Nations Unies

E/C.12/2010/SR.16

Conseil économique et social

Distr. générale

31 mai 2010

Original: français

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Quarante - quatr ième session

Compte rendu analytique de la 16 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mercredi 12 mai 2010, à 15 heures

Président: M. Marchán Romero

Sommaire

Examen des rapports

a)Rapports présentés par les États parties conformément aux articles 16 et 17 du Pacte (suite)

Deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques de l’Afghanistan (suite)

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports

a) Rapports présentés par les États pa rties conformément aux articles 16 et 17 du Pacte (point 6 de l’ordre du jour)(suite)

Deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques de l’Afghanistan (E/C.12/AFG/2-4); document de base (HRI/CORE/AFG/2007); liste des points à traiter (E/C.12/AFG/Q/2-4); réponses écrites du Gouvernement afghan à la liste des points à traiter (E/C.12/AFG/Q/2-4/Add.1) (suite)

1.Sur l’invitation du Président, la délégation afghane reprend place à la table du Comité.

Articles 1er à 5 du Pacte (suite)

2.M. Hashimzai (Afghanistan) dit que la loi anticorruption adoptée par le Parlement est en partie appliquée, avec des résultats variables. Conformément à cette loi et à la Convention des Nations Unies contre la corruption, un organisme chargé de la lutte anticorruption a été créé. Les responsables publics ne peuvent plus désigner qui ils souhaitent à des postes, et les recrutements se font désormais sur concours. Une mesure de relèvement des salaires des fonctionnaires est actuellement à l’étude. Les membres du Gouvernement sont tenus de déclarer leur patrimoine. Un service chargé uniquement des affaires de corruption a été créé au sein du Bureau du Procureur général. La lutte contre la corruption est une priorité pour les pouvoirs publics étant donné le coût élevé de ce fléau pour le pays.

3.Concernant la possibilité d’élaborer une loi globale sur la lutte contre la discrimination, M. Hashimzai indique qu’une telle loi n’est pas d’actualité mais pourrait être envisagée à l’avenir. Concernant les affaires de violence familiale, il précise que des affaires de ce type sont traitées par les tribunaux mais sont rarement rendues publiques. La mise en place envisagée d’un système de publication qui permettrait d’informer le public contribuerait à éviter la corruption des juges.

4.Tous les secteurs concernés de la société ont été associés à l’élaboration du rapport à l’examen, dès le début du processus, dans le cadre du groupe de travail constitué à cet effet. Les pouvoirs publics veillent à ce que le Pacte soit appliqué sur l’ensemble du territoire, y compris dans les provinces, par l’intermédiaire des ministères compétents − notamment le Ministère des affaires sociales − et de leurs équipes locales.

Articles 6 à 9 du Pacte

5.M. Texier n’est pas parvenu à se faire une idée précise du taux de chômage dans l’État partie, qui ne semble pas disposer des instruments nécessaires pour effectuer des études statistiques sur des aspects comme la part respective dans l’emploi du secteur formel et du secteur informel, le taux de chômage de chaque secteur et les différences de taux de chômage entre les hommes et les femmes. Il demande si l’Afghanistan bénéficie d’une assistance de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur toutes ces questions. Il souhaiterait également davantage de précisions sur les mesures concrètes qui ont été prises pour lutter contre le chômage, notamment dans le domaine agricole.

6.Concernant le travail forcé, M. Texier souhaiterait savoir si l’État partie a tenu compte des observations de la Commission d’experts de l’OIT l’invitant à réexaminer, à la lumière de la Convention no 105 de l’OIT sur l’abolition du travail forcé, certaines dispositions pénales comportant l’obligation de travailler en tant que peine réprimant l’expression d’opinions politiques ou la manifestation d’une opposition idéologique, et priant le Gouvernement afghan, au titre de la Convention no 111 concernant la discrimination (emploi et profession), d’inclure dans la législation une définition de la notion de discrimination de manière à faciliter la mise en œuvre des dispositions antidiscriminatoires du Code du travail.

7.Sur le travail des enfants, étant donné la proportion très importante d’enfants qui travaillent, voire sont contraints au travail forcé, M. Texier voudrait des précisions sur les dispositions prises en vue de mettre fin progressivement à ce travail, et estime qu’un plan d’action spécifique sur cette question pourrait être souhaitable.

8.M. Texier aimerait savoir s’il existe un salaire minimum, et si ce salaire permet de vivre de façon décente avec une famille. Il souhaiterait une estimation en pourcentage des différences de salaire entre hommes et femmes. Quelles sont les mesures prises pour tenter de réduire ces écarts? Les femmes ont-elles accès à toutes les professions, à tous les niveaux, y compris à des métiers de la fonction publique, notamment au sein de l’appareil judiciaire et de la police?

9.M. Texier ne parvient pas à savoir à la lecture du rapport à l’examen si le droit de grève existe ou non, et si ce droit est réglementé et de quelle manière. Comment se fait la négociation collective? En cas de désaccord, existe-t-il des tribunaux du travail et quelle est leur composition? Si la négociation n’aboutit pas, de quelles possibilités les travailleurs disposent-ils pour se syndiquer et éventuellement faire grève? Faisant observer que le rapport ne comporte aucune indication sur les accidents du travail, M. Texier souhaiterait des informations sur la fréquence et la gravité de ces accidents, et sur l’existence d’un système d’inspection du travail.

10.M me Bras Gomes souhaiterait savoir quelles mesures, de l’avis de la délégation afghane, pourraient être prises par l’État partie afin d’empêcher l’exploitation des travailleurs du secteur journalier, qui représentent 34 % des hommes actifs dans les villes et 58 % dans les campagnes. Une protection sociale de base des travailleurs agricoles en matière de retraite et d’assurance santé est indispensable si l’État partie veut pouvoir miser sur un secteur agricole dynamique pour son développement. Mme Bras Gomes aimerait savoir également si l’État partie a envisagé la possibilité de demander une aide internationale ciblée concernant la mise en place d’un système national de sécurité sociale.

11.M. Abashidze s’enquiert des mesures prises pour mettre fin à certaines pratiques dans le recrutement des fonctionnaires consistant, d’après certaines informations, à accorder la préférence aux candidats qui partagent l’orientation politique du parti dominant, en dépit du fait que les dispositions constitutionnelles et législatives sur l’accès à la fonction publique prévoient des critères de sélection comme la formation, l’expérience professionnelle et le recrutement par concours.

12.M. Schrijver aimeraitdisposer de chiffres plus précis concernant le taux de chômage dans la population active, en particulier chez les jeunes. Il souhaiterait des renseignements complémentaires sur la question du secteur informel, dans lequel la condition de travailleur journalier et le travail des enfants semblent très répandus, et sur les mesures prises pour développer l’emploi formel.

13.M. Zhan Daode souligne les efforts accomplis par l’État partie pour promouvoir les droits économiques, sociaux et culturels dans un contexte politique encore instable. Il demande à propos du paragraphe 25 du rapport à l’examen, qui indique que le taux de chômage en Afghanistan serait de 33 % et que les pouvoirs publics continuent de s’efforcer de développer l’économie en réduisant la pauvreté et le chômage, quel est le chiffre actuel et quelles sont les mesures adoptées pour lutter contre le chômage.

14.M. Kedzia s’enquiert des efforts déployés par l’État partie pour réunir les capacités propres à garantir la réelle application de la législation du travail. Il souhaite aussi des précisions sur la mesure dans laquelle les enfants qui travaillent − phénomène répandu dans le pays − sont protégés contre la discrimination, l’exploitation et les répercussions néfastes de leur travail sur la santé. Se référant aux informations communiquées aux paragraphes 49 et 50 du rapport à l’examen, il demande si l’appui technique fourni par le Bureau de l’OIT à Kaboul se limite à la capitale ou si le reste du pays est concerné, et si de nouveaux programmes sont envisagés pour faciliter la création du mouvement syndical, partenaire important du développement social. Il souhaite également des précisions quant au processus de négociation collective instauré dans le cadre du Ministère du travail et des affaires sociales, des martyrs et des handicapés (MoLSAMD).

15.M me Bonoan-Dandan s’inquiète de la place réservée à l’agriculture et à l’élevage dans la Stratégie nationale de développement de l’Afghanistan (ANDS), des répercussions de la sécheresse sur la production et le revenu des agriculteurs, et du soutien que le Gouvernement apporte à ces derniers. Elle souhaite des informations complémentaires sur la stratégie nationale de placement adoptée en faveur de l’emploi. Par ailleurs, la formation technique et professionnelle, qui a été dispensée à 800 000 personnes environ, lui semble bien dérisoire compte tenu du nombre de personnes sans emploi qui ont besoin d’être aidées dans le pays.

16.Évoquant la situation des Afghans contraints au travail forcé par leurs employeurs des pays voisins, Mme Bonoan-Dandan relève la déclaration du Vice-Ministre du travail et des affaires sociales, des martyrs et des handicapés, selon laquelle les Afghans ayant émigré illégalement à l’étranger ne seraient pas de son ressort, et rappelle à l’État partie qu’il est responsable de la protection de ses citoyens, dans le pays et hors du pays. Elle demande à cet égard s’il est envisageable que l’État partie fasse pression avec diplomatie sur son voisin, la République islamique d’Iran, pour que les nombreux travailleurs afghans − dont un grand nombre de femmes − sans papiers et exposés à divers abus puissent rentrer dans leur pays dans la dignité.

La séance est suspendue à 15 h 55; elle est reprise à 16 h 15.

17.M. Muhmand (Afghanistan) indique que le pays compte 3,5 millions de jeunes sans emploi. L’État partie, qui a ratifié quatre nouvelles conventions de l’OIT en 2009, coopère étroitement avec le Bureau de l’OIT à Kaboul et fait porter son action sur les 34 provinces afghanes. Tant le travail forcé que le travail des enfants sont interdits par la législation nationale. L’un des groupes prioritaires d’enfants visés par la Stratégie nationale en faveur des enfants à risque est précisément celui des enfants qui travaillent, et le Gouvernement afghan bénéficie de l’aide de l’OIT, du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et d’organisations non gouvernementales dans l’action qu’il mène dans ce domaine.

18.Sur les questions relatives aux salaires, M. Muhmand indique que le salaire minimum de 65 dollars ne suffit pas pour vivre décemment, raison pour laquelle il est prévu de réformer l’échelle des salaires et de le porter à 125 dollars. La loi afghane proscrit tout écart de rémunération entre hommes et femmes. Par ailleurs, tant la négociation collective que les conflits du travail se règlent par la mise en présence des trois parties en jeu − Gouvernement, employeurs, employés − et, si le différend persiste, les parties peuvent renvoyer l’affaire devant les tribunaux.

19.M. Hashimzai (Afghanistan) précise qu’en cas de violation de la législation du travail (harcèlement sexuel, enfant en situation de travail forcé, accident du travail, mauvais traitements envers un employé, notamment), la procédure consiste à saisir le MoLSAMD, qui tente de régler l’affaire et, s’il n’y parvient pas, la renvoie devant les tribunaux de droit commun. Il est prévu de mettre en place des tribunaux du travail, ainsi qu’un dispositif de surveillance des conditions de travail dans le pays.

20.De même, le Gouvernement afghan est déterminé à instaurer un système de sécurité sociale, mais il a besoin pour ce faire d’un soutien financier international. Or, dans l’aide qu’elle apporte à l’Afghanistan, la communauté internationale s’en tient à sa propre stratégie, à laquelle les autorités afghanes sont tenues de se conformer. Le projet de système de sécurité sociale est d’une ampleur telle que la communauté internationale montre encore des réticences.

21.M. Hashimzai ajoute qu’un fonds spécial a été mis en place pour subventionner le paiement des salaires des policiers et du personnel pénitentiaire, qui ont été revus à la hausse. Il précise en outre que l’article 50 de la Constitution garantit l’égalité de salaire pour les hommes et les femmes, et que désormais, dans les procédures de recrutement, la décision revient non plus à l’employeur mais à une commission administrative pleinement indépendante.

22.M. Hashimzai confirme que la plupart des ressources du pays ont été consacrées à la guerre mais que le Gouvernement afghan est aujourd’hui déterminé à lutter sur d’autres fronts, notamment la protection sociale, l’application de la loi ou encore le fonctionnement correct du système judiciaire. Par ailleurs, toute personne lésée par une loi a la possibilité de déposer plainte et c’est cette possibilité même qui donne sa valeur à la loi et à l’État qui l’a adoptée. La loi interdit le travail des enfants quel qu’il soit et le travail forcé des enfants est un délit. L’assistance aux enfants des rues et aux enfants vulnérables en général est l’affaire d’un service spécialisé de l’État mais aussi du Croissant-Rouge et d’autres organisations non gouvernementales.

23.Le droit de grève et de manifestation existe en Afghanistan: il est seulement assorti de certaines règles, comme informer les autorités vingt-quatre heures à l’avance. M. Hashimzai n’a connaissance d’aucun cas où la police aurait réagi face à des manifestants ou des grévistes. Enfin, il rappelle que l’ANDS couvre tous les aspects de la vie sociale et repose sur les trois piliers que sont la sécurité, l’état de droit et le développement économique et social et que, s’agissant du dernier, une grande partie des programmes concerne le secteur agricole.

24.M. Muhmand (Afghanistan) confirme que le Gouvernement afghan entend modifier sa législation du travail très prochainement pour en éliminer les défauts. Le pays compte 22 centres de formation professionnelle disséminés sur l’ensemble du territoire, qui forment actuellement 7 000 jeunes. En 2009, 200 000 jeunes ont été diplômés grâce à des programmes de développement des compétences du MoLSAMD, dont 116 000 ont trouvé un emploi, certains étant devenus eux-mêmes des formateurs. Au cours des trente dernières années, les professionnels qualifiés ont quitté l’Afghanistan, d’où la pénurie de personnel qualifié; mais aujourd’hui, grâce à ces programmes, il y a de bons techniciens dans divers domaines. Pour les besoins de sa reconstruction, le pays peut encore aujourd’hui faire appel à une main-d’œuvre qualifiée étrangère à laquelle il délivre des permis de travail, pour autant qu’aucun Afghan ne possède les qualifications requises. Le Gouvernement afghan ne souhaite pas que les jeunes émigrent illégalement; toutefois, lorsque des Afghans se trouvent illégalement dans des situations difficiles à l’étranger, notamment dans certains pays comme l’Arabie saoudite, il leur apporte son aide par l’intermédiaire de ses ambassades.

25.M. Texier rappelle que si la loi interdit les différences de salaires entre les hommes et les femmes conformément à l’article 7 du Pacte, les femmes continuent de percevoir des salaires inférieurs à ceux des hommes. Il souhaite donc savoir quel est exactement l’écart entre ces salaires, pourquoi un tel écart existe et quelles sont les mesures prises pour le combler. Par ailleurs, s’il est intéressant de connaître le chiffre du chômage, le Comité a besoin de savoir ce que les autorités font pour améliorer l’emploi, en particulier dans le secteur agricole, et s’il existe des programmes à cette fin. En ce qui concerne le salaire minimum, il s’étonne de la coexistence de deux chiffres qui vont du simple au double (de 65 à 125 dollars) et explique que ce que le Comité attend en plus de ces chiffres, c’est de savoir si, en Afghanistan, on peut se nourrir, se vêtir et se loger avec 125 dollars. Il conviendra donc qu’à l’avenir, dans ses rapports périodiques, l’État partie fournisse non seulement des statistiques mais aussi des éléments très concrets d’appréciation de la situation.

26.M me Bras Gomes, en dépit des efforts faits par la délégation afghane, s’interroge sur l’écart qui subsiste entre les questions posées et les réponses données. Bien que cette pratique soit un délit, le harcèlement sexuel n’est pas expressément visé par une loi susceptible de soutenir les femmes qui déposent plainte; il faut donc que le pays mette en place des mesures ciblées, par exemple sur le harcèlement sexuel au travail. Mme Bras Gomes a cru comprendre que, selon la délégation, la communauté internationale s’intéressait moins à l’instauration d’une démarche fondée sur les droits de l’homme qu’au financement de programmes de développement. Elle demande pourquoi, alors qu’il met en place actuellement une stratégie pour l’emploi en partenariat avec l’OIT, le Gouvernement afghan n’agit pas de même pour la sécurité sociale, en s’appuyant par exemple sur l’Observation générale no 19 du Comité sur le droit à la sécurité sociale.

27.Le P résident, s’exprimant en sa qualité de membre du Comité, souhaite avoir de plus amples informations sur la situation de la femme en Afghanistan, notamment des données chiffrées sur les femmes occupant des postes élevés, en particulier dans les hautes sphères de l’État. De plus, il regrette le manque de précision des réponses apportées par la délégation afghane sur le secteur informel dont les employés, par définition, ne sont pas protégés par des conventions internationales.

28.M me Bonoan-Dandan rappelle qu’elle souhaite savoir de quelles parties de l’ANDS relèvent d’une part, les droits économiques, sociaux et culturels, et d’autre part, l’agriculture et l’élevage. Elle tient par ailleurs à préciser qu’elle n’a pas dit que le travail forcé existait en Afghanistan mais que souvent, les Afghans en étaient victimes à l’étranger.

29.M. Hashimzai (Afghanistan) explique que ce sont les deuxième et troisième piliers de l’ANDS qui traitent des questions évoquées par Mme Bonoan-Dandan. Le troisième pilier, qui porte sur le développement économique et social, consacre deux chapitres à l’agriculture, détaillant les objectifs en matière d’aide et fixant des délais précis pour y parvenir. Un des objectifs à atteindre consiste, d’ici à 2013, à fournir une terre à tous les paysans qui n’en ont pas. Dans le cadre de l’ANDS, le Ministère de l’agriculture œuvre actuellement à définir les modalités de mise en œuvre de ces dispositions. L’ANDS fixe également des critères précis en matière de justice. Elle prévoit par exemple la construction d’un certain nombre de prisons d’ici à 2013, dont des établissements séparés pour les femmes et les mineurs; malheureusement, les objectifs fixés ne seront pas atteints puisque six prisons seulement ont été construites sur l’ensemble du territoire. Des progrès sont malgré tout réalisés, en particulier grâce à l’aide étrangère dont bénéficie le pays.

30.M me Burhani (Afghanistan) rappelle que l’engagement de l’État afghan en matière de protection et de promotion des droits de l’homme, donc de la femme, se manifeste d’une part, dans l’article 22 de la Constitution qui énonce l’égalité entre l’homme et la femme et, d’autre part, dans l’adoption d’un Plan d’action national en faveur des femmes − incluant la prise en compte systématique de la problématique hommes-femmes dans toutes les structures de l’État − qui est axé sur les domaines ci-après essentiels pour améliorer la condition de la femme dans le pays: sécurité; protection juridique et droits de l’homme; exercice de l’autorité et participation politique; économie, travail et réduction de la pauvreté; santé et éducation. Actuellement, le Parlement est constitué de 28 % de femmes; on trouve également des femmes aux postes de ministre, vice-ministre, gouverneur ou ambassadeur ainsi que dans de nombreux secteurs d’activité du pays, y compris les partis politiques. La Commission indépendante afghane des droits de l’homme est également dirigée par une femme. Le pourcentage de diplômées de l’enseignement supérieur est passé de 16,7 % pour la période 2007-2008 à 19,4 % en 2008-2009 et celui des enseignantes respectivement de 6,9 % à 8 %. Ce sont là des progrès considérables lorsqu’on sait qu’en 2001, les femmes ne pouvaient exercer leurs droits fondamentaux en tant qu’êtres humains à part entière.

31.M. Hashimzai (Afghanistan) dit que certains articles de la loi relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes traitent du harcèlement sexuel et fixent les peines encourues. Dans le domaine du travail et de la sécurité sociale, l’Afghanistan bénéficiera de l’aide de l’OIT sous forme de conseils et d’assistance mais pas sous forme de financement. M. Hashimzai rappelle que certaines catégories de salariés, comme les fonctionnaires ou les employés du secteur manufacturier par exemple, sont déjà affiliées à un système de sécurité sociale. L’objectif du Gouvernement afghan est donc de généraliser ce système à l’ensemble de la population, y compris aux chômeurs, en vue de lutter contre la pauvreté, toute nouvelle source éventuelle de revenus étant d’ailleurs affectée à ce projet. Le secteur informel est constitué de millions de personnes, essentiellement dans le secteur de l’agriculture.

Articles 10 à 12 du Pacte

32.M. Atangana voudrait savoir si en Afghanistan, les veuves sont dépossédées de leurs biens et confiées en mariage au frère de leur défunt mari, ou faute de frère, à un membre de la famille éloignée. Dans l’affirmative, il demande ce que fait l’État partie pour améliorer le sort peu enviable de ces femmes.

33.M. Atangana apprécierait que la délégation afghane fournisse des renseignements sur la situation des enfants des rues, indique les mesures prises pour protéger ces enfants de l’exploitation économique et sociale et précise si les châtiments corporels sont interdits ou non au sein de la famille.

34.Enfin, faisant référence à la réponse écrite du Gouvernement afghan à la question no 26 de la liste des points à traiter, M. Atangana souhaiterait savoir quelle a été la décision du tribunal saisi pour la première fois d’une affaire de violence familiale par la nouvelle unité chargée de la violence faite aux femmes qui relève du Bureau du Procureur général.

35.M me  Barahona Riera se demande si les 30 % du budget national que le Gouvernement afghan annonce vouloir consacrer aux femmes alimenteront uniquement le programme national en faveur des femmes − ce qui serait un budget particulièrement conséquent − ou couvriront toutes les dépenses sociales engagées par l’État partie dans le domaine de la santé et de l’éducation, dont les femmes bénéficieront également.

36.Notant que de nombreuses lois sur le statut personnel sont à la fois contraires aux principes d’égalité ancrés dans la Constitution et discriminatoires à l’égard des femmes, Mme Barahona Riera voudrait savoir si l’État partie envisage de réformer ces lois pour les aligner sur la loi suprême afin que les femmes puissent réellement dénoncer les actes de violence familiale dont elles sont victimes. Dans ces conditions, les femmes mariées victimes de viol oseront peut-être porter plainte sans avoir peur d’être accusées d’adultère et sanctionnées en vertu de la charia. Il s’agirait également, selon Mme Barahona Riera, de lutter contre la corruption du personnel judiciaire et des forces de police − et rompre ainsi avec la loi du silence et la discrimination à l’égard des femmes − pour que les femmes et les enfants victimes de la traite puissent enfin se faire entendre.

37.Mme Barahona Riera apprécierait de savoir si le système de santé public couvre l’ensemble des services de base offerts à la population et si l’État partie veille à ce que davantage d’infirmières spécialisées dans la santé sexuelle et procréative soient formées en vue de la diminution du taux de mortalité maternelle et infantile, qui est particulièrement élevé en Afghanistan.

38.M. Dasgupta demande quelles mesures l’État partie a prises pour lutter contre la traite des enfants à des fins d’exploitation sexuelle et commerciale, et notamment pour poursuivre les auteurs de la traite, offrir une protection aux victimes et aider celles-ci à se réinsérer.

39.M. Abashidze regrette que la délégation afghane ne fournisse pas d’éléments de réponse concrets qui permettent au Comité de se faire une idée précise de la situation dans l’État partie. Aussi souhaiterait-il savoir quelles dispositions spécifiques l’État partie a adoptées pour garantir la protection de la famille.

40.M. Pillay demande quels efforts ont été mis en œuvre par l’État partie pour abaisser le taux de pauvreté, qui, se situant à 36 % de la population en 2008, était particulièrement alarmant. La délégation afghane pourrait-elle indiquer à combien s’élève ce taux actuellement? M. Pillay cite à ce sujet des sources dignes de foi qui semblent indiquer que près de 40 % de personnes supplémentaires pourraient sombrer dans la pauvreté en cas de catastrophe naturelle ou de maladie, et regrette que les stratégies de réduction de la pauvreté mises en œuvre par l’État partie ne cherchent pas à mieux identifier les raisons pour lesquelles ces personnes se trouvent dans un tel dénuement ni n’intègrent une composante «droits de l’homme». Il souhaite en particulier savoir si lesdites stratégies ciblent tout particulièrement les plus démunis, comme les femmes et les enfants, les handicapés ou les personnes déplacées, entre autres. Il voudrait en outre savoir si 44 % de la population vit dans l’insécurité alimentaire et la raison pour laquelle le programme «Sécurité alimentaire pour tous» n’a toujours pas été mis en œuvre.

41.Pour ce qui est du droit à un logement adéquat, M. Pillay apprécie l’honnêteté avec laquelle l’État partie a dépeint les conditions particulièrement difficiles dans les zones rurales et urbaines, mais regrette que celui-ci n’ait pas tenu compte des recommandations figurant dans le rapport du Rapporteur spécial sur le droit à un logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant (E/CN.4/2004/48/Add.2), M. Khotari, qui préconise qu’une attention particulière soit accordée aux besoins et aux droits des femmes et des groupes vulnérables, comme les personnes déplacées, les nomades ou encore les pauvres. À propos de personnes déplacées, M. Pillay note avec préoccupation que 60 % à 75 % de la ville de Kaboul se compose d’abris de fortune et que la population n’a pas accès aux services sanitaires et sociaux de base, et voudrait savoir comment l’État partie entend pallier ce problème.

42.Faisant ensuite référence au paragraphe 95 du rapport à l’examen où il est question d’expulsions forcées et d’impunité, M. Pillay demande si l’État partie a l’intention de donner suite à la recommandation de M. Khotari d’instaurer un moratoire sur ces expulsions en attendant la définition d’une politique en la matière; de mettre en place des mécanismes appropriés pour contrôler la mise en œuvre du droit à un logement convenable, par le biais, par exemple, du renforcement des capacités de la Commission afghane indépendante des droits de l’homme, et si le Gouvernement afghan a l’intention d’adopter une loi-cadre en la matière et de s’inspirer pour ce faire de l’Observation générale no 7 du Comité sur le droit à un logement suffisant: expulsions forcées.

43.Se référant enfin à la question no 30 de la liste des points à traiter à laquelle la délégation afghane n’a pas apporté de réponse, M. Pillay souhaiterait savoir quels ont été les effets concrets de la nouvelle loi sur l’administration des terres et si celle-ci a permis de résoudre un certain nombre de litiges fonciers.

44.M. Riedel demande si les objectifs fixés dans le cadre du Pacte pour l’Afghanistan et de l’ANDS − à savoir de faire en sorte que 90 % de la population afghane ait accès aux soins de santé primaire d’ici 2010, que tous les enfants de moins de 5 ans soient vaccinés et que le taux de mortalité infantile baisse de 20 % − ont été atteints. Il souhaiterait savoir en outre ce que compte faire l’État partie pour veiller à ce que toutes les parturientes aient accès à des services spécialisés pour accoucher et pour lutter contre la pratique des mariages d’enfants ainsi que les grossesses précoces qui en résultent, qui mettent en péril à la fois la vie de la mère et celle de l’enfant.

45.M. Riedel apprécierait enfin de connaître les effets concrets de l’accroissement du nombre de services de santé mobiles et demande à combien s’élèvent en général les frais de santé non couverts par le système de santé public.

46.M. Tirado Mejia se demande si l’État partie envisage de renforcer la présence féminine au sein des équipes médicales spécialisées de manière à ce que les femmes puissent avoir un plus large accès aux services de santé de proximité.

47.M. Tirado Mejia note que les chiffres relatifs à l’accès à l’eau potable figurant aux paragraphes 114 et 115 du rapport à l’examen sont contradictoires et indique que d’après des sources dignes de foi, les personnes habitant dans des zones d’habitat de fortune, soit près de 80 % de la population, n’ont pas accès à l’eau, car il n’existe pas de réseau de distribution moderne dans les zones rurales, et que les sources naturelles sont souvent polluées par le bétail.

La séance est levée à 18 heures.