Nations Unies

E/C.12/ITA/CO/5

Conseil économique et social

Distr. générale

28 octobre 2015

Français

Original : anglais

Comité des droits éco nomiques, sociaux et culturels

Observations finales concernant le cinquième rapport périodique de l’Italie *

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le cinquième rapport périodique de l’Italie sur la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/ITA/5) à ses 57e et 58e séances, tenues le 25 septembre 2015 (voir E/C.12/2015/SR.57 et 58), et a adopté, à sa 78e séance tenue le 9 octobre 2015, les observations finales ci-après.

A.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le cinquième rapport périodique de l’État partie, ainsi que les renseignements complémentaires figurant dans les réponses à la liste de points (E/C.12/ITA/Q/5/Add.1), mais regrette que ces derniers aient été communiqués avec un retard considérable. Le Comité prend également note avec intérêt des réponses apportées oralement par la délégation.

B.Aspects positifs

Le Comité salue la ratification, en 2015, du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

En outre, le Comité se félicite de la ratification des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme suivants :

a)Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s’y rapportant (2009) ;

b)Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (2013).

Le Comité prend note avec satisfaction des mesures législatives et de politique générale ci-après adoptées par l’État partie :

a)Loi no 107/2015 portant réforme du système national d’éducation et de formation ;

b)Loi no 183/2014 sur les réformes du travail ;

c)Loi no 99/2013 sur la promotion de l’emploi et de la cohésion sociale ;

d)Programme « Garantie pour la jeunesse » lancé en 2014 ;

e)Stratégie nationale pour l’intégration des Roms, des Sintis et des gens du voyage adoptée en 2012.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Justiciabilité des droits énoncés dans le Pacte

Le Comité constate avec préoccupation que les dispositions du Pacte ne sont pas pleinement prises en compte par la Constitution de l’État partie et que, par conséquent, tous les droits énoncés dans le Pacte ne sont pas opposables. Il s’inquiète également de ce que les dispositions du Pacte n’aient pas été invoquées devant les tribunaux nationaux ou appliquées par eux.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour incorporer pleinement les dispositions du Pacte dans son ordre juridique interne de manière que les droits économiques, sociaux et culturels qui y sont énoncés puissent être invoqués devant les tribunaux du pays. Il encourage également l ’ État partie à intensifier ses efforts de sensibilisation des membres de l ’ appareil judiciaire, des avocats et des titulaires de droits au Pacte et au Protocole facultatif s ’ y rapportant, ainsi qu ’ à l ’ opposabilité de ces droits. Le Comité invite l ’ État partie à songer à reconnaître la compétence du Comité au titre de l ’ article 11 du Protocole facultatif. Il appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son observation générale n o  9 (1998) relative à l ’ application du Pacte au niveau national.

Mesures d’austérité

Le Comité reconnaît que l’État partie est frappé par la crise financière, mais note avec préoccupation que la réduction des niveaux de protection effective des droits consacrés par le Pacte, résultant des mesures d’austérité adoptées, a des effets néfastes sur l’exercice de ces droits, en particulier par les personnes et les groupes défavorisés et marginalisés.

Le Comité recommande à l ’ État partie de réexaminer, en se fondant sur une évaluation de l ’ incidence de ses politiques sur les droits de l ’ homme, l ’ ensemble des mesures qui ont été prises pour faire face à la crise financière et qui continuent d ’ être appliquées, de façon à garantir l ’ exercice des droits économiques, sociaux et culturels. À cet égard, le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur la lettre ouverte qu ’ il a adressée le 16 mai 2012 aux États parties concernant les droits économiques, sociaux et culturels dans le contexte de la crise économique et financière, et en particulier les conditions que les politiques d ’ austérité doivent remplir.

Corruption

Le Comité prend note de l’adoption, en 2012, de la loi anticorruption, mais juge préoccupant le fait que la corruption reste très répandue dans l’État partie, notamment au sein de l’appareil judiciaire. Il constate également avec préoccupation que les institutions mises en place pour lutter contre la corruption sont inadaptées et manquent de moyens.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de redoubler d ’ effort pour combattre la corruption, notamment au sein de l ’ appareil judiciaire. Il lui demande, entre autres choses, de garantir la transparence et l ’ indépendance de ses institutions de lutte contre la corruption, d ’ enquêter sur toutes les allégations de corruption et d ’ assurer l ’ application effective de la législation anticorruption. Le Comité encourage également l ’ État partie à allouer des ressources suffisantes à l ’ organisme de lutte contre la corruption, à appliquer une politique de tolérance zéro à l ’ égard de la corruption et à assurer la protection effective des victimes de la corruption et des dénonciateurs, ainsi que de leurs avocats.

Aide publique au développement

Le Comité est préoccupé par la baisse de la part du produit national brut (PNB) consacrée par l’État partie à l’aide publique au développement, qui n’était que de 0,2 % en 2006 et est passée à 0,15 % en 2010.

Le Comité demande à l ’ État partie d ’ augmenter progressivement son aide publique au développement pour la porter à 0,7 % de son PNB, comme convenu au niveau international, et d ’ adopter, dans le cadre de sa politique de coopération pour le développement, une démarche fondée sur les droits de l ’ homme qui tienne compte des droits consacrés par le Pacte.

Institution nationale des droits de l’homme

Le Comité prend note des informations fournies par la délégation concernant les projets de loi en instance qui visent à créer une institution nationale des droits de l’homme, mais demeure préoccupé par le report incessant de cette mesure, en dépit de sa recommandation antérieure.

Le Comité prie instamment l ’ État partie de redoubler d ’ effort pour mettre en place une institution nationale des droits de l ’ homme dotée de ressources suffisantes qui soit conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales (Principes de Paris) et soit chargée de protéger et de promouvoir tous les droits de l ’ homme, y compris les droits économiques, sociaux et culturels.

Cadre juridique de la protection contre la discrimination

Le Comité prend note du fait que la Constitution de l’État partie contient une disposition interdisant la discrimination, mais s’inquiète de ce que cette disposition ne mentionne pas tous les motifs de discrimination interdits par le Pacte et que la législation en vigueur ne vise que certains de ces motifs. Le Comité est également préoccupé par la non-reconnaissance légale des unions de personnes de même sexe (art. 2, par. 2).

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures en vue d ’ adopter une législation complète contre la discrimination qui garantisse à tous une protection contre la discrimination dans l ’ exercice des droits économiques, sociaux et culturels et qui couvre toutes les formes de discrimination, y compris l ’ orientation sexuelle et l ’ identité de genre. Il lui recommande aussi de reconnaître que les personnes de même sexe qui contractent une union ont le droit de jouir, dans des conditions d ’ égalité, de leurs droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son observation générale n o 20 (2009) sur la non-discrimination dans l ’ exercice des droits économiques, sociaux et culturels.

Migrants, demandeurs d’asile et réfugiés

Le Comité salue les efforts qu’a déployés l’État partie, notamment en lançant l’opération Mare Nostrum en 2013, pour recevoir et accueillir un nombre considérable de migrants, de demandeurs d’asile et de réfugiés. Il demeure toutefois préoccupé par la pratique présumée du refoulement, ainsi que par le fait que les migrants, les demandeurs d’asile et les réfugiés ne peuvent exercer les droits que leur reconnaît le Pacte que de façon limitée à leur arrivée dans l’État partie. Le Comité est particulièrement préoccupé par les conditions déplorables observées dans les centres d’accueil, dont le nombre est du reste insuffisant (art. 2, par. 2).

Le Comité demande instamment à l ’ État partie de mettre un terme à la pratique du refoulement. Il lui recommande de redoubler d ’ effort pour faire en sorte que les migrants, les demandeurs d ’ asile et les réfugiés jouissent du plein exercice des droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité recommande également à l ’ État partie de veiller, lorsqu ’ il s ’ emploie à s ’ acquitter des obligations à l ’ égard de ces personnes que lui impose le Pacte, à solliciter la coopération et l ’ assistance internationales et à les renforcer, particulièrement avec les États membres de l ’ Union européenne. Le Comité recommande en outre à l ’ État partie de prendre des mesures pour augmenter le nombre de centres d ’ accueil, améliorer les conditions de vie dans ces centres et faire en sorte que toutes les personnes qui s ’ y trouvent aient accès à des soins médicaux, à des interprètes, à une nourriture suffisante, à des vêtements et à une aide sociale.

Discrimination à l’égard des personnes handicapées

Le Comité est préoccupé par la discrimination à l’égard des personnes handicapées qui s’observe dans plusieurs des domaines visés par le Pacte, en particulier l’emploi, le niveau de vie et l’éducation. Il s’inquiète également de ce que la notion d’« aménagements raisonnables » n’ait pas été intégrée dans toutes les lois pertinentes, ce qui favorise encore davantage la discrimination de fait que subissent les personnes handicapées (art.2, 6, 11, 13 et 14).

Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les personnes handicapées exercent pleinement et sans discrimination les droits consacrés par le Pacte, en particulier le droit au travail, à un niveau de vie suffisant et à l ’ éducation. Il  lui recommande également d ’ incorporer la notion d ’ aménagements raisonnables dans toutes ses lois ayant une incidence sur les personnes handicapées, ainsi que de prendre des mesures pour veiller au respect de cette notion.

Égalité entre hommes et femmes

Le Comité salue l’adoption de plusieurs lois et politiques visant à accroître la participation des femmes à la vie politique, notamment la loi no 120/2011 sur l’égalité d’accès aux conseils d’administration et aux bureaux des commissaires aux comptes des sociétés cotées en bourse, et la loi no 215/2012 sur les mesures de promotion de la parité et de l’égalité hommes-femmes au sein des collectivités locales et des conseils régionaux. Le Comité demeure cependant préoccupé par la persistance de stéréotypes concernant les rôles dévolus à chaque sexe, ainsi que par la sous-représentation des femmes au Parlement, au sein de l’appareil judiciaire et aux postes de responsabilité dans la fonction publique. Il s’inquiète également de la quasi-absence de la scène politique de femmes roms et de femmes originaires du sud du pays (art. 3).

Rappelant son observation générale n o  16 (2005) sur le droit égal de l ’ homme et de la femme au bénéfice de tous les droits économiques, sociaux et culturels, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intensifier ses efforts de lutte contre les stéréotypes sexistes et de mener des campagnes nationales de sensibilisation, y compris en recourant davantage aux médias, afin de modifier les mentalités concernant le rôle des hommes et des femmes. Il recommande également à l ’ État partie de prendre des mesures efficaces pour renforcer la participation des femmes dans tous les domaines de la vie publique, ainsi que d ’ envisager d ’ adopter des mesures temporaires spéciales, notamment des quotas, et d ’ accorder dans ce cadre une attention particulière aux femmes roms et aux femmes originaires du sud du pays.

Chômage

Le Comité est préoccupé de constater qu’en dépit des divers programmes élaborés pour combattre le chômage et remédier à la situation des jeunes qui ne sont ni scolarisés ni en formation, le taux de chômage est élevé dans l’État partie, en particulier parmi les jeunes, les personnes handicapées et les travailleurs migrants, et que les mesures correctives n’ont pas produit les résultats escomptés. Le Comité est également préoccupé par les disparités régionales en matière de chômage, qui touche beaucoup plus le sud du pays et les îles, et par le peu d’efficacité des mesures prises pour en venir à bout (art. 6).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intensifier ses efforts pour lutter efficacement contre le chômage, notamment en ajustant, le cas échéant, les programmes et plans d ’ action existants et en les mettant en œuvre, y compris ceux qui concernent les réformes du marché du travail, de façon à faire entrer les chômeurs dans le marché de l ’ emploi. À cet égard, l ’ État partie est encouragé à accorder une attention particulière aux groupes qui sont plus exposés au chômage, à savoir les jeunes, les personnes handicapées et les travailleurs migrants. Le Comité recommande également à l ’ État partie de prendre des mesures pour améliorer de manière substantielle l ’ efficacité de ses programmes afin de garantir le respect, la protection et l ’ exercice du droit au travail de ceux qui vivent dans les provinces méridionales et dans les îles de l ’ État partie.

Emploi des femmes

Le Comité est préoccupé de constater que les femmes présentent un taux d’emploi sensiblement inférieur à celui des hommes, en particulier dans le sud du pays. Il note également avec préoccupation que les femmes sont cantonnées dans l’économie informelle et dans les secteurs faiblement rémunérés, ce qui entretient la ségrégation verticale et horizontale entre les hommes et les femmes sur le marché du travail et l’écart de rémunération qui existe entre ces personnes. Le Comité note aussi avec préoccupation que le taux d’emploi des femmes, déjà faible avant la crise financière, a encore chuté avec les mesures d’austérité (art. 3, 6 et 7).

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures efficaces pour faire augmenter le taux d ’ emploi des femmes, et d ’ accorder dans ce cadre une attention particulière à la situation des femmes dans le sud du pays. À cet égard, l ’ État partie devrait notamment lancer des programmes d ’ enseignement et de formation destinés à réduire la ségrégation entre les sexes sur le marché du travail, encourager les femmes à opter pour les métiers traditionnellement réservés aux hommes et envisager de mettre en place des mesures incitatives à l ’ endroit des employeurs. Le Comité recommande également à l ’ État partie de veiller à ce que les mesures d ’ austérité ne nuisent pas de manière disproportionnée à l ’ emploi des femmes .

Économie informelle

Le Comité constate une nouvelle fois avec préoccupation que les personnes qui travaillent dans l’économie informelle sont extrêmement nombreuses et que ces personnes ne sont pas suffisamment couvertes par la législation du travail et la législation relative à la protection sociale. Il note en outre avec préoccupation la politique répressive de l’État partie à l’égard de l’économie informelle (art. 7).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter une approche globale à l ’ é gard de l ’ économie informelle . Il l ’ invite à prendre toutes les mesures voulues pour réduire progressivement l ’ ampleur de l ’ économie informelle et créer davantage d ’ emplois sur le marché du travail officiel. Dans l ’ intervalle, l ’ État partie est encouragé à prendre des mesures pour que les personnes travaillant dans l ’ économie informelle jouissent des droits fondamentaux du travail et d ’ une protection sociale de base. À cet égard, le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur la recommandation (n o  204) de l ’ Organisation internationale du Travail concernant la transition de l ’ économie informelle vers l ’ économie formelle, 2015, ainsi que sur la déclaration du  Comité intitulée Les socles de protection sociale : un élément essentiel du droit à la sécurité sociale et des objectifs de développement durable (2015) .

Conditions de travail justes et favorables

Le Comité note que l’État partie a instauré un salaire horaire minimum, mais est préoccupé par l’absence de salaire mensuel minimum pour les groupes de travailleurs qui ne relèvent pas d’une convention collective. Il constate en outre avec préoccupation que la législation de l’État partie ne garantit pas le principe de l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale (art. 7).

Le Comité recommande à l ’ État partie de fixer un salaire mensuel minimum qui soit indexé sur le coût de la vie et garantisse à tous les travailleurs et à leur famille une vie décente. Il renouvelle également sa recommandation tendant à ce que l ’ État partie fasse sans plus tarder inscrire expressément dans le Code du travail le principe de l ’ égalité de rémunération des hommes et des femmes pour un travail de valeur égale, et mette en place un dispositif pour faire respecter ce principe.

Droits syndicaux

Le Comité regrette qu’aucune loi n’encadre les droits syndicaux dans l’État partie et l’absence d’informations sur le droit de grève (art. 8).

Le Comité recommande à l ’ État partie de se doter d ’ un cadre juridique réglementant les droits syndicaux et le droit de grève, conformément à l ’ article 8 du Pacte, et de fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations sur la jouissance effective de ces droits.

Sécurité sociale

Le Comité note avec préoccupation que la forte réduction des dépenses sociales et des budgets alloués aux services essentiels, opérée pendant la crise financière, a eu des effets disproportionnés sur les personnes et les groupes défavorisés et marginalisés. Il est également préoccupé par la persistance de disparités régionales dans les dépenses sociales par habitant et dans la fourniture de services sociaux. Le Comité se déclare en outre préoccupé par l’insuffisance des prestations de chômage (art. 9).

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De prendre sans délai des mesures pour atténuer les effets de la réduction des dépenses sociales et pour rétablir pleinement les crédits budgétaires alloués aux principaux fonds nationaux d ’ intervention sociale, précisément le Fonds national pour les politiques sociales et le Fonds national pour les personnes dépendantes ;

b) De redoubler d ’ effort dans l ’ allocation des ressources pour que les dépenses sociales par habitant et la prestation de services sociaux se fassent dans le respect du principe de non-discrimination sur l ’ ensemble du territoire ;

c) De veiller à ce que les prestations sociales, y compris les prestations de chômage, soient indexées sur le coût de la vie et garantissent aux bénéficiaires et à leur famille un niveau de vie suffisant.

Violence à l’égard des femmes et des filles

Le Comité note avec préoccupation que la violence intrafamiliale contre les femmes et les filles reste très répandue dans l’État partie, en dépit des nombreuses mesures législatives et politiques prises pour y mettre un terme. Le Comité note également avec préoccupation que les mesures adoptées ne tiennent pas compte de la situation des femmes et des filles handicapées, qui sont particulièrement exposées à la violence intrafamiliale (art. 10).

Le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ effort pour combattre la violence faite aux femmes et aux filles et poursuivre ceux qui se livrent à cette violence. À cet égard, il lui demande de garantir l ’ application effective des lois pertinentes et l ’ affectation de fonds suffisants aux plans d ’ action, dont le plan d ’ action de lutte contre les violences sexuelles et les violences sexistes. En outre, le Comité recommande à l ’ État partie de renforcer ses campagnes de sensibilisation du public à la violence intrafamiliale ainsi que l ’ appui dont bénéficient les victimes de violence intrafamiliale, notamment en facilitant l ’ accès de ces dernières à des services adéquats pour leur rétablissement et de conseil et à d ’ autres formes de réadaptation. Le Comité appelle tout particulièrement l ’ attention de l ’ État partie sur la violence intrafamiliale dont sont victimes les femmes et les filles handicapées et lui recommande de leur faciliter l ’ accès à des mécanismes de plainte et de veiller à ce qu ’ elles bénéficient d ’ une aide et d ’ un appui appropriés.

Pauvreté

Le Comité constate avec préoccupation que le taux de pauvreté a augmenté au cours des dernières années, en particulier dans le contexte de la crise financière. Il juge particulièrement préoccupants le taux élevé de pauvreté des enfants et les disparités régionales dans la prévalence de la pauvreté, ainsi que l’accroissement des inégalités de revenus à l’échelle du pays (art. 11).

Le Comité prie instamment l ’ État partie d ’ intensifier ses efforts pour combattre la pauvreté, et d ’ accorder dans ce cadre une attention particulière à la pauvreté des enfants et à la pauvreté dans les provinces méridionales. Il lui recommande notamment de renforcer l ’ aide sociale et financière aux familles vulnérables et d ’ élaborer des programmes de réduction de la pauvreté fondés sur les droits de l ’ homme, en tenant compte de la déclaration du Comité intitulée La  pauvreté et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/2001/10).

Droit au logement

Le Comité demeure préoccupé par la pénurie de logements abordables et de logements sociaux et par le fait que, en pratique, les Roms sont privés d’accès aux logements sociaux. Il est également préoccupé par le nombre croissant de sans-abri dans l’État partie et par l’insuffisance des mesures prises pour combattre ce phénomène (art. 11).

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ adopter une législation nationale d ’ ensemble en matière de logement, dont une loi sur le contrôle des loyers destinée à promouvoir les logements à loyer abordable, afin de répondre à la demande des familles pauvres et des familles à faible revenu, et d ’ accroître d ’ urgence l ’ offre de logements à loyer abordable ;

b) D ’ adopter une stratégie nationale pour déterminer les causes et l ’ ampleur du phénomène des sans-abri, qui touche en particulier les étrangers, et de prendre des mesures plus efficaces contre ce phénomène ;

c) D ’ accroître l ’ offre de logements sociaux pour les personnes les plus démunies et d ’ abroger toute norme régionale ou d ’ abandonner toute politique instaurant des critères d ’ admissibilité au logement social qui entraînent une discrimination indirecte à l ’ égard des Roms et les empêchent d ’ accéder à ce type de  logement.

Expulsions forcées

Le Comité est préoccupé par l’absence de cadre juridique réglementant les expulsions ainsi que par l’augmentation du nombre d’expulsions forcées, qui visent en particulier les Roms et les personnes incapables de faire face à la hausse des loyers (art. 11).

Rappelant ses observations générales n o  4 (1991) sur le droit à un logement suffisant et n o  7 (1997) sur les expulsions forcées, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De se doter d ’ un cadre juridique concernant les expulsions qui soit conforme aux normes internationales ;

b) D ’ éviter de procéder à des expulsions forcées et, lorsque cela est nécessaire, de n ’ y recourir qu ’ en dernier ressort , après avoir écarté toutes les autres options et en veillant à ce que lesdites expulsions se fassent dans le respect des garanties de procédure requises ;

c) D ’ indemniser toutes les personnes ayant fait l ’ objet d ’ une expulsion forcée, y compris celles qui ont été expulsées en application de l ’ arrêté relatif à « l ’ état d ’ exception pour les nomades », déclaré illégal en 2011 par le Conseil d ’ État, et/ou de leur offrir un logement de remplacement.

Conditions de vie des Roms

Le Comité est préoccupé par les conditions de vie précaires des Roms, dont beaucoup vivent dans des zones d’établissement spontané ou dans des conditions de ségrégation de fait dans des campements qui leur sont réservés (art. 11).

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ appliquer effectivement la Stratégie nationale pour l ’ intégration des Roms, des Sintis et des gens du voyage aux niveaux national, provincial et local, et de prendre sans délai des mesures concrètes pour mettre fin à la ségrégation des Roms vivant dans des campements pour Roms, conformément à la décision prononcée en mai 2015 par le Tribunal de Rome ;

b) D ’ accorder la priorité à la régularisation des établissements spontanés et de trouver d ’ autres solutions à l ’ issue d ’ une véritable consultation des communautés roms concernées ;

c) De déterminer sans délai quels sont les besoins essentiels des personnes et des groupes défavorisés et marginalisés en matière de logement qu ’ il a l ’ obligation fondamentale de satisfaire, conformément aux déc isions de 2007 et de 2008 de la  Cour constitutionnelle ;

d) De veiller à ce que les communautés roms qui vivent dans des zones d ’ établissement spontané aient accès aux services de base, comme l ’ eau, l ’ électricité, l ’ évacuation des déchets et l ’ assainissement.

Droit à la santé

Le Comité est préoccupé par les disparités régionales dans l’accès aux services de soins de santé de base dont pâtissent les populations vivant dans les provinces méridionales, ainsi que par l’insuffisance des mesures prises par l’État partie pour y remédier. Il note également avec préoccupation qu’en raison des coupes budgétaires opérées au titre des mesures d’austérité, une proportion considérable de la population n’a plus accès aux services de santé du fait de l’augmentation des frais de santé. Le Comité est en outre préoccupé par les informations indiquant que la tendance serait à nouveau au placement en institution des personnes dépendantes et des personnes présentant un handicap intellectuel ou psychosocial (art. 12).

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De prendre des mesures concrètes pour garantir l ’ égalité d ’ accès aux services de soins de santé de base sur l ’ ensemble du territoire de façon à combler l ’ écart entre les provinces du nord et les provinces du sud de l ’ Italie en termes d ’ accès ;

b) De faire en sorte que les réformes adoptées ne limitent pas l ’ accès des personnes en raison de leur situation socioéconomique, en tenant compte de l ’ observation générale n o  14 (2000) du Comité sur le droit au meilleur état de santé susceptible d ’ être atteint ;

c) D ’ évaluer les effets de toute proposition de réduction budgétaire sur l ’ accès aux services de santé des personnes et des groupes les plus défavorisés et marginalisés ;

d) De mettre en place des systèmes de protection de remplacement au niveau de la communauté et de la famille pour la prise en charge des personnes dépendantes et des personnes présentant un handicap intellectuel ou psychosocial, et de veiller à ce que le placement en institution ne soit utilisé qu ’ en dernier ressort.

Interruption légale de grossesse

Le Comité constate avec préoccupation qu’en dépit de la loi no 194/78, qui autorise l’avortement, l’offre de services d’avortement et l’accès à ces services sont limités et que cette situation est encore aggravée par le nombre croissant d’agents de santé refusant de réaliser ce type d’intervention pour des raisons de conscience, ce qui conduit les femmes enceintes à recourir à des avortements non médicalisés (art. 12).

Le Comité recommande à l ’ État partie de garantir la pleine application de la loi n o 194/78 sur l ’ ensemble du territoire de l ’ État partie. Pour cela, il lui recommande d ’ adopter une procédure commune à toutes les provinces qui garantisse l ’ accès à l ’ avortement et à des services d ’ orientation appropriés, et de veiller à ce que l ’ objection de conscience opposée par les agents de santé n ’ empêche pas les femmes qui le souhaitent d ’ interrompre leur grossesse .

Obésité

Le Comité note avec préoccupation qu’un adulte sur dix est obèse et que les personnes qui sont les plus à risque sont celles qui ont un faible niveau d’instruction. Il note également avec préoccupation que l’obésité des enfants est en forte augmentation dans l’État partie (art. 12).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intensifier ses efforts pour combattre l ’ obésité, en particulier chez les enfants. Il lui recommande également d ’ augmenter les taxes sur les aliments à faible valeur nutritive et les boissons sucrées et de songer à adopter une législation stricte sur la commercialisation de tels produits, tout en améliorant l ’ accès à une alimentation saine.

Taux d’abandon scolaire

Le Comité constate avec préoccupation que, malgré quelques progrès, l’État partie continue d’afficher un taux d’abandon scolaire au cours des deux dernières années de l’enseignement secondaire supérieur à celui de la moyenne de l’Union européenne, et que ce phénomène est plus marqué dans les provinces méridionales (art. 13).

Le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ effort pour faire baisser le taux d ’ abandon scolaire au cours des deux dernières années de l ’ enseignement secondaire, conformément à la stratégie Europe 2020 qui tente de s ’ attaquer aux facteurs socioéconomiques pesant dans la décision des élèves d ’ arrêter leurs études prématurément et vise en priorité les personnes et les groupes les plus défavorisés et les plus marginalisés. Le Comité recommande également à l ’ État partie d ’ accorder une attention particulière aux abandons scolaires précoces dans les provinces méridionales.

Éducation inclusive

Le Comité est préoccupé par les statistiques fournies par l’État partie au cours du dialogue qui mettent en évidence le fort pourcentage de personnes handicapées parmi les élèves non scolarisés et le nombre peu élevé de personnes handicapées titulaires du diplôme de fin d’études secondaires. Il est en outre préoccupé par le fait qu’il existe toujours des obstacles physiques dans les écoles et qu’aucune formation sur l’éducation inclusive n’a été mise en place à l’intention des enseignants et des autres professionnels de l’éducation (art. 13 et 14).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accélérer l ’ adoption du projet de loi n o 2444 sur l ’ éducation inclusive. Il lui recommande également de prendre des mesures pour garantir la mise en œuvre concrète de l ’ éducation inclusive pour les enfants handicapés, parmi lesquelles : a) la formation de tous les enseignants (et pas uniquement des enseignants spécialisés) et de tous les professionnels de l ’ éducation ; b) l ’ élaboration de projets éducatifs personnalisés pour les élèves handicapés ; c) la mise à disposition dans les classes d ’ appareils ou d ’ un dispositif d ’ assistance ainsi que de supports et de programmes pédagogiques ; d) l ’ accessibilité physique des établissements scolaires ; e) l ’ enseignement de la langue des signes ; et f) l ’ allocation de ressources financières suffisantes.

Droits culturels

Le Comité regrette l’absence d’informations sur l’exercice effectif des droits énoncés à l’article 15 du Pacte, en particulier le droit visé à l’alinéa b) du paragraphe 1. Il note les efforts consentis par l’État partie pour enseigner l’italien aux enfants migrants et faciliter ainsi leur intégration, mais est préoccupé par le peu d’efforts faits pour permettre à ces derniers de préserver leur langue maternelle (art. 15).

Le Comité demande à l ’ État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations sur l ’ exercice du droit de chacun de participer à la vie culturelle, compte tenu de l ’ observation générale n o  21 (2009) du Comité sur le droit de chacun de participer à la vie culturelle. Il lui recommande également d ’ intensifier ses efforts pour aider les enfants d ’ immigrés de deuxième génération à préserver leur langue maternelle et à promouvoir leurs traditions culturelles.

D.Autres recommandations

Le Comité recommande à l ’ État partie de collecter des données et d ’ utiliser des statistiques ainsi que de promouvoir la collecte de données et l ’ utilisation de statistiques pour établir des indicateurs des droits de l ’ homme, y compris les droits éco nomiques, sociaux et culturels.

À cet égard, le Comité renvoie l ’ État partie au cadre conceptuel et méthodologique pour la définition d ’ indicateurs des droits de l ’ homme élaboré par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme (HRI/MC/2008/3). Le Comité demande à l ’ État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des données statistiques annuelles comparatives sur l ’ exercice de chaque droit consacré par le Pacte, ventilées par âge, sexe, origine ethnique, population urbaine et rurale, handicap et autres critères pertinents.

Le Comité prie l ’ État partie de traduire les présentes observations finales dans la langue officielle et de les diffuser largement à tous les niveaux de la société, en particulier auprès des parlementaires, des fonctionnaires et des autorités judiciaires, et de l ’ informer, dans son prochain rapport périodique, des mesures prises pour y donner suite. Le Comité invite aussi l ’ État partie à associer les organisations non gouvernementales et d ’ autres membres de la société civile au processus de consultation nationale préalable à la soumission de son prochain rapport périodique.

Le Comité demande à l ’ État partie de soumettre son sixième rapport périodique, établi conformément aux directives adoptées par le Comité en 2008 (E/C.12/2008/2), le 31 octobre 2020 au plus tard. Il l ’ invite également à soumettre son document de base commun, élaboré conformément aux directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I).