Nations Unies

E/C.12/63/D/10/2015

Conseil économique et social

Distr. générale

14 novembre 2018

Français

Original : espagnol

Co mité des droits économiques, sociaux et culturels

Décision adoptée par le Comité en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte, concernant la communication no 10/2015 *

Communication présentée par :

Marcia Cecilia Trujillo Calero (représentée par les conseils Ramiro Rivadeneira Silva, Patricio Benalcázar Alarcón, José Luis Guerra Mayorga et Rodrigo Varela Torres, du Bureau du Défenseur du peuple de l’Équateur)

Au nom de :

L’auteure

État partie :

Équateur

Date de la communication :

17 juillet 2015

Date de la présente décision :

26 mars 2018

Objet :

Refus d’accorder une retraite spéciale réduite

Questions de procédure :

Compétence ratione temporis du Comité ; compétence ratione materiae du Comité ; griefs insuffisamment étayés

Questions de fond :

Droit à la sécurité sociale ; exercice des droits énoncés dans le Pacte sans discrimination ; droit égal des hommes et des femmes au bénéfice de tous les droits énoncés dans le Pacte

Article(s) du Pacte :

2, par.2 ; 3 ; 9

Article(s) du Protocole facultatif :

3, par. 2, al. b), d) et e)

1.1L’auteure de la communication est Marcia Cecilia Trujillo Calero, de nationalité équatorienne, née le 10 avril 1952. Elle affirme être victime d’une violation par l’État partie des droits qu’elle tient de l’article 9 du Pacte. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l’État partie le 5 mai 2013. Elle est représentée par le Bureau du Défenseur du peuple.

1.2Dans la présente décision, le Comité commence par résumer les renseignements fournis et les arguments avancés par les parties et le troisième intervenant (par. 2.1 à 8.2 infra), sans indiquer sa propre position, puis il examine les questions de recevabilité et de fond soulevées dans la communication, avant de formuler ses conclusions et recommandations.

A.Résumé des renseignements fournis et des arguments avancés par les parties

Rappel des faits présentés par l’auteure

2.1L’auteure s’est affiliée à titre volontaire au système de sécurité sociale étant donné qu’elle exerçait une activité non rémunérée (dite de « femme au foyer »), qui consistait à s’acquitter des tâches ménagères et à s’occuper de ses trois enfants âgés de 7, 9 et 11 ans. En tant qu’affiliée volontaire à l’Institut équatorien de sécurité sociale (IESS), elle a versé des cotisations mensuelles même si elle n’avait pas de relation de travail avec un employeur, à compter de novembre 1981, sauf pendant huit mois consécutifs en 1989-1990, où elle n’a effectué aucun versement. Ces cotisations ont été réglées en avril 1990. L’auteure a continué d’effectuer des cotisations mensuelles en tant qu’affiliée volontaire jusqu’en février 1995, où elle a commencé à exercer un emploi, passant donc au régime des travailleurs salariés. Elle affirme qu’en 2001, elle a consulté à plusieurs reprises l’IESS pour savoir si elle pouvait prendre sa retraite dans le cadre du régime spécial de retraite réduite (retraite spéciale anticipée) et les fonctionnaires lui ont à chaque fois répondu oralement que c’était possible étant donné qu’elle répondait aux conditions qui étaient d’avoir versé plus de trois cents mois de cotisation et d’avoir plus de 45 ans, et qu’elle devait simplement démissionner de son emploi pour prendre sa retraite. Sur la foi de ces renseignements, en 2001, l’auteure a démissionné de son emploi et présenté une demande de retraite spéciale à l’IESS.

2.2Le 13 septembre 2002, la Commission régionale 1 des prestations de l’IESS a déclaré que l’affiliation volontaire de l’auteure était nulle à compter d’août 1989, conformément à l’article 158 des statuts codifiés de l’IESS, selon lequel ce type d’affiliation prend fin si l’assuré n’effectue pas de cotisations pendant six mois consécutifs. Le 6 mars 2003, la Commission nationale d’appel de l’IESS, statuant en appel, a confirmé la décision. L’auteure affirme qu’elle n’a eu connaissance d’aucune de ces décisions avant que la Commission elle-même lui notifie sa décision du 21 juin 2007.

2.3Le 20 juin 2003, la demande de retraite de l’auteure a été rejetée par la Commission régionale1, qui n’avait comptabilisé que 238 cotisations mensuelles entre 1972 et 2001 alors qu’il en fallait au moins 300. L’IESS a noté que les cotisations qu’elle avait versées entre août 1989 et février 1995 n’étaient pas valables. L’auteure affirme avoir pris connaissance de cette décision le 10 mai 2007.

2.4Le 21 juin 2007, la Commission d’appel de l’IESS a débouté l’auteure de son appel, estimant qu’elle ne satisfaisait pas aux conditions énoncées à l’article 121 des statuts codifiés de l’IESS et à l’article 2 de l’arrêté C.I. 137, donnant droit à une retraite spéciale réduite. La Commission s’est référée à sa décision du 6 mars 2003 dans laquelle elle avait déclaré que l’affiliation volontaire de l’auteure était nulle depuis août 1989 et a donc considéré que seules 238 cotisations mensuelles avaient été créditées.

2.5Le 31 août 2007, l’auteure a porté plainte devant le tribunal du contentieux administratif no 1 du district de Quito, pour demander l’annulation des décisions de la Commission régionale 1 et de la Commission d’appel de l’IESS et l’accès au régime de retraite spéciale. Elle a fait valoir, entre autres, que le rejet de sa demande de retraite était injustifié car elle n’avait jamais été informée en temps voulu que ses cotisations volontaires versées entre août 1989 et février 1995 n’étaient pas valables, et que les erreurs commises par l’IESS ne pouvaient pas lui être imputées.

2.6Le 22 septembre 2010, le tribunal no 1 a rejeté la plainte et noté que les décisions de la Commission régionale 1 et de la Commission d’appel de l’IESS n’avaient pas été contestées par l’auteure dans le délai fixé par la loi et que l’auteure avait consenti à ce que les contributions déclarées indues ne soient pas prises en compte. Il a estimé que l’auteure n’avait versé que 238 cotisations mensuelles − et non 300 − et n’avait donc pas droit à une retraite spéciale réduite.

2.7L’auteure a formé un pourvoi en cassation auprès de la Cour nationale de justice et a fait valoir, entre autres, la non-application des articles constitutionnels protégeant le droit à la sécurité sociale. Elle a fait valoir que le tribunal no 1 n’avait pas tenu compte du fait qu’en raison de la négligence de l’IESS, ce n’était qu’après sa demande de retraite que les cotisations payées hors délai et tous les paiements ultérieurs avaient été annulés.

2.8Le 17 avril 2014, la Cour nationale de justice a rejeté le pourvoi de l’auteure et relevé que la décision de la Commission d’appel de l’IESS en date du 6 mars 2003 n’avait pas été dûment notifiée à l’auteure, qui n’en avait eu connaissance que le 21 juin 2007. La Cour a estimé que l’auteure n’était pas fondée à contester les décisions de la Commission régionale 1 et de la Commission, alors qu’elle aurait dû invoquer le silence de l’administration imputable à l’IESS pour n’avoir pas dûment notifié la décision rendue par la Commission le 6 mars 2003 dans le délai légal. La Cour a conclu qu’elle ne pouvait pas examiner la légalité des versements effectués par l’auteure en tant qu’affiliée volontaire entre 1989 et 1995, car elle ne pouvait pas résoudre une question qui n’avait pas fait l’objet du litige.

2.9Par la suite, l’auteure a engagé une action extraordinaire en protection devant la Cour constitutionnelle, alléguant que la décision de la Cour nationale de justice violait les droits reconnus aux articles 66.23 (droit de porter plainte), 76.5 et 76.7 l (application d’une norme plus favorable, défense et cause légitime) de la Constitution, car elle reposait sur une appréciation erronée des éléments de preuve présentés. Le 17 juillet 2014, la Cour constitutionnelle a rejeté le recours de l’auteure au titre de l’article 62.5 de la loi organique sur les garanties juridictionnelles et le contrôle constitutionnel, estimant qu’il portait sur l’appréciation des preuves par la Cour nationale de justice.

2.10L’auteure affirme que sa communication satisfait aux conditions de recevabilité énoncées dans le Protocole facultatif. Elle fait observer que, bien que certains des faits se soient produits en 1989, ils ont eu un effet qui s’est poursuivi après l’entrée en vigueur du Protocole facultatif pour l’Équateur et que, au moment de la présentation de la communication, elle ne recevait toujours pas de pension.

Teneur de la plainte

3.1L’auteure affirme que l’État partie a violé le droit à la sécurité sociale que lui garantit l’article 9 du Pacte.

3.2L’auteure fait valoir que chacun devrait avoir accès à l’information sur les conditions d’octroi des prestations sociales et à une procédure administrative régulière. L’IESS ne l’a pas informée en 1989 que ses contributions volontaires étaient indues en raison du retard qu’elle avait accumulé dans leur versement pendant huit mois consécutifs. En outre, l’IESS a continué de percevoir ses cotisations pendant plus de cinq ans, ce qui a représenté 65 versements supplémentaires. Ce n’est qu’en 2003 que les autorités de l’IESS ont établi que ses contributions volontaires n’étaient pas valables. Toutefois, l’auteure n’a eu connaissance de cette décision qu’en mai 2007, lorsqu’elle a été informée du rejet de sa demande de retraite spéciale. Il ressort de ce qui précède que les procédures administratives n’ont été ni efficaces, ni rapides, ni utiles.

3.3L’auteure affirme qu’elle pouvait raisonnablement espérer que, dans sa vieillesse, elle recevrait une pension calculée sur la base des 305 cotisations versées pendant vingt‑neuf ans. Pendant toutes ces années, elle n’a jamais été clairement informée des conditions qu’il lui restait à remplir pour percevoir une retraite.

3.4L’auteure renvoie au paragraphe 2 de l’article 2 du Pacte et souligne que le droit à la sécurité sociale doit être garanti sans discrimination fondée sur le sexe. Elle fait valoir qu’elle appartient à une génération de femmes qui ont consacré la plus grande partie de leur vie au travail domestique non rémunéré et qui, pour exercer leur droit à la sécurité sociale, se sont heurtées à des obstacles plus importants que ceux rencontrés par les hommes.

3.5L’auteure explique que les femmes dont l’activité consistait à entretenir leur foyer et s’occuper de leurs proches n’exerçaient pas un emploi rémunéré et qu’elles avaient généralement recours à l’affiliation volontaire. Cependant, le régime volontaire présentait plusieurs limites pour les femmes effectuant des tâches domestiques non rémunérées parce qu’il était conçu pour les professionnels : entre autres conditions, l’affilié volontaire devait payer à la fois sa cotisation et la cotisation patronale, il devait avoir cotisé pendant au moins trois ans et il perdait le statut d’affilié volontaire s’il n’effectuait pas de versement pendant six mois consécutifs. Les femmes au foyer étaient donc tenues de verser des cotisations alors qu’elles ne recevaient pas de salaire, ce qui les défavorisait par rapport aux femmes actives qui touchaient généralement un revenu fixe. Dans le cas de l’auteure, comme elle n’a pas été en mesure de payer ses cotisations pendant six mois consécutifs, l’IESS a annulé plus de cinq années de cotisations. L’auteure conclut que cette règle est discriminatoire à l’égard des femmes qui exercent un travail domestique non rémunéré et contraire aux dispositions du Pacte.

3.6L’auteure fait observer que l’État partie n’a pas établi de régime non contributif pour les personnes qui ne sont pas en mesure de cotiser à la sécurité sociale, ce qui laisse les personnes âgées totalement sans protection. Elle affirme qu’elle-même, divorcée, sans emploi, vivant dans la pauvreté et souffrant de graves problèmes de santé, n’a pas reçu de pension malgré ses demandes constantes depuis plus de quatorze ans.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond

4.1Le 2 février et le 8 juin 2016, l’État partie a présenté ses observations sur la recevabilité et sur le fond de la communication. Il a fait valoir que la communication ne répondait pas aux critères de recevabilité établis dans le Protocole facultatif et, en tout état de cause, ne révélait aucune violation des droits énoncés dans le Pacte.

4.2L’État partie décrit en détail les règles juridiques qui régissaient la retraite spéciale réduite au moment des faits, ainsi que les normes juridiques et la structure institutionnelle sur lesquelles il s’appuie pour donner effet au droit à la sécurité sociale.

4.3La communication ne satisfait pas au critère de recevabilité énoncé à l’alinéa b) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif étant donné que les faits se sont produits avant le 5 mai 2013, date d’entrée en vigueur du Protocole facultatif pour l’Équateur. L’État partie relève que le principal fait constitutif d’une violation des droits de l’auteure serait la décision rendue par la Commission régionale 1 le 20 juin 2003, rejetant la demande de retraite spéciale réduite. Bien que les tribunaux aient statué sur certains des recours après cette date, leurs décisions ne sont pas en elles-mêmes de nature à avoir porté atteinte aux droits de l’auteure. L’État partie conclut donc que le Comité n’est pas compétent pour examiner la communication.

4.4La communication est manifestement dénuée de fondement et ne contient aucune information montrant que les autorités qui ont statué sur la demande de retraite spéciale de l’auteure ont délibérément agi de manière à porter atteinte à ses droits. Le désaccord de l’auteure avec les décisions des autorités, qui n’ont pas fait droit à sa demande, ne signifie pas que ses droits ont été violés et qu’elle a été victime de discrimination. En outre, l’objet de la communication est d’obtenir l’annulation des décisions administratives et judiciaires concernant l’auteure. Toutefois, le Comité ne peut pas agir comme une quatrième instance et l’auteure a eu la possibilité de contester les décisions administratives avec lesquelles elle n’était pas d’accord et les procédures se sont déroulées dans le respect de la légalité et des règles en vigueur.

4.5L’auteure met en avant le manque d’efficacité et de rapidité des procédures de l’IESS dans le but de démontrer l’existence d’une violation non pas du droit à la sécurité sociale mais du droit à une procédure régulière ; cependant, le Comité n’est pas compétent pour examiner un tel grief, étant donné que ce droit est consacré par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

4.6Dans l’éventualité où la communication serait jugée recevable, l’État partie fait valoir qu’elle ne fait apparaître aucune violation des droits de l’auteure puisque la décision qui a rejeté la demande de retraite spéciale n’était pas illégale ou arbitraire. L’auteure n’a pas versé ses cotisations mensuelles d’août 1989 à mars 1990, si bien que le 13 septembre 2002, la Commission régionale 1 a déclaré que son affiliation volontaire avait pris fin automatiquement et que les contributions versées par la suite n’étaient pas valables. Sur la base de ces décisions, la Commission et la Commission d’appel de l’IESS ont rejeté la demande de retraite spéciale de l’auteure le 20 juin 2003 et le 21 juin 2007, respectivement, au motif que l’auteure n’avait versé que 238 mensualités au 30 novembre 2001.

4.7Selon le certificat établi par l’IESS, l’auteure a cotisé à l’IESS de septembre 1972 à octobre 1981, en tant qu’employée de diverses institutions publiques et privées ; de novembre 1981 à février 1995, elle a cotisé au régime volontaire ; et de mars 1995 à novembre 2001, elle a réintégré le régime d’affiliation en tant qu’employée. Les décisions de rejet de sa demande de retraite spéciale se fondaient sur un calcul de l’ensemble de ses cotisations qui, sans compter celles qui avaient été déclarées indues ou frauduleuses, ne représentaient que 238 mensualités.

4.8Les relations entre les particuliers et l’administration publique sont régies par le principe de bonne foi et par la présomption de connaissance de la loi. L’article 158 des statuts codifiés de l’IESS dispose clairement que si un affilié est en retard dans ses versements volontaires depuis plus de six mois consécutifs, il cesse de relever du régime volontaire et ses versements ultérieurs sont donc nuls et non avenus. En outre, la décision de la Commission régionale 1 en date du 12 septembre 2002 a été dûment notifiée à l’auteure, ce qui lui a permis d’introduire un recours auprès de la Commission d’appel de l’IESS. L’État partie fait valoir que l’auteure savait que son historique de cotisation comprenait des versements déclarés indus et frauduleux, de sorte qu’elle pouvait prévoir que sa demande serait rejetée.

4.9L’auteure avait la possibilité de reprendre un emploi ou de poursuivre son affiliation au régime volontaire, afin de verser le solde des cotisations nécessaires pour accéder à la retraite ordinaire.

4.10Le fait que l’auteure ait été femme au foyer et qu’elle ait été affiliée au régime volontaire n’implique pas qu’elle ait subi une discrimination fondée sur le sexe, puisque toute personne peut opter volontairement pour ce régime, indépendamment du fait qu’il s’agisse d’un homme ou d’une femme, et sans distinction quant au type d’activité exercée, avec les mêmes avantages et prestations sociales. L’État partie fournit une description des règles juridiques régissant l’affiliation volontaire depuis 1979, y compris les conditions d’admission à ce régime. Il souligne que celui-ci a permis d’assurer la couverture de la population qui n’était pas employée ou qui travaillait dans le secteur informel. L’auteure y a été affiliée et a bénéficié des diverses prestations.

4.11L’État partie garantit les droits énoncés dans le Pacte aux personnes âgées, qui font partie des groupes faisant l’objet d’une attention prioritaire. Dans ce contexte, des politiques publiques en faveur du droit à la sécurité sociale ont été mises en œuvre.

Commentaires de l’auteure sur les observations de l’État partie

5.1Le 3 mars et le 24 novembre 2016, l’auteure a fait part de ses commentaires sur les observations de l’État partie.

5.2La communication n’a pas pour objet d’obtenir que le Comité agisse en tant qu’organe d’appel et réexamine les décisions prises par les autorités de l’État, mais plutôt qu’il détermine si les actions des autorités sont compatibles avec le Pacte.

5.3Dans ses observations, l’État partie se contente de souligner que les autorités n’ont pas délibérément porté atteinte aux droits de l’auteure, dont la demande de retraite spéciale a été rejetée parce qu’elle ne remplissait pas les conditions prévues par la loi. Cependant, ni le tribunal no 1 ni la Cour nationale de justice n’ont analysé les violations dont l’auteure avait été victime en raison de l’absence d’informations utiles communiquées en temps voulu par l’IESS et des irrégularités dans les notifications. Ils n’ont pas non plus tenu compte du fait que l’auteure était une personne âgée qui ne recevait pas de pension de retraite lui permettant de mener une vie digne et convenable.

5.4Il incombe à l’IESS de déterminer, de manière rapide et efficace, si les cotisations de ses affiliés sont versées dans les délais. Dans le cas présent, l’IESS n’a pas informé l’auteure en temps voulu que les cotisations qu’elle avait versées entre août 1989 et février 1995 n’étaient pas valables. En outre, les fonctionnaires de l’IESS ont mal renseigné l’auteure en lui disant qu’elle remplissait les conditions requises pour avoir droit à la retraite, ce qui l’a conduite à démissionner de son poste.

5.5Les procédures administratives et judiciaires ont duré environ quatorze ans, ce qui témoigne d’un manque de diligence. L’auteure fait observer que, conformément à l’article 115.1 du Statut du régime juridique et administratif de la fonction exécutive, l’administration est tenue de prendre une décision expresse dans toutes les procédures et de notifier celle-ci sous quelque forme que ce soit. Par conséquent, l’IESS ne pouvait pas justifier son retard et l’absence de notification en faisant valoir que l’auteure ne l’avait pas approché pour suivre son dossier.

5.6En outre, la décision rendue par la Commission d’appel de l’IESS le 6 mars 2003 n’a pas été dûment notifiée et l’auteure n’en a eu connaissance qu’en 2007. En tout état de cause, cette décision ne saurait valoir notification puisqu’elle est intervenue après que l’auteure a présenté sa demande de retraite et démissionné de son emploi.

5.7L’auteure affirme que le fait que les fonctionnaires de l’IESS ne lui aient pas fourni des informations correctes et ne lui aient pas fait savoir en temps voulu que ses contributions avaient été indûment versées constitue une violation du droit à la sécurité sociale pour ce qui est de l’accès à l’information.

Observations supplémentaires de l’État partie

6.Le 3 mars 2017, l’État partie a répété ses observations sur l’irrecevabilité de la communication et ajouté que l’auteure alléguait une violation du droit à l’information, qui n’était pas protégé par le Pacte, et que le Comité n’est donc pas compétent ratione  materiae pour examiner ce grief.

Intervention de tiers

7.1Le 28 septembre 2017, le Groupe de travail des communications, agissant au nom du Comité, a autorisé l’intervention du Réseau international pour les droits économiques, sociaux et culturels (Réseau-DESC) en vertu de l’article 8 du Protocole facultatif et du Guide concernant l’intervention de tiers.

7.2Le 30 octobre 2017, le Réseau-DESC a présenté son intervention en insistant sur l’obligation qu’ont les États parties de veiller à ce que leurs systèmes de sécurité sociale bénéficient à tous sans discrimination, y compris aux femmes exerçant un travail non rémunéré, de prendre des mesures positives pour assurer la protection sociale des personnes qui n’ont pas accès aux systèmes de sécurité sociale existants ou qui ne peuvent pas en bénéficier, en particulier les femmes âgées, et de faire en sorte que ces systèmes facilitent l’accès à l’information et à une procédure régulière, notamment en garantissant le droit à un recours utile. Le Comité a transmis l’intervention du Réseau-DESC à l’État partie et à l’auteure, en sollicitant leurs observations et commentaires.

Observations de l’État partie sur l’intervention de tiers

8.1Dans une lettre datée du 1er décembre 2017, l’État partie note que l’intervention du Réseau-DESC porte sur la discrimination à l’égard des femmes, ce qui sort du champ de la communication étant donné que l’auteure n’a jamais fait valoir devant les tribunaux nationaux ou devant le Comité qu’elle avait été victime d’une discrimination fondée sur le sexe.

8.2L’État partie souligne que la législation en vigueur au moment des faits garantissait, et la législation actuelle continue de garantir, le droit à la sécurité sociale pour tous les habitants de l’État partie, sans discrimination aucune.

B.Délibérations du Comité sur la recevabilité

9.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité doit, conformément au Protocole facultatif, déterminer si la communication est recevable.

9.2Le Comité juge conforme au Protocole facultatif le fait qu’une institution nationale de défense des droits de l’homme, comme le Bureau du Défenseur du peuple de l’Équateur, représente une personne ou un groupe de personnes qui se considère victime d’une violation des droits consacrés par le Pacte.

9.3L’État partie affirme que le Comité n’est pas compétent ratione temporis étant donné que les faits à l’origine des violations alléguées se sont produits avant le 5 mai 2013, date d’entrée en vigueur du Protocole facultatif pour l’Équateur, et ne se sont pas poursuivis après cette date. L’auteure objecte que si certains des faits se sont produits avant le 5 mai 2013, leur effet se poursuit à ce jour.

9.4Conformément à l’alinéa b) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif, le Comité doit déclarer irrecevable toute communication qui porte sur des faits antérieurs à la date d’entrée en vigueur du Protocole pour l’État concerné, à moins que ces faits ne persistent après cette date. Comme le Comité l’a fait observer, un fait qui peut constituer une violation du Pacte n’a pas un caractère continu simplement parce que ses effets ou ses conséquences s’étendent dans le temps. En l’espèce, le Comité note que la violation alléguée du droit de l’auteure à la sécurité sociale a eu lieu le 20 juin 2003, date à laquelle la Commission régionale 1 a rejeté sa demande de retraite spéciale. Bien que l’auteure subisse encore les conséquences de cette mesure, cette circonstance n’en modifie pas le caractère d’acte instantané.

9.5Le pourvoi en cassation relatif à la procédure contentieuse administrative et l’action extraordinaire en protection ont été tranchés par la Cour nationale de justice et la Cour constitutionnelle respectivement les 17 avril et 17 juillet 2014. À cet égard, le Comité rappelle que les décisions judiciaires ou administratives prises par les autorités nationales sont également considérées comme faisant partie des « faits » aux fins de l’alinéa b) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif lorsqu’elles résultent de procédures directement liées aux événements initiaux, aux actes ou aux omissions qui ont donné lieu à la violation, si elles sont susceptibles de remédier à la violation alléguée, conformément à la législation applicable à ce moment-là. L’État partie fait valoir que ces décisions, de par leur nature, ne constituaient pas en elles-mêmes des actes portant atteinte aux droits de l’auteure. Le Comité note toutefois que le pourvoi en cassation ainsi que l’action extraordinaire en protection ont été l’occasion pour la Cour nationale de justice et la Cour constitutionnelle d’examiner de manière approfondie les allégations de violation du droit de l’auteure à la sécurité sociale afin, éventuellement, d’y remédier. Le Comité estime donc qu’il est compétent ratione temporis pour examiner la présente communication.

9.6L’État partie objecte que les allégations de l’auteure ne se rapportent pas à une violation d’un droit inscrit dans le Pacte mais concernent le droit à une procédure régulière et le droit à l’information, et que, par conséquent, le Comité n’est pas compétent ratione materiae pour examiner ces allégations. Le Comité note que dans ses allégations, l’auteure présente les questions de l’absence de notification en bonne et due forme et du retard dans les procédures administratives et judiciaires, ainsi que de l’absence d’informations appropriées sur la manière d’obtenir une pension, comme des éléments du droit à la sécurité sociale.

9.7Le Comité rappelle que l’absence de protection judiciaire adéquate peut se traduire par la violation de droits reconnus dans le Pacte, étant donné que les États ont le devoir de garantir l’accès à des recours utiles pour la protection de ces droits ; il ne peut y avoir de droit sans recours pour le protéger. De même, le Comité considère que le fait de ne pas fournir des informations adéquates sur la manière d’accéder à un droit peut entraîner une violation de ce droit. Il estime donc que les griefs soulevés par l’auteure en ce qui concerne la régularité de la procédure et l’accès à l’information en temps voulu sont étroitement liés à la plainte pour violation du droit à la sécurité sociale au titre de l’article 9 du Pacte et en sont indissociables. Il conclut qu’il est compétent ratione materiae pour examiner cette partie de la communication.

9.8L’État partie objecte également que la communication est irrecevable pour défaut manifeste de fondement car elle ne contient pas d’éléments prouvant que les droits de l’auteure ont été violés. Il ajoute que la communication vise à infirmer les décisions administratives et judiciaires prises en l’espèce mais que le Comité ne peut pas agir comme une quatrième instance.

9.9Le Comité rappelle sa jurisprudence selon laquelle son rôle, lorsqu’il examine une communication, se limite à déterminer si les faits décrits dans la communication, y compris l’application de la législation nationale, font apparaître une violation par l’État partie des droits énoncés dans le Pacte, et il appartient en premier lieu aux juridictions des États parties d’apprécier les faits et les éléments de preuve dans chaque affaire particulière et d’interpréter la législation pertinente. Le rôle du Comité consiste seulement à se prononcer sur l’appréciation des éléments de preuve ou l’interprétation du droit interne appliqué à l’affaire considérée, quand celles-ci ont été manifestement arbitraires ou ont constitué un déni de justice, et ont porté atteinte à un droit reconnu dans le Pacte. Il note que les griefs exposés dans la présente communication ne mettent pas en cause l’appréciation des éléments de preuve par les autorités de l’État partie ou l’interprétation de la législation, mais soulèvent plutôt la question de savoir si les actions des autorités constituent en l’espèce une violation du droit de l’auteure à la sécurité sociale. En outre, le Comité considère que les faits décrits dans la communication lui permettent d’apprécier s’il y a eu ou non violation du Pacte et que l’auteure a suffisamment étayé ses allégations de violation de l’article 9 du Pacte aux fins de la recevabilité.

9.10Lorsque, d’après les documents communiqués, il existe des faits, établis dans la procédure contradictoire, au sujet desquels les parties ont pu faire leurs observations et commentaires respectifs, et d’où il ressort à l’évidence qu’une disposition du Pacte qui n’a pas été invoquée pourrait avoir été violée, le Comité est habilité à déterminer si des articles que les parties n’ont pas invoqués ont été violés, dans la limite des allégations formulées dans la communication. En l’espèce, le Comité considère que les faits exposés et les renseignements figurant au dossier (voir par. 3.4, 3.5 et 4.10 et 4.11 supra) soulèvent également des questions au titre des paragraphes 2 et 3 de l’article 2 du Pacte.

9.11Le Comité note qu’en l’espèce, l’État partie n’a pas contesté la recevabilité de la communication pour non-épuisement des recours internes et que la communication satisfait aux autres critères de recevabilité énoncés dans le Protocole et, par conséquent, la déclare recevable et procède à son examen au fond.

C.Examen au fond

Faits et points de droit

10.1Conformément à l’article 8 du Protocole facultatif, le Comité a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées.

10.2L’auteure affirme que le manque de diligence de la part de l’IESS l’a de fait privée d’une pension spéciale alors qu’elle avait versé 305 cotisations mensuelles sur vingt-neuf ans, et que l’État partie a violé son droit à la sécurité sociale parce que l’IESS a rejeté sa demande de retraite spéciale après avoir conclu qu’elle n’avait versé que 238 cotisations mensuelles et non 300 ou plus, comme la loi l’exigeait. Elle fait valoir que les autorités judiciaires n’ont pas tenu compte du fait que l’IESS ne l’a pas informée en temps utile que les cotisations qu’elle avait versées entre août 1989 et février 1995 n’étaient pas valables, que ce n’est qu’en 2003 que l’IESS a constaté le caractère indu de ses contributions et qu’elle n’a eu connaissance de cette décision qu’en mai 2007. De plus, la procédure administrative et judiciaire relative à sa demande de retraite a duré environ quatorze ans et la décision de rejet de sa demande, rendue par la Commission régionale 1 le 20 juin 2003, ne lui a été notifiée qu’en mai 2007. L’auteure fait en outre valoir que les décisions de l’IESS constituent dans la pratique une discrimination fondée sur le sexe et qu’elle n’a pas non plus la possibilité de recevoir une pension de vieillesse minimale puisque l’État partie n’a pas mis en place de régime non contributif.

10.3L’État partie affirme que les autorités administratives et judiciaires n’ont pas délibérément porté atteinte aux droits de l’auteure, que la décision de l’IESS de rejeter la demande de retraite spéciale de l’auteure a été prise dans le strict respect des dispositions légales en vigueur à l’époque, qui établissaient clairement les critères auxquels les affiliés devaient satisfaire pour pouvoir prétendre à la retraite, et que l’auteure ne remplissait pas tous ces critères puisqu’elle n’avait versé que 238 cotisations mensuelles et non 300. En outre, le fait que l’auteure ait été une « femme au foyer » et qu’elle se soit affiliée à titre volontaire n’implique pas qu’elle ait été victime d’un traitement discriminatoire fondé sur le sexe.

10.4Les faits suivants n’ont pas été contestés par les parties : l’auteure a été affiliée à l’IESS de septembre 1972 à octobre 1981 en tant qu’employée ; de novembre 1981 à février 1995, elle a cotisé au régime volontaire ; et entre mars 1995 et novembre 2001, elle a de nouveau été affiliée en tant que salariée. Il n’y a pas non plus de contestation quant au fait que, le 26 avril 1990, l’auteure a soldé ses cotisations pour les mois d’août 1989 à mars 1990, qu’elle avait donc cessé de s’acquitter de ses cotisations pendant huit mois consécutifs, et qu’elle a par la suite continué à verser des cotisations volontaires mensuelles (65 cotisations) à l’IESS jusqu’en février 1995 sans être informée de la nullité de son affiliation ou de ses cotisations, qui ne lui a été notifiée qu’après la présentation de sa demande de retraite.

10.5Le Comité note également que l’État partie ne conteste pas l’argument de l’auteure selon lequel en 2001, elle a consulté l’IESS à plusieurs reprises pour savoir si elle pouvait prendre sa retraite dans le cadre du régime spécial, et les fonctionnaires de l’IESS lui ont toujours dit oralement que c’était possible étant donné qu’elle remplissait les conditions qui étaient d’avoir versé au moins 300 cotisations mensuelles et d’être âgée de plus de 45 ans, et qu’elle devait simplement quitter son emploi pour prendre sa retraite, ce qu’elle a fait. L’État partie ne met pas non plus en doute le fait que l’auteure est dans une situation très précaire et qu’elle a de graves problèmes de santé.

10.6La question centrale qui se dégage des faits pertinents établis par le Comité et des allégations des parties est de savoir si le rejet de la demande de retraite spéciale de l’auteure constitue une violation du droit à la sécurité sociale prévu à l’article 9 du Pacte du fait que l’IESS, non seulement, n’aurait pas informé l’auteure en temps voulu que son affiliation volontaire était frappée de nullité à compter d’août 1989 et que ses cotisations ultérieures versées jusqu’en février 1995 étaient indues, mais, de surcroît, a continué de recevoir lesdites cotisations. Elle est liée à trois autres questions, qui sont celles de savoir : a) si la sanction prévue consistant à exclure du régime d’affiliation volontaire quiconque ne verse pas de cotisations pendant six mois consécutifs est proportionnelle ; b) si l’absence d’un régime de pension non contributif intégral dans l’État partie, qui pourrait couvrir l’auteure, est pertinente en l’espèce ; et c) si les conditions d’affiliation volontaire imposées à l’auteure peuvent constituer un traitement discriminatoire fondé sur le sexe et une violation du paragraphe 2 de l’article 2, lu conjointement avec l’article 9 du Pacte. Pour y répondre, le Comité souhaite rappeler certaines composantes du droit à la sécurité sociale, notamment en ce qui concerne l’accès à la retraite des femmes au foyer, avant d’analyser le problème essentiel posé par la communication.

Le droit à la sécurité sociale et à une pension de retraite

11.1Le Comité rappelle que le droit à la sécurité sociale est fondamental pour garantir la dignité humaine de toutes les personnes.

11.2Le droit à la sécurité sociale a des conséquences financières importantes pour les États, mais ceux-ci ont l’obligation d’assurer au moins la satisfaction de l’essentiel de ce droit. Ils doivent notamment garantir l’accès à un régime de sécurité sociale qui assure à tous les individus et à toutes les familles un niveau minimum indispensable de prestations, sans discrimination aucune.

11.3Le Comité rappelle que l’article 9 du Pacte reconnaît implicitement le droit aux prestations de vieillesse. Les États parties sont tenus d’accorder une attention particulière à la promotion et à la protection des droits économiques, sociaux et culturels des personnes âgées en prenant des mesures appropriées pour établir, de façon générale, des systèmes d’assurance vieillesse obligatoires.

L’obligation pour les États parties de garantir l’accès à une pension de retraite

12.1Les États disposent d’une certaine marge d’appréciation pour prendre les mesures qu’ils jugent nécessaires pour faire en sorte que chacun puisse exercer son droit à la sécurité sociale, notamment pour garantir que les régimes de retraite soient efficaces, viables et accessibles à tous. Les États peuvent ainsi définir des conditions pour l’affiliation à chacun des divers programmes de sécurité sociale et l’admission au bénéfice d’une pension de retraite ou d’autres prestations, sous réserve que celles-ci soient raisonnables, proportionnées, claires et transparentes. Ces conditions doivent être communiquées à tous en temps utile et de manière suffisante afin que l’accès à une pension de retraite soit prévisible. Lorsque le non-respect de ces conditions est sanctionné par la désaffiliation de la sécurité sociale, que l’organisme gestionnaire soit public ou privé, il revient à l’État partie de démontrer le caractère raisonnable et proportionné de cette sanction.

12.2La législation nationale doit préciser la portée, les conditions d’octroi et les niveaux de prestations. Même si la loi est présumée connue de tous dans les systèmes juridiques de bon nombre d’États parties, les États sont tenus de veiller à ce que tout affilié ait le droit de demander, de recueillir et de recevoir des informations concernant son droit à la sécurité sociale, y compris sa pension ou sa future pension de retraite, et de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les institutions publiques ou privées chargées de la gestion de la sécurité sociale fournissent en temps voulu aux affiliés des informations adéquates, notamment sur la validité de leurs cotisations et sur toute modification de leur statut.

12.3Si un dispositif de sécurité sociale repose sur des cotisations, leur montant doit être défini à l’avance et les coûts directs et indirects liés à leur versement doivent être abordables pour tous et ne pas compromettre l’exercice des autres droits énoncés dans le Pacte.

Le droit à la sécurité sociale des femmes effectuant des tâches domestiques non rémunérées et le droit à une pension de retraite sans discrimination

13.1Toute personne a droit à la sécurité sociale, mais les États parties devraient accorder une attention particulière aux individus et aux groupes pour lesquels il est traditionnellement difficile d’exercer ce droit, comme les femmes.

13.2Le Comité rappelle que le Pacte interdit toute discrimination, qu’elle soit de fait ou de droit, directe ou indirecte, dont l’intention ou l’effet est de rendre impossible ou d’entraver la jouissance ou l’exercice du droit à la sécurité sociale dans des conditions d’égalité. On parle de discrimination indirecte dans le cas de lois, de politiques ou de pratiques qui semblent neutres a priori mais qui ont un effet discriminatoire disproportionné sur l’exercice des droits consacrés par le Pacte eu égard à des motifs de discrimination interdits.

13.3Les États doivent donc prendre des mesures concrètes, et les revoir si nécessaire, au maximum des ressources dont ils disposent, afin de réaliser pleinement le droit de tous à la sécurité sociale, sans discrimination d’aucune sorte. Les États parties devraient également prendre des mesures pour veiller à ce que, dans la pratique, les hommes et les femmes exercent leurs droits économiques, sociaux et culturels dans des conditions d’égalité, et à ce que leurs politiques publiques et leur législation tiennent compte des inégalités économiques, sociales et culturelles que subissent les femmes. Ceci exige parfois qu’ils prennent des mesures spéciales en faveur des femmes, en vue d’alléger ou de supprimer les conditions qui ont contribué à perpétuer la discrimination.

13.4Les États parties devraient en outre réexaminer les restrictions à l’accès aux régimes de sécurité sociale pour veiller à ce qu’elles n’engendrent pas de discrimination de droit ou de fait à l’égard des femmes. Ils devraient tenir compte en particulier du fait qu’en raison de la persistance des stéréotypes et d’autres causes structurelles, les femmes consacrent beaucoup plus de temps au travail non rémunéré que les hommes. Ils devraient prendre des mesures pour s’attaquer aux facteurs qui empêchent les femmes de cotiser aux régimes de sécurité sociale qui subordonnent les prestations au versement de cotisations, ou pour veiller à ce que lesdits régimes intègrent ces facteurs dans les modalités de calcul des prestations, par exemple en tenant compte du temps passé, en particulier par les femmes, à élever des enfants et à s’occuper d’adultes à charge.

Accès aux prestations non contributives de vieillesse

14.1En vertu de l’article 9 du Pacte, les États parties devraient adopter des régimes non contributifs ou d’autres mesures d’assistance sociale pour aider les personnes et les groupes qui ne sont pas en mesure de verser des cotisations suffisantes pour assurer leur propre protection.

14.2Pour s’acquitter de leurs obligations minimum relatives au droit à la sécurité sociale consacré par le Pacte (par. 11.1 et 11.2 supra), les États parties devraient prévoir des prestations non contributives de vieillesse, des services sociaux et d’autres formes d’aide en faveur de toutes les personnes âgées qui, quand elles atteignent l’âge de la retraite fixé par la législation nationale, n’ont pas cotisé pendant la période minimale requise ou, pour toute autre raison, n’ont pas droit à une pension de vieillesse ou à d’autres prestations ou formes d’assistance au titre de la sécurité sociale et n’ont pas d’autre source de revenus. Dans les régimes non contributifs, il convient également de tenir compte du fait que les femmes sont plus susceptibles de vivre dans la pauvreté que les hommes, qu’elles sont souvent seules responsables des soins aux enfants et que, le plus souvent, elles n’ont pas de pension contributive.

14.3Pour qu’un État partie puisse imputer au manque de ressources le fait qu’il ne s’acquitte même pas de ses obligations fondamentales minimum, il doit démontrer qu’aucun effort n’a été épargné pour utiliser toutes les ressources à sa disposition aux fins de remplir, à titre prioritaire, ces obligations minimales.

Analyse de la plainte de l’auteure

15.1L’État partie affirme que le droit de l’auteure à la sécurité sociale n’a pas été violé puisque la demande de retraite spéciale de l’auteure a été rejetée par la Commission régionale 1 et la Commission d’appel de l’IESS au motif que le nombre de cotisations comptabilisées dans son cas n’était que de 238 et n’atteignait donc pas le minimum exigé de 300. Il ajoute que l’auteure a la possibilité de s’acquitter du nombre de cotisations manquantes pour accéder à une retraite ordinaire.

15.2L’État fait également valoir que les décisions visées au paragraphe précédent étaient fondées sur la décision rendue le 13 septembre 2002 par la Commission régionale 1, qui avait estimé que l’affiliation volontaire de l’auteure n’était plus valable à compter d’août 1989 et qui avait ordonné l’annulation des périodes de service déclarées à partir de cette date jusqu’en février 1995, conformément à l’article 158 du Statut codifié de l’IESS. Cette décision a été confirmée par la Commission d’appel de l’IESS le 6 mars 2003, sans contestation de l’auteure. L’État partie n’a pas suffisamment expliqué au Comité de quelles voies de recours l’auteure aurait pu se prévaloir pour contester cette dernière décision, dont elle a eu connaissance le 21 juin 2007, lorsqu’elle a été informée de la deuxième décision de la Commission d’appel de l’IESS.

Absence d’informations adéquates communiquées en temps voulu et non-reconnaissance des attentes légitimes

16.1Le Comité note qu’en avril 1990, l’auteure a réglé rétroactivement le solde des cotisations correspondant aux mois d’août 1989 à mars 1990 et qu’elle a par la suite repris le versement de ses cotisations volontaires pendant soixante-cinq mois jusqu’en février 1995. Selon les informations communiquées par les parties, l’IESS a informé l’auteure que ces cotisations n’étaient pas valables après qu’elle eut demandé sa retraite et plus de dix ans après la fin supposée de son affiliation volontaire. L’État partie n’a pas expliqué au Comité les raisons pour lesquelles l’IESS a continué de percevoir les cotisations mensuelles volontaires de l’auteure pendant une période aussi longue et n’a pas informé immédiatement l’intéressée de la cessation de son affiliation volontaire et du fait que ses cotisations ne seraient pas prises en compte dans le calcul de la retraite.

16.2Selon l’État partie, l’auteure pouvait prévoir cette situation dans la mesure où elle n’était pas censée ignorer les règles juridiques en vigueur parmi lesquelles, par exemple, l’article 158 du Statut codifié de l’IESS qui disposait clairement que la poursuite volontaire de l’affiliation prenait fin automatiquement si la personne concernée ne payait pas de cotisations pendant six mois consécutifs ; l’auteure était consciente de cette situation et pouvait donc prévoir qu’elle ne serait pas admissible au bénéfice d’une retraite spéciale. Toutefois, le Comité note qu’en 2001, des fonctionnaires de l’IESS ont confirmé oralement à l’auteure qu’elle remplissait toutes les conditions requises pour bénéficier d’une retraite spéciale (par. 10.5 supra). Le Comité considère que ces faits, ainsi que l’encaissement de ses cotisations volontaires par l’IESS entre 1990 et 1995, et l’absence d’informations adéquates communiquées en temps voulu à l’auteure concernant la nullité de ces cotisations ont raisonnablement pu créer chez elle des attentes légitimes quant à son droit à une retraite spéciale.

16.3Le Comité considère que l’IESS, non seulement, n’a pas fourni en temps voulu à l’auteure des informations adéquates sur la nullité de ses cotisations volontaires, mais n’a pas reconnu, de surcroît, les attentes légitimes qu’il avait créées chez l’auteure. Cette situation ne se serait pas nécessairement traduite par une violation du droit à la sécurité sociale si elle n’avait pas eu un impact significatif sur le projet de vie de l’auteure et sur la jouissance effective de ce droit, sous la forme d’une pension de retraite. Toutefois, en l’espèce, les informations en question concernaient une part importante des cotisations de l’auteure et n’ont été portées à son attention qu’après qu’elle eut présenté sa demande de retraite, alors qu’elle était déjà âgée, qu’il lui était très difficile d’accéder au marché du travail, qu’elle était dans une situation économique précaire et qu’elle avait des problèmes de santé. Dans ces conditions, dans la pratique, l’auteure pouvait très difficilement prendre des mesures qui lui permettent de compléter ses cotisations et qui ne représentent pas une charge disproportionnée pour elle. Cette situation a été aggravée par la lenteur des procédures administratives et judiciaires, qui ont duré environ quatorze ans, ce qui a placé l’auteure dans une situation de grande vulnérabilité.

16.4Les considérations qui précèdent font apparaître une atteinte au droit à la sécurité sociale de l’auteure, puisque l’IESS non seulement n’a pas clairement informé l’intéressée que son affiliation volontaire avait pris fin étant donné qu’elle n’avait pas cotisé pendant plus de six mois, mais a continué de percevoir ses cotisations pendant plus de cinq ans, période pendant laquelle l’auteure pensait raisonnablement qu’elle s’acquittait des cotisations nécessaires pour obtenir sa retraite spéciale. En outre, les fonctionnaires de l’IESS ont déclaré oralement à l’auteure qu’elle remplissait les conditions légales requises pour bénéficier de ce régime, de sorte qu’elle a démissionné de son emploi pour demander une pension. L’auteure a déposé sa demande plusieurs années après avoir versé ces cinq années de cotisations au titre de l’affiliation volontaire, lorsque sa capacité de travail avait considérablement diminué. Ce n’est qu’après avoir démissionné de son emploi et sollicité la pension de retraite qu’elle a été informée que les cotisations versées pendant plus de cinq ans n’étaient pas valables, si bien qu’elle ne pouvait pas bénéficier de la retraite spéciale parce qu’elle n’avait pas atteint trois cents mois de cotisations, alors qu’il lui était devenu très difficile de réintégrer le marché du travail pour verser de nouvelles cotisations. Cette situation n’était pas conforme aux attentes légitimes de l’auteure, qui comptait sur l’obtention d’une retraite spéciale fondée sur ses cotisations. Il est vrai que, au sens strict, ces attentes n’étaient peut-être pas fondées sur les règles juridiques en vigueur régissant l’accès à la retraite spéciale, mais il s’agissait d’attentes légitimes qui auraient dû être respectées puisqu’elles étaient fondées sur le comportement même des autorités de l’État partie qui avaient conduit l’auteure à croire, de bonne foi, qu’elle remplissait les conditions voulues pour toucher cette pension. Ces faits traduisent une violation du droit à la sécurité sociale de l’auteure.

Le caractère disproportionné de la mesure de cessation de l’affiliation volontaire

17.1En outre, le Comité note que l’IESS a estimé que l’affiliation volontaire de l’auteure avait cessé en août 1989, conformément à l’article 158 de ses statuts codifiés, qui prévoyait la cessation de l’affiliation volontaire si l’assuré n’acquittait pas la cotisation mensuelle pendant six mois consécutifs, et que, partant, les paiements effectués rétroactivement en avril 1990 au titre des cotisations dues et toutes les cotisations mensuelles postérieures à février 1995 étaient nulles. Dans ses observations, l’État partie se réfère à la décision de l’IESS et à la législation applicable en matière d’affiliation volontaire au moment des faits, mais sans expliquer le caractère raisonnable et disproportionné de la sanction. À supposer même que la sanction vise à protéger les ressources de la sécurité sociale, objectif en soi valable et légitime, l’État partie n’a pas démontré que ce soit là le seul moyen d’atteindre le but recherché. Ainsi, il n’apporte pas la preuve qu’une autre mesure, sans conséquences graves pour l’accès à la pension de l’auteure, comme l’exclusion du calcul de la pension des quelques mois où les cotisations n’ont pas été versées, n’aurait pas pu être prise. Le Comité estime que pour quiconque exerce un travail indépendant lui procurant des revenus irréguliers, la désaffiliation pour cause de non-paiement des cotisations pendant six mois consécutifs peut être inappropriée et disproportionnée ; elle est disproportionnée à plus forte raison dans le cas de l’auteure, qui était à cette période une femme au foyer sans revenus.

17.2Compte tenu de ce qui précède (par. 16.1 à 17.1 supra), le Comité conclut que l’État partie a violé le droit de l’auteure à la sécurité sociale.

Les conséquences de l’absence d’un système de retraite non contributif intégral

18.La situation décrite plus haut, qui implique en soi une violation du droit de l’auteure à la sécurité sociale, est aggravée par le fait que les autorités de l’État partie ne lui ont pas proposé d’autre mesure qui lui garantirait un niveau de vie suffisant pour ses vieux jours (par. 11.1 et 11.2 supra), l’État partie ne disposant pas d’un solide régime de pension de vieillesse non contributif (par. 14.1 à 14.2 supra) qui couvre les personnes qui ne sont pas admissibles au bénéfice des prestations du régime contributif. Il en a résulté que l’auteure, dont les attentes légitimes ont été ignorées, n’a pas pu avoir accès à une pension contributive, alors que l’État ne proposait aucune forme de pension non contributive.

Discrimination à l’égard des femmes en matière de sécurité sociale

19.1La condition de femme ayant consacré une partie de sa vie au travail domestique non rémunéré, qui est celle de l’auteure, n’est pas étrangère au fait qu’il a été porté atteinte à son droit à la sécurité sociale. C’est pourquoi le Comité procède à l’examen du grief de discrimination fondée sur le sexe soulevé par l’auteure.

19.2Le Comité rappelle que le Pacte interdit toute discrimination, qu’elle soit de fait ou de droit, directe ou indirecte, dont l’intention ou l’effet est de rendre impossible ou d’entraver la jouissance ou l’exercice du droit à la sécurité sociale dans des conditions d’égalité. Il note que l’auteure est une personne âgée dont la situation économique est précaire et qui a de problèmes de santé, et que la conjonction des motifs de discrimination invoqués, l’âge et le sexe, la rend particulièrement vulnérable à la discrimination par rapport à l’ensemble de la population. D’où la nécessité d’examiner avec soin et rigueur la question si l’auteure est victime de discrimination.

19.3Le Comité prend note des arguments de l’auteure (par. 3.4 et 3.5 supra) faisant valoir qu’elle appartient à une génération de femmes qui a consacré la plus grande partie de sa vie à des tâches ménagères non rémunérées et pour qui il a été plus difficile que pour les hommes d’exercer son droit à la sécurité sociale. L’auteure affirme que les femmes au foyer ont généralement recours à l’affiliation volontaire, mais que ce régime comporte plusieurs restrictions à leur égard parce qu’il est conçu pour les travailleurs indépendants et les salariés, généralement des hommes. Entre autres conditions, les femmes au foyer sont tenues de verser des cotisations selon les mêmes modalités que les travailleurs indépendants, y compris les professionnels, bien qu’elles n’aient pas de salaire, ce qui les désavantage par rapport à ces personnes qui ont des revenus qui, dans la plupart des cas, sont fixes. Dans le cas présent, comme l’auteure n’a pas été en mesure de payer les cotisations pendant six mois consécutifs, l’IESS a annulé plus de cinq ans de cotisations, ce qui, dans la pratique, a privé l’auteure d’une pension de retraite.

19.4Le Comité considère que lorsqu’une communication contient des informations pertinentes indiquant prima facie l’existence d’une norme juridique qui, bien qu’elle soit formulée de manière neutre, pourrait en fait clairement affecter un pourcentage plus élevé de femmes que d’hommes, il appartient à l’État partie de démontrer qu’une telle situation ne constitue pas une discrimination indirecte fondée sur le sexe. D’après les informations du domaine public concernant l’État partie, parmi les personnes en âge de travailler qui ne sont pas sur le marché du travail, celles qui se consacrent exclusivement à des tâches domestiques non rémunérées sont presque toutes des femmes.

19.5En l’espèce, les arguments de l’État partie mettent essentiellement l’accent sur le caractère non sexiste de la législation applicable au moment des faits et font valoir que toute personne, qu’elle soit de sexe masculin ou féminin et quel que soit le type d’activité qu’elle exerce, peut s’affilier au régime volontaire et bénéficier des mêmes prestations et avantages sociaux. Toutefois, l’État partie n’a pas suffisamment démontré le caractère raisonnable et proportionné des conditions d’admission au statut d’affilié volontaire et des conditions à remplir pour rester affilié définies par la législation en vigueur au moment des faits (par. 12.1 à 12.3 supra), dans le cas des femmes qui effectuent un travail domestique non rémunéré. L’État partie n’a pas démontré que les conditions d’affiliation volontaire ne constituaient pas une discrimination indirecte. Le Comité renvoie à la conclusion des paragraphes 17.1 et 17.2 supra et considère que si cette sanction peut être problématique pour ceux qui perçoivent une rémunération, elle peut devenir dévastatrice pour les femmes qui, comme dans le cas de l’auteure, n’ont pas de revenu personnel mensuel ou même irrégulier étant donné qu’elles se consacrent à des tâches ménagères non rémunérées.

19.6Compte tenu des considérations qui précèdent, et en l’absence d’explications suffisantes de la part de l’État partie réfutant les allégations de discrimination de l’auteure, le Comité considère que les conditions d’affiliation volontaire imposées à l’auteure en tant que femme au foyer sans revenus, qui ont entraîné l’invalidité de son affiliation et de ses cotisations, constituent un traitement discriminatoire.

D.Conclusion et recommandations

20.Compte tenu de toutes les informations qui lui ont été communiquées et des circonstances particulières de l’espèce, le Comité considère que la décision de l’IESS rejetant la demande de retraite spéciale de l’auteure constitue une violation de l’article 9 du Pacte et que les conditions d’affiliation volontaire imposées à l’auteure en tant que femme au foyer sans revenus, qui ont entraîné l’invalidité de son affiliation et de ses cotisations, constituent un traitement discriminatoire en ce qui concerne le droit à la sécurité sociale.

21.Le Comité, agissant en vertu du paragraphe 1 de l’article 9 du Protocole facultatif, conclut que l’État partie a violé les droits que l’auteure tient de l’article 9 et des articles 2 (par. 2) et 3, lus conjointement avec l’article 9, du Pacte. À la lumière des présentes constatations, le Comité adresse à l’État partie les recommandations ci-après.

Recommandations concernant l’auteure

22.L’État partie est tenu de fournir à l’auteure un recours utile, en particulier : a) d’accorder à l’auteure les prestations auxquelles elle a droit dans le cadre de son droit à la retraite, en tenant compte des cotisations qu’elle a versées à l’IESS ou, à défaut, d’autres prestations de sécurité sociale équivalentes qui lui permettent d’avoir un niveau de vie suffisant et digne, conformément aux critères énoncés dans la présente décision ; b) d’accorder à l’auteure une indemnisation adéquate pour les violations subies au cours de la période pendant laquelle son droit à la sécurité sociale lui a été refusé ; et c) de rembourser à l’auteure les frais de justice raisonnablement engagés dans le cadre de la soumission de la présente communication.

Recommandations générales

23.Le Comité considère que les réparations recommandées dans le contexte des communications individuelles peuvent inclure des garanties de non-répétition et rappelle que l’État partie est tenu d’empêcher que des violations analogues ne se reproduisent. Il estime que l’État partie doit veiller à ce que sa législation et les mesures prises pour l’appliquer soient conformes aux obligations énoncées dans le Pacte. En particulier, sans préjudice des réformes de la sécurité sociale introduites par la loi organique sur la justice du travail et la reconnaissance du travail non rémunéré au foyer adoptée le 20 avril 2015, l’État partie a l’obligation :

a)D’adopter des mesures législatives et/ou administratives appropriées pour garantir le droit de tout affilié de demander, recueillir et recevoir des informations concernant son droit à la sécurité sociale, ycompris sa pension ou sa future pension de retraite ;

b)De prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que l’IESS ou toute autre institution chargée de la gestion de la sécurité sociale, notamment des cotisations des affiliés et des pensions de retraite, fournisse en temps voulu aux affiliés/bénéficiaires des informations utiles, notamment sur la validité de leurs cotisations et sur toute modification de leur statut ;

c)D’adopter les mesures nécessaires, y compris sur le plan législatif, afin que les sanctions à l’égard des affiliés de l’IESS ou de toute autre institution chargée de gérer la sécurité sociale soient proportionnelles et ne constituent pas en pratique un obstacle à l’obtention d’une pension de retraite ;

d)De faire en sorte que les affiliés de l’IESS ou de toute autre institution chargée de gérer la sécurité sociale disposent en temps utile de recours administratifs et judiciaires appropriés, en vue de remédier aux violations du droit à la sécurité sociale ;

e)D’adopter des mesures législatives et/ou administratives spéciales qui permettent de garantir aux hommes et aux femmes la jouissance effective du droit à la sécurité sociale, y compris l’accès à une pension de retraite, dans des conditions d’égalité, notamment des mesures visant à corriger les facteurs empêchant les femmes qui effectuent des tâches domestiques non rémunérées de cotiser aux régimes de sécurité sociale ;

f)Compte tenu des éléments présentés par le Comité au paragraphe 18 supra, d’élaborer dans un délai raisonnable, au maximum de leurs ressources disponibles, un plan global et intégral de prestations non contributives.

24.Conformément au paragraphe 2 de l’article 9 du Protocole facultatif et au paragraphe 1 de l’article 18 du règlement intérieur provisoire relatif au Protocole facultatif, l’État partie est tenu de soumettre au Comité, dans un délai de six mois, des renseignements écrits sur les mesures qu’il aura prises pour donner effet aux constatations et recommandations du Comité. L’État partie est également prié de rendre publiques les constatations du Comité et de les diffuser largement dans un format accessible afin qu’elles puissent atteindre tous les secteurs de la population.