé au travail

24.Le Comité note que les accidents du travail, notamment les accidents mortels, ont diminué ces dernières années, mais reste préoccupé par le nombre élevé d’accidents du travail et la concentration d’accidents mortels sur le lieu de travail dans les secteurs de la construction, du transport et du stockage, de l’agriculture et de l’industrie manufacturière, alors même que la proportion de la main-d’œuvre dans ces secteurs est très faible. Il également préoccupé par l’absence de données officielles sur les maladies professionnelles (art. 7 et 12).

25. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour réduire le nombre d’accidents du travail, y compris les accidents mortels, en mettant l’accent sur les secteurs où se produisent le plus d’accidents, notamment en sensibilisant les employeurs et les travailleurs à la sécurité sur le lieu de travail, en veillant à ce que des mesures de protection accrue soient mises en place sur le lieu de travail et en renforçant les contrôles effectués par l’inspection du travail. Il lui recommande également d’adopter un cadre de politique générale sur la sécurité et la santé au travail et de mettre en place un système complet de collecte de données.

Droit à la sécurité sociale

26.Le Comité prend note de l’instauration, dans le cadre de la réforme des retraites menée en 2011, d’un départ à la retraite flexible entre 62 et 75 ans, ce qui permet aux retraités de combiner travail et retraite et de continuer à accumuler leurs points de pension. Il reste toutefois préoccupé, malgré l’explication fournie par l’État partie, par l’effet discriminatoire que cette mesure a sur les personnes handicapées, qui ne peuvent d’office pas accumuler de points de pension à partir de 62 ans, car elles ne sont transférées au régime de retraite qu’à l’âge de 67 ans. En raison de cela, les retraités handicapés touchent environ 10 % de prestations de vieillesse en moins que les retraités non handicapés (art. 2 (par. 2) et 9).

27. Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour éliminer l’effet discriminatoire que le régime de retraite a sur les personnes handicapées.

Enfants demandeurs d’asile non accompagnés

28.Le Comité note que la loi sur la protection de l’enfance s’applique à tous les enfants de l’État partie, quels que soient leur origine ethnique et leur statut de résidence, mais il est préoccupé par le fait que les enfants demandeurs d’asile non accompagnés âgés de 15 à 18 ans sont exclus de l’application de cette loi. En raison de cette exclusion, ils sont contraints de vivre dans des centres d’accueil, où les conditions laissent à désirer. Le Comité est également préoccupé par le taux élevé de maladies mentales parmi les enfants demandeurs d’asile non accompagnés vivant dans des centres d’accueil et par leur accès limité aux soins de santé mentale (art. 2 (par. 2), 10 et 12).

29. Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que la loi sur la protection de l’enfance s’applique à tous les enfants demandeurs d’asile non accompagnés, quel que soit leur âge, afin que le même niveau de protection et de services soit offert à tous les enfants de l’État partie. Il lui recommande également de veiller à ce que les enfants demandeurs d’asile non accompagnés ayant des problèmes de santé mentale soient repérés rapidement et à ce que les soins de santé mentale dont ils ont besoin leur soient fournis.

Enfants placés en famille d’accueil

30.Le Comité est préoccupé par le fait qu’un certain nombre d’enfants continuent d’être retirés de la garde de leurs parents pour être placés dans des familles d’accueil ou des institutions et que beaucoup d’entre eux ont de graves problèmes de santé mentale. Il est également préoccupé par le fait que les enfants issus de minorités placés dans des familles d’accueil ou des institutions se heurtent à des difficultés supplémentaires en raison des différences culturelles, linguistiques et religieuses (art. 2 (par. 2) et 10).

31. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour :

a) Déterminer les causes profondes des situations qui ont conduit au retrait d’enfants de la garde de leurs parents et y remédier ;

b) Veiller à ce que le retrait des enfants de la garde de leurs parents constitue une mesure de dernier ressort ;

c) Renforcer les examens périodiques complets de la situation des enfants placés dans des foyers d’accueil ou des institutions ;

d) Fournir aux parents l’aide et l’appui dont ils ont besoin afin d’exercer leur rôle et leurs responsabilités parentales pour ce qui est d’élever et d’éduquer leurs enfants ;

e) Doter les municipalités de ressources et d’un appui suffisants afin qu’elles puissent mener efficacement un travail de prévention dans les familles à risque et un travail de suivi des enfants placés dans des familles d’accueil ou des foyers ;

f) Veiller à ce que les enfants ayant des problèmes mentaux soient repérés rapidement et leur fournir les services dont ils ont besoin ;

g) Renforcer la formation des aidants afin qu’ils puissent s’occuper d’enfants issus de milieux culturels, linguistiques et religieux différents.

Pauvreté

32.Le Comité est préoccupé par l’augmentation continue du taux de pauvreté, en particulier parmi les enfants, en raison des inégalités croissantes de revenus. Il est notamment préoccupé par l’augmentation constante du taux de pauvreté des enfants au cours de la dernière décennie, malgré les mesures prises par l’État partie dans le cadre de la stratégie gouvernementale en faveur des enfants vivant dans la pauvreté (2015-2017) et l’augmentation des fonds alloués à cette fin (art. 11).

33. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures efficaces pour réduire les inégalités de revenus et de redoubler d’efforts pour éradiquer la pauvreté, en particulier celle touchant les enfants, sur le territoire national. En particulier, il lui recommande d’évaluer l’efficacité des politiques et programmes existants et de déterminer les causes profondes de la pauvreté touchant les enfants et les besoins des enfants vivant dans la pauvreté et de leur famille en vue de prendre des mesures efficaces pour lutter contre la pauvreté touchant les enfants et de fournir un soutien adéquat aux enfants et à leur famille vivant dans la pauvreté.

Droit au logement

34.Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie, notamment la stratégie nationale en matière de logement et d’aides (2014-2020), mais est préoccupé par les difficultés que rencontrent en permanence les personnes et les groupes défavorisés lorsqu’ils essaient d’accéder à un logement. Il est particulièrement préoccupé par :

a)La pénurie chronique de logements sociaux dans de nombreuses municipalités ;

b)Le manque de logements accessibles aux personnes handicapées ;

c)Les prix élevés des logements locatifs privés, qui sont souvent de piètre qualité, ainsi que les conditions de bail imprévisibles et la résiliation arbitraire des contrats ;

d)Le nombre élevé de sans-abri de longue durée (art. 11).

35. Le Comité recommande à l’État partie de mettre pleinement en œuvre la stratégie nationale en matière de logement et d ’ aides et d’en évaluer l’efficacité en vue de la réformer pour mieux répondre aux besoins de logement des personnes et des familles défavorisées et marginalisées. En particulier, il recommande à l’État partie :

a) D’améliorer la disponibilité et l’offre de logements sociaux municipaux à coût modéré au bénéfice des personnes et des groupes défavorisés et marginalisés ;

b) D’accroître l’offre de logements accessibles aux personnes handicapées, y compris de logements sociaux ;

c) D’accroître l’offre de logements à loyer abordable et de réglementer le marché privé du logement locatif, notamment en contrôlant l’augmentation des loyers, en renforçant les normes minimales de qualité des logements locatifs et en protégeant les locataires contre les conditions de bail illégales et la résiliation arbitraire de contrats ;

d) De renforcer les mesures visant à réduire le sans-abrisme, notamment les mesures visant spécifiquement à lutter contre le sans-abrisme à long terme.

Personnes âgées

36.Le Comité est préoccupé par les informations faisant état du nombre élevé d’actes de violence et de mauvais traitements dont sont victimes des personnes âgées vivant dans un cadre familial ou institutionnel. Il est également préoccupé par le fait qu’un tiers des personnes âgées placées dans les hôpitaux et les services de santé des municipalités souffrent de malnutrition ou risquent d’en souffrir (art. 11).

37.Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour prévenir les actes de violence et les mauvais traitements dont sont victimes des personnes âgées, notamment en déterminant les causes profondes de cette maltraitance, en remédiant à cette situation et en renforçant le système de signalement, et de mener des enquêtes approfondies sur les cas signalés. Il demande instamment à l’État partie de prendre immédiatement des mesures pour lutter contre la malnutrition aiguë des personnes âgées placées dans des établissements de santé, en étroite collaboration avec les municipalités. Il lui recommande de mettre pleinement en œuvre une stratégie nationale pour une alimentation saine des personnes âgées placées en institution et de celles vivant à domicile, et, une fois cette stratégie officiellement adoptée, d’allouer les ressources financières nécessaires à sa mise en œuvre.

Accès aux services de santé

38.Compte tenu de la baisse significative, ces dernières années, du nombre de personnes demandant l’asile dans l’État partie et de la vigueur continue de l’économie nationale, le Comité est préoccupé par le fait que l’État partie maintient les mesures régressives qu’il a prises en 2011 pour restreindre le droit aux soins de santé primaires des migrants en situation irrégulière, y compris des citoyens de l’Union européenne qui n’ont pas de carte européenne d’assurance maladie, sans évaluer l’impact de ces mesures sur les personnes concernées. Il est particulièrement préoccupé par la portée limitée des conditions dans lesquelles les soins de santé sont fournis aux migrants en situation irrégulière et par l’absence de lignes directrices claires concernant l’interprétation de ces conditions, ce qui a entraîné une grave détérioration de l’état de santé de migrants en situation irrégulière souffrant de maladies chroniques ou leur mort ainsi qu’à un manque d’uniformité et à des inégalités dans les services de santé qui leur sont fournis. Il est également préoccupé par le fait que les enfants migrants en situation irrégulière n’ont pas le droit d’être inscrits sur les listes de patients des médecins généralistes, ce qui les empêche, dans la pratique, d’accéder en temps voulu aux services de soins de santé adéquats auxquels tous les enfants de l’État partie ont droit (art. 2 (par. 1 et 2) et 12).

39.Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures effectives pour faire en sorte que toutes les personnes se trouvant sur son territoire aient accès aux services de soins de santé primaires, quel que soit leur statut de résidence. En particulier, il lui recommande de retirer les mesures régressives prises en 2011 en ce qui concerne le droit des migrants en situation irrégulière aux services de soins de santé primaires et d’autoriser les médecins généralistes à inscrire ces migrants et leurs enfants sur leurs listes de patients. Il attire l’attention de l’État partie sur sa déclaration du 13 mars 2017 concernant les devoirs des États envers les réfugiés et les migrants au titre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/2017/1).

Santé mentale

40.Le Comité est préoccupé par la forte proportion de personnes ayant des problèmes mentaux dans la population carcérale et par l’accès limité de ces personnes à des soins adaptés. Il est particulièrement préoccupé par le recours fréquent à la thérapie électroconvulsive, qui ne repose sur aucune base légale, sans le consentement des patients, et à d’autres mesures coercitives telles que les moyens de contention et les traitements médicaux forcés, souvent pendant la ségrégation, dans des institutions psychiatriques et des maisons de retraite. Il est également préoccupé par le fait que le recours à ces mesures n’est pas systématiquement consigné alors que la loi l’impose (art. 12).

41. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De veiller à ce que les détenus ayant des problèmes mentaux reçoivent des soins adaptés, notamment en les transférant dans un établissement médical approprié ;

b) De veiller à ce que le traitement repose sur le consentement libre et éclairé de l’intéressé ou de son représentant légal ;

c) D’introduire dans la loi une disposition prévoyant l’interdiction de l’utilisation de l’administration forcée de traitements intrusifs ayant des effets irréversibles, tels que les médicaments neuroleptiques et la thérapie électroconvulsive ;

d) D’imposer des exigences procédurales plus strictes au recours aux mesures coercitives afin de garantir que les personnes présentant un handicap psychosocial et les personnes âgées placées en institution bénéficient d’une protection juridique adéquate contre le recours à de telles mesures ;

e) D’accroître la disponibilité des services de proximité fondés notamment sur le soutien par les pairs et d’autres solutions que la prise en charge médicale pour les personnes présentant un handicap psychosocial ;

f) De faire en sorte que le recours aux mesures coercitives soit systématiquement consigné, conformément aux modalités prévues par la loi.

Consommation de drogues

42.Le Comité prend note du fait qu’un comité d’experts a examiné la politique actuelle relative aux drogues et a présenté en décembre 2019 un rapport contenant des propositions de réforme politique, mais est préoccupé de ce que l’État partie continue d’ériger la consommation de drogues en infraction pénale, ce qui empêche les consommateurs de drogues d’accéder aux programmes de réduction des risques et aux services de santé (art. 12).

43. Le Comité recommande à l’État partie de dépénaliser la consommation de drogues et d’améliorer la disponibilité, l’accessibilité et la qualité des programmes de réduction des risques et des soins de santé spécialisés fournis aux consommateurs de drogues.

Droit à l’éducation

44.Le Comité constate avec préoccupation ce qui suit :

a)Les disparités régionales persistent dans la qualité de l’enseignement et les résultats scolaires, les régions septentrionales et éloignées étant les plus défavorisées ;

b)Les enfants demandeurs d’asile qui vivent dans des centres d’accueil n’ont pas droit à un enseignement préscolaire ;

c)Chez les enfants roms, le taux d’abandon scolaire reste élevé et les taux de réussite scolaire sont faibles ;

d)Le taux d’abandon scolaire dans l’enseignement secondaire supérieur est élevé parmi les garçons nés à l’étranger ;

e)Les enseignants manquent souvent de compétences et d’outils adéquats pour répondre aux besoins d’une population scolaire de plus en plus diversifiée (art. 13 à 15).

45. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’accroître les ressources allouées à l’amélioration de la qualité de l’éducation dans les régions septentrionales et éloignées de l’État partie en vue d’éradiquer les disparités régionales persistantes ;

b) D’étendre le droit à l’éducation préscolaire aux enfants demandeurs d’asile vivant dans des centres d’accueil ;

c) De prendre des mesures ciblées pour améliorer la fréquentation scolaire et le niveau d’instruction des enfants roms, notamment en mettant en œuvre des programmes efficaces tels que le programme « Guides pour les Roms » de la ville d’Oslo ;

d) D’offrir aux élèves nés à l’étranger un soutien adapté à leurs besoins spécifiques afin qu’ils puissent achever des études secondaires de deuxième cycle ;

e) De fournir aux enseignants une formation et des outils adéquats qui leur permettent de gérer avec confiance une population scolaire de plus en plus diversifiée.

Droits culturels

46.Le Comité prend note des diverses mesures prises par l’État partie pour protéger et préserver les langues et le patrimoine culturel des Sâmes. Il reste toutefois préoccupé par le fait que le droit des enfants sâmes à l’enseignement en langues sâmes n’est pas pleinement garanti dans la pratique. Il est également préoccupé par les informations communiquées par le Parlement sâme, qui a indiqué que les musées où sont conservés les objets culturels sâmes ont reçu beaucoup moins de soutien du Gouvernement que ceux où sont conservés d’autres objets culturels norvégiens et que le nombre de musées exposant des objets culturels sâmes était insuffisant (art. 13 à 15).

47. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour que tous les enfants sâmes, qu’ils vivent dans des districts sâmes ou ailleurs, jouissent pleinement de leur droit à l’éducation dans les langues sâmes, et d’allouer des ressources suffisantes, notamment financières et techniques, à la préservation et à l’exposition des objets culturels sâmes.

D.Autres recommandations

48.Le Comité recommande à l’État partie de tenir pleinement compte des obligations que lui impose le Pacte et de garantir le plein exercice des droits qui y sont consacrés dans la mise en œuvre au niveau national du Programme de développement durable à l’horizon 2030. La réalisation des objectifs de développement durable serait sensiblement facilitée si l’État partie établissait des mécanismes indépendants pour le suivi des progrès et considérait les bénéficiaires des programmes publics comme les titulaires de droits qu’ils peuvent faire valoir. Appliquer les objectifs d’après les principes de participation, de responsabilité et de non-discrimination permettrait de faire en sorte que nul ne soit laissé de côté. À cet égard, le Comité appelle l’attention de l’État partie sur la déclaration relative à l’engagement qu’il a pris de ne laisser personne de côté (E/C.12/2019/1).

49.Le Comité prie l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales à tous les niveaux de la société, y compris aux échelons national, provincial et municipal, en particulier auprès des parlementaires, des fonctionnaires et des autorités judiciaires, et de l’informer dans son prochain rapport périodique des dispositions qu’il aura prises pour y donner suite. Il l’encourage à associer l’institution nationale norvégienne des droits de l’homme, les organisations non gouvernementales et d’autres membres de la société civile au suivi des présentes observations finales et au processus de consultation nationale avant la soumission de son prochain rapport périodique. En outre, il lui recommande d’envisager la création d’un mécanisme national chargé de coordonner la mise en œuvre et d’en assurer le suivi en continu, avec la participation de l’institution nationale norvégienne des droits de l’homme et des organisations de la société civile.

50. Conformément à sa procédure de suivi, le Comité demande à l’État partie de fournir, dans les vingt-quatre mois suivant l’adoption des présentes observations finales, des informations sur la suite donnée aux recommandations faites aux paragraphes 29 (enfants demandeurs d’asile non accompagnés), 37 (personnes âgées) et 39 (accès aux services de santé) ci-dessus.

51. Le Comité prie l ’ État partie de lui soumettre, le 31 mars 2025 au plus tard, son septième rapport périodique. À cette fin, et compte tenu du fait que l ’ État partie a accepté d ’ établir son rapport selon la procédure simplifiée, le Comité lui adressera en temps voulu une liste préalable de points à traiter. Les réponses de l ’ État partie à cette liste constitueront son septième rapport périodique à soumettre en application de l ’ article 16 du Pacte. Le Comité invite aussi l ’ État partie à mettre à jour son document de base commun conformément aux directives harmonisées pour l ’ établissement des rapports à présenter en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme (voir HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I).