NATIONS UNIES

E

Conseil économique et social

Distr.GÉNÉRALE

E/C.12/2009/SR.715 juin 2009

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Quarante-deuxième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 7e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le jeudi 7 mai 2009, à 10 heures

Président: M. MARCHAN ROMERO

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS

a)EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (suite)

Deuxième rapport périodique du Brésil (suite)

La séance est ouverte à 10 h 5.

EXAMEN DES RAPPORTS

a)RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE (point 8 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique du Brésil (E/C.12/BRA/2; document de base (HRI/CORE/1/Add.53/Rev.1); observations finales du Comité sur le rapport initial du Brésil (E/C.12/1/Add.87); liste des points à traiter (E/C.12/BRA/Q/2); réponses écrites du Gouvernement brésilien à la liste des points à traiter (E/C.12/BRA/Q/2/Add.1)) (suite)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation brésilienne reprend place à la table du Comité.

Articles 6 à 9 du Pacte (suite)

2.M. DASGUPTA croit comprendre, d’après les paragraphes 87 à 93 des réponses écrites du Gouvernement brésilien à la liste des points à traiter, que les politiques visant à promouvoir le droit au travail des autochtones s’adressent exclusivement à ceux qui vivent dans des zones tribales et pas à ceux qui vivent en dehors de ces zones, soit près de 70 000 personnes. Il relève également que la plupart des travailleurs domestiques semblent ne pas avoir de documents de travail et sont donc dépourvus de toute protection effective de leurs droits liés au travail. Il demande quelles mesures sont prises pour faire en sorte que tous les travailleurs disposent de documents afin de bénéficier d’une protection, et si les employeurs contrevenants sont poursuivis en cas d’infractions répétées ou encourent une simple amende. Enfin, il souhaite savoir si des mesures sont envisagées pour intégrer dans le système de sécurité sociale les travailleurs encore nombreux qui sont dépourvus de contrat de travail et qui, de ce fait, ne bénéficient pas de la sécurité sociale.

3.MmeBRAS GOMES demande, à propos du programme visant à garantir un revenu aux personnes qui pour raison de vieillesse ou de handicap ne sont pas dans le marché du travail, si l’on peut considérer qu’il s’agit d’une étape vers l’établissement d’un revenu minimal garanti. Croyant savoir qu’il a été question à un moment donné d’une loi sur le salaire minimal, elle souhaite que la délégation brésilienne précise si cette loi a été adoptée, et concernant Bolsa Familia, si ce programme est ce qui se rapproche le plus d’un système de revenu minimal. Dans la mesure où 34,7 % des actifs ne bénéficient pas de la protection sociale, elle se demande si l’État partie a envisagé la possibilité d’instituer un ensemble de prestations de base de sécurité sociale pour les travailleurs du secteur non structuré, ainsi que le préconise l’Organisation internationale du Travail (OIT).

4.Mme Bras Gomes aimerait savoir si les personnes ne bénéficiant pas de la sécurité sociale pour cause de revenus insuffisants sont couvertes par le régime de l’assistance sociale et, dans l’affirmative, quelles sont les prestations accordées. Elle demande également si les mesures prises pour inciter les travailleurs à s’inscrire à la sécurité sociale ont eu l’effet escompté, et sinon, quelles autres mesures sont envisagées en ce sens. Les montants de pension minimale sont-ils suffisants pour bénéficier d’un niveau de vie décent? La stabilité du système de sécurité sociale est-elle assurée au Brésil? Les pensions élevées du secteur public sont-elles un facteur de déséquilibre pour le reste du système?

5.M. ZHAN Daode demande si les mesures adoptées pour lutter contre la violence dans la famille, à l’égard notamment des femmes, dont 19 % déclaraient avoir été victimes de violence selon une étude mentionnée au paragraphe 145 du deuxième rapport périodique du Brésil, ont permis d’améliorer les choses, et dans quelle mesure.

6.M. TIRADO MEJÍA salue les progrès importants accomplis, depuis que le Brésil a présenté son rapport initial, en ce qui concerne l’élimination du travail forcé et du travail servile. À cet égard, il faut se féliciter de la décision de la Cour suprême de l’État qui définit ces délits comme relevant de l’échelon fédéral, ce qui permet à l’État central d’adopter une politique plus efficace en la matière. Par ailleurs, M. Tirado Mejía souhaiterait savoir ce qu’il en est du projet de loi qui envisageait pour les personnes condamnées pour des pratiques de travail forcé ou servile, en plus des sanctions pénales, l’expropriation des domaines où le délit a été commis.

7.M. VANNUCHI (Brésil) confirme que la construction de murs autour de favelas de Rio de Janeiro a commencé au mois de mars 2009. D’après les informations obtenues par la délégation brésilienne, c’est le Gouvernement de l’État de Rio qui est à l’origine de ce projet, justifié par des arguments liés à la sécurité (problèmes de criminalité organisée) et d’ordre écologique (risques de glissement de terrain). La société civile et l’association du Barreau ont réagi et des personnes demandent l’arrêt de la construction des murs. M. Vannuchi prendra l’initiative de contacter les autorités de l’État pour leur faire part des préoccupations exprimées par les membres du Comité.

8.MmeGONÇALVES (Brésil) dit que le problème des inégalités sur le marché du travail persiste mais que la situation s’est améliorée entre 1996 et 2007, le taux de participation des femmes au marché du travail passant de 52,2 % à 58,8 % pendant cette période. Le chômage continue de toucher davantage les femmes que les hommes, et davantage les femmes noires que les femmes blanches. Les premières sont plus souvent employées que les autres comme travailleuses domestiques. En outre, 92,6 % des femmes actives indiquent s’occuper de tâches domestiques, contre 50,7 % des hommes. Des mesures sont prises pour corriger ces tendances. Deux conférences nationales ont été organisées sur la politique en faveur des femmes, et le deuxième plan pour les femmes qui a été adopté prévoit des mesures concernant l’égalité au travail.

9.En ce qui concerne la violence familiale, une nette amélioration a été constatée, bien qu’on ne dispose pas encore de données permettant d’évaluer l’efficacité de la loi sur la violence familiale. Des services ont été mis en place pour aider les femmes victimes. Le nombre de cas communiqués aux autorités progresse. Le centre d’appel gratuit mis à la disposition des femmes, qui a reçu 240 000 appels en 2008, permet d’informer les victimes et de les diriger vers les services d’aide compétents.

10.M. VANNUCHI (Brésil) dit que le nombre de travailleurs employés dans des conditions qui s’apparentent au travail forcé ou à l’esclavage est évalué au Brésil par certaines organisations non gouvernementales (ONG) à 25 000, mais que le chiffre est probablement supérieur. Les groupes d’inspection institués par le Ministère du travail ont doublé leurs équipes depuis l’élection du Président Lula da Silva. L’amendement constitutionnel no 438/01 prévoyant entre autres l’expropriation des terres où l’exploitation du travail en servitude est découverte a été approuvé par le Sénat et par la Chambre des députés au premier des deux tours. Concernant l’action menée au niveau national, 170 entreprises ont contracté en août 2008 un engagement de ne pas acheter des produits qui pourraient être liés au travail servile et de ne pas faire entrer ces produits dans leur chaîne de production. Le secteur concerné représente 20 % de la production économique brésilienne. Le pacte conclu à cet effet associe les gouverneurs des États les plus importants (Mato Grosso, Pará, Tocantins, Maranhão et Bahia, notamment). Sur le plan international, le Brésil coopère avec le Paraguay et la Bolivie dans le cadre du Mercosur de façon que plusieurs États puissent agir ensemble et intervenir aux frontières, ainsi qu’avec l’Organisation des Nations Unies (ONU) pour venir à bout de ce problème.

11.MmeCAMPOS MOTTA (Brésil) indique à propos des délits liés au racisme que d’après une étude réalisée sur le plan national entre 2005 et 2009, il y a eu pendant cette période 1 500 plaintes ayant donné lieu à 650 enquêtes de police. À São Paulo, 44 personnes ont été condamnées en vertu de la législation de cet État contre la discrimination fondée sur la race ou la couleur. Ces chiffres montrent que les faits de racisme sont de plus en plus souvent poursuivis, mais ne signifient pas que le racisme ait augmenté.

12.MmeROCHA (Brésil) dit que le travail des enfants a reculé de 60 % au cours des dernières années et a été pratiquement éradiqué pour ce qui est du secteur structuré. Environ 2,5 millions d’enfants travaillent encore au Brésil, ce qui représente une véritable tragédie pour le pays. L’accent sera mis au cours des années à venir sur l’élimination du travail des enfants dans le secteur non structuré, notamment le travail des filles et des garçons employés comme domestiques, et des enfants qui travaillent dans des exploitations agricoles. Même lorsqu’ils sont scolarisés, ces enfants continuent souvent de travailler dans l’exploitation familiale. L’âge de la scolarité obligatoire va être porté de 10 à 15 ans.

13.Les prestations versées au titre du programme mentionné par Mme Bras Gomes permettent en effet de garantir un revenu mensuel minimal aux personnes âgées, dès l’âge de 65 ans. Le programme Bolsa Familia concerne 20 millions de familles pauvres, qu’elles comportent ou non des personnes âgées ou handicapées. Les prestations versées sont plus élevées en fonction du nombre d’enfants. Le montant total de ces prestations représente 28 % du montant des mesures prises pour lutter contre la pauvreté au Brésil.

14.M. VANNUCHI (Brésil) dit que le problème de la «liste noire» mentionnée à la séance précédente par M. Texier ne se pose plus avec autant d’acuité que par le passé. Il ne manquera pas de transmettre cette question à son retour au Brésil. L’enregistrement des syndicats auprès du Ministère du travail contribue à garantir la liberté syndicale. L’enregistrement est libre. Certains syndicats n’acceptent pas de s’enregistrer pour des raisons de doctrine ou parce qu’ils ne veulent pas rendre compte de certains délits. Le syndicat des transporteurs de minibus, par exemple, n’est pas enregistré, et certains chauffeurs de minibus sont liés au crime organisé.

15.M. DONADON (Brésil) dit que des prestations de revenu minimal ont été versées à plus de 17 millions de personnes selon les chiffres de mars 2009. Parmi ces personnes, plus du quart sont inscrites auprès du département des affaires sociales de leur municipalité. Concernant la situation des travailleurs du secteur non structuré, on estime à l’heure actuelle que 15,5 millions de ces travailleurs ont un revenu équivalent ou supérieur au salaire minimal. Par ailleurs, environ 600 000 travailleurs au chômage bénéficient d’allocations de chômage égales ou supérieures au salaire minimal.

16.Certaines mesures prises pour inclure des travailleurs du secteur non structuré dans le système de protection sociale ont déjà donné de bons résultats, mais il n’existe encore aucune étude pour les évaluer. Le programme de protection sociale adopté il y a deux ans a été renforcé en décembre 2008. Le système permet désormais à certains travailleurs de cotiser à hauteur de 11 % seulement du salaire minimal alors que le taux normal est de 20 % ou plus. C’est le cas des travailleurs des microentreprises, l’objectif étant d’intégrer 4 à 5 millions de travailleurs d’ici un à deux ans.

17.Par ailleurs, un dispositif a permis d’inclure, entre 2002 et 2004, 2,2 millions d’employés du secteur informel dans le secteur formel par le simple transfert des cotisations versées par les employés aux entreprises les employant. Quant aux employés de maison, ils posent un problème complexe dans la mesure où il est difficile de surveiller ce qui se passe dans la sphère privée en pénétrant chez les contrevenants supposés. Un plan est envisagé pour élargir la couverture sociale, avec pour ambition d’augmenter la protection sociale de 20 %. Enfin, la pension à vie versée dans le cadre du programme de prestation permanente est une prestation non liée au revenu familial, qui est versée aux personnes âgées de plus de 65 ans ainsi qu’aux personnes handicapées.

18.D’une manière générale, le système de protection sociale dans l’État partie, encore à l’essai, appelle quelques améliorations tenant compte notamment de la démographie, de l’augmentation de l’espérance de vie mais aussi de la répartition géographique entre zones urbaines et zones rurales.

19.M. VANNUCHI (Brésil) précise que la pension à vie, prestation minimale offerte par les services sociaux qui correspond à un salaire minimal, est actuellement versée à quelque 2,5 millions de personnes. Avec une augmentation de 4,9 % du revenu des 10 % les plus riches du pays alors que les 10 % les plus pauvres de la population n’ont vu leurs revenus augmenter que de 1,9 %, le Gouvernement s’attache en particulier à relever le salaire minimal et les prestations versées dans le cadre du programme Bolsa Familia, escomptant des effets à long terme de sa politique.

20.Abordant les inégalités dont souffre la population noire brésilienne − avec notamment un taux de chômage de 9,3 % (7,3 % pour la population blanche), 55 % des emplois occupés sans autorisation de travail, un revenu moyen égal à 53 % de celui de la population blanche, ou encore les emplois les moins considérés (travaux publics, agriculture, emplois domestiques) −, M. Vannuchi dit que, selon les derniers indicateurs, l’écart tend à se combler et laisse espérer d’ici à une trentaine d’années une égalité réelle de salaire entre blancs et noirs. Quant aux inégalités régionales, importantes dans le pays, elles tendent à se réduire, toujours selon les récents indicateurs.

21.Pour ce qui est des rapporteurs nationaux, qui sont issus d’organisations de la société civile, ceux-ci exercent leurs activités librement, en toute indépendance, sans attache financière, et tous leurs rapports sont dûment étudiés et pris en compte pour tenter de remédier aux problèmes, notamment à celui des travailleurs autochtones (qui seraient 260 000 environ à vivre en dehors des campements), pour lesquels les rapporteurs s’efforcent d’établir des statistiques. En matière de participation des femmes à la vie politique, si des progrès ont été enregistrés grâce à la modification de la loi électorale, l’égalité est loin d’être atteinte, notamment dans le secteur judiciaire où les femmes occupent à peine 10 % des postes. Cette inégalité est encore plus flagrante au fur et à mesure que l’on s’élève dans la hiérarchie.

22.Sur le programme d’accélération de la croissance, la délégation brésilienne indique qu’il s’agit d’un programme particulièrement ambitieux d’investissements tout à fait exceptionnels de ressources publiques dans différents secteurs, dont les transports. Les domaines prioritaires définis par le Président sont l’enregistrement des naissances et la réforme du secteur de l’agriculture.

23.M. ABDEL-MONEIM note qu’il ressort des tableaux statistiques fournis par l’État partie que si le produit intérieur brut (PIB) nominal a presque triplé entre 1995 et 2005, tandis que la population n’augmentait que très peu, le PIB par habitant n’est passé que de 4,025 % à 4,320 %. Il relève également le taux de chômage des 16-29 ans, qui a nettement empiré. Il se félicite par ailleurs des orientations prises pour trouver des solutions au chômage, notamment de l’accent mis sur les infrastructures, importantes pour la réalisation du droit au travail, et encourage l’État partie à poursuivre sur cette voie. Quant à la législation importante adoptée en matière de taxation, elle devrait certes contribuer à combler les écarts de revenus, mais il faut pour cela qu’elle soit véritablement appliquée. Souvent, dans les pays en développement, le problème vient de ce que les personnes ayant les revenus les plus élevés, qui devraient donc verser la plus grande part d’impôts, sont celles qui en paient le moins en réalité. Enfin, M. Abdel-Moneim soulève le problème que pose la stabilisation de l’économie dans un environnement économique international qui tend à rendre plus vulnérables les pays dits «émergents».

24.M. TEXIER demande si l’État partie prend des mesures de discrimination positive pour lutter contre les discriminations à l’égard des femmes en particulier, compte tenu de leur absence aux postes les plus élevés de la magistrature (Cour suprême), et s’enquiert des politiques éventuelles tendant à favoriser l’accès des femmes aux postes de la fonction publique en général. Il demande en outre si l’État partie compte adopter une loi concernant le droit de grève dans la fonction publique.

25.Mme BRAS GOMES souhaite que la délégation brésilienne indique avec précision si la pension à vie versée dans le cadre du programme de prestation permanente et le programme Bolsa Familia constituent des étapes et s’inscrivent dans un processus visant à établir un revenu minimal garanti.

26.M. VANNUCHI (Brésil), sur la question de la croissance du PIB, dit que l’idée est de renforcer la croissance grâce à un environnement national favorable sans pour autant accentuer les inégalités. Alors que celles-ci prévalaient quelques années plus tôt, le Brésil a engagé un processus qui tend à inverser la tendance en matière d’inégalités et à faire progresser les indicateurs sociaux, mais il doit pour cela procéder de manière plus systématique. En ce qui concerne la récente crise des crédits hypothécaires qui n’a pas été sans effets pour le Brésil, les statistiques semblent indiquer que le pays commence à se redresser, ce qui autorise un certain optimisme. Des investissements devraient pouvoir être réalisés pour générer davantage d’emplois, avec notamment un programme de logements sociaux ayant pour ambition la création d’un million de logements.

27.M. FAVRETO (Brésil) confirme que la question du droit de grève n’est réglementée que dans le secteur privé, et qu’il n’existe pas de loi spécifique pour le secteur public. Sur la participation des femmes aux postes de la magistrature, l’équilibre hommes-femmes est atteint dans les tribunaux de première instance de certains États, et l’accès aux tribunaux supérieurs se fait par nomination.

28.Mme ROCHA (Brésil) dit que garantir un revenu de base à l’ensemble de la population exige des investissements considérables. De plus, l’application du programme Bolsa Familia pose des problèmes d’ordre politique, certains estimant que les investissements consentis n’étaient pas justifiés et devaient être réservés à des populations plus vulnérables. D’une manière générale, la mise en œuvre des deux programmes à vocation universelle relatifs aux revenus requiert un consensus au sein de la société brésilienne.

29.Mme CAMPOS MOTTA (Brésil) rappelle que les données sur les personnes d’ascendance africaine, les populations autochtones et les personnes handicapées ont été communiquées aux paragraphes 84 et suivants des réponses écrites du Gouvernement brésilien à la liste des points à traiter, et signale qu’un vote se tiendra le 13 mai 2009 dans le pays au sujet de l’égalité raciale et de la lutte contre les inégalités dans le travail.

30.Mme TOBIAS (Brésil) indique qu’en juillet 2009, un cours visant à améliorer les compétences des personnes d’ascendance africaine va débuter dans 15 États. Le programme va également bénéficier à 25 000 travailleurs handicapés.

31.Mme ROCHA (Brésil) précise qu’un programme de formation professionnelle a été lancé en 2008 en faveur des bénéficiaires du dispositif Bolsa Familia, qui offre 85 000 places et associe diverses entreprises qui se sont engagées à embaucher 30 % des personnes ayant suivi le cours.

Articles 10 à 12 du Pacte

32.M. RIEDEL, se référant à la réponse écrite du Gouvernement brésilien no 28 de la liste des points à traiter, voudrait savoir si depuis 2006, le taux de mortalité maternelle a continué de diminuer, comme cela s’est produit entre 2002 et 2006. Notant que le nombre de césariennes pratiquées au Brésil est particulièrement élevé et que 44 % d’entre elles sont inutiles, il demande quels sont les efforts déployés par le Brésil dans le domaine de l’information sur la santé sexuelle et procréative. Il évoque le phénomène particulièrement répandu au Brésil des avortements clandestins et note au paragraphe 287 des réponses écrites à la liste des points à traiter que l’avortement est illégal, sauf en cas de viol ou lorsque la vie de la mère est en danger. Il voudrait savoir si l’État partie envisage de dépénaliser l’avortement pour d’autres motifs, notamment des motifs purement médicaux.

33.En ce qui concerne le VIH/sida, M. Riedel demande quelles sont les mesures concrètes qui sont prises pour réduire les taux d’infection et enrayer la propagation de la maladie, en particulier parmi les groupes défavorisés tels que les enfants des rues. Par ailleurs, il voudrait savoir si l’usage de l’amiante a été interdit, si les victimes de l’amiante ont été indemnisées et si les nombreux problèmes recensés en la matière ont fait l’objet d’un suivi.

34.M. Riedel demande aussi quel pourcentage du budget de l’État est consacré à l’eau et à l’assainissement, et quel pourcentage de la population bénéficie d’un accès à l’eau potable et à des réseaux d’assainissement. Citant des informations selon lesquelles les réseaux d’approvisionnement en eau et d’assainissement présenteraient de graves défaillances par manque de maintenance, il voudrait savoir si les bénéfices éventuellement tirés de ces activités sont réinvestis dans l’entretien des systèmes.

35.M. TEXIER demande quel est l’état d’avancement de la réforme agraire, qui comptait initialement parmi les grandes priorités du programme du Président Lula, sachant que selon le Mouvement des travailleurs sans terre, des progrès très lents auraient été accomplis en la matière. Il rappelle qu’en vertu du Pacte, le développement ou la réforme des régimes agraires est un des moyens d’assurer au mieux la mise en valeur et l’utilisation des ressources naturelles et, partant, d’améliorer l’accès à une alimentation saine.

36.M. TIRADO MEJÍA demande si le Brésil a mis en œuvre des politiques pour lutter contre le problème de la drogue et, dans l’affirmative, si elles mettent l’accent sur la répression ou sur la prévention de la toxicomanie. Il voudrait obtenir davantage d’informations sur les conditions de vie dans les prisons et dans les commissariats de police, s’agissant des personnes placées en garde à vue.

37.M. PILLAY, notant avec satisfaction que le nombre de pauvres a sensiblement diminué depuis 2004, voudrait savoir si l’amélioration de la situation est aussi notable dans les zones rurales et si elle touche également les Afro‑brésiliens. Il cite des informations selon lesquelles les pauvres ne pourraient faire face à la hausse des prix de l’électricité et de l’eau liée aux programmes de privatisation et demande ce que font les autorités brésiliennes pour aider les catégories les plus pauvres. Il s’étonne de lire au paragraphe 230 des réponses écrites du Gouvernement brésilien à la liste des points à traiter que les personnes sans document et les sans‑abri sont hors de portée des politiques publiques et réfute l’argument selon lequel l’État ne peut venir en aide à ces personnes en raison de leur marginalisation. Il cite des informations selon lesquelles les sans domicile fixe, dont le nombre est en constante augmentation, ne bénéficieraient d’aucune assistance sociale et seraient parfois victimes de harcèlement et de violence de la part de la police. La délégation brésilienne est invitée à fournir des renseignements sur ces points.

38.M. Pillay note avec satisfaction que le droit au logement est justiciable puisqu’il est inscrit dans la Constitution et qu’une stratégie nationale ainsi que plusieurs lois ont été adoptées pour améliorer la situation dans le secteur du logement. Pourtant, il s’interroge sur l’efficacité des différents mécanismes et lois en place, sachant qu’au moins 6 millions de familles n’ont pas de logement, sans parler des conditions de vie catastrophiques dans les favelas. Par ailleurs, il voudrait avoir des renseignements sur les mesures prises par le Brésil afin de mieux protéger les personnes démunies contre les expulsions forcées et demande si les lois relatives aux expulsions forcées sont conformes à l’Observation générale no 7 du Comité relative au droit à un logement suffisant. Il demande également si le Brésil a donné suite aux recommandations formulées par le Rapporteur spécial sur le logement convenable dans le rapport publié à l’issue de sa mission au Brésil (E/CN.4/2005/48/Add.3).

39.M. KERDOUN dit qu’en 2006, le Brésil a interdit les organismes génétiquement modifiés (OGM) alors qu’il a légalisé peu après la culture du maïs et du soja transgéniques. Il voudrait savoir pourquoi l’État brésilien est revenu sur sa décision et s’il envisage de généraliser la culture des OGM. D’une manière générale, il demande des renseignements sur le cadre juridique régissant le système national de sécurité alimentaire et nutritionnel. M. Kerdoun aimerait connaître le prix de l’eau vendue aux agriculteurs des régions semi‑arides et la quantité d’eau fournie à chaque agriculteur. Enfin, il voudrait savoir s’il existe une loi‑cadre sur l’eau et si la gestion de l’eau est confiée à des organismes publics ou à des entités privées.

40.M. SADI juge que la distinction établie par l’État partie entre les enfants des rues, les enfants travaillant et/ou vivant dans la rue, les enfants issus d’une famille vivant dans la rue, les enfants «se trouvant dans une situation de rue» n’est pas utile car chacun sait ce à quoi renvoie précisément cette appellation, à savoir des enfants pauvres qui, ayant abandonné leurs études et ne disposant pas toujours d’un toit, sont contraints de travailler pour survivre. M. Sadi souhaiterait connaître la raison pour laquelle ce phénomène n’est plus au centre des politiques et programmes gouvernementaux comme c’était le cas dans les années 80 et 90.

41.Bien qu’il procède d’une intention louable, le programme Faim zéro, qui consiste à distribuer de la nourriture à la population, n’est peut‑être pas la réponse la plus adaptée à l’insécurité alimentaire. S’il convient parfaitement en cas de catastrophe naturelle, lorsque la population n’a à titre temporaire plus de quoi se nourrir, il ne saurait remplacer un programme permettant de donner à la population les moyens d’exercer pleinement son droit à l’alimentation, en créant des activités rémunératrices ou en renforçant l’agriculture familiale.

42.La délégation brésilienne pourrait indiquer si le recours à l’avortement est autorisé en cas d’inceste au même titre qu’en cas de viol ou quand la poursuite de la grossesse constitue un risque pour la santé de la mère. Elle pourrait également préciser si la Cour suprême fédérale a déjà rendu sa décision concernant la possibilité d’interrompre une grossesse quand le fœtus est atteint d’une maladie grave.

43.Il semblerait que l’État partie ne soit pas très impliqué dans la lutte contre le tabagisme, puisqu’il n’a toujours pas interdit le tabac dans les lieux publics ni la publicité pour les marques de cigarettes et que les jeunes y ont toujours accès: faut-il espérer que cette situation change prochainement et que l’État partie mette en place de véritables moyens pour combattre ce fléau?

44.Pour ce qui est de la déforestation, M. Sadi estime que la crédibilité du Gouvernement de M. Lula, qui a notamment fait campagne sur la préservation de l’écosystème amazonien, risque d’être ébranlée par le fait que rien n’a changé en la matière depuis son élection, et invite la délégation brésilienne à s’exprimer sur le sujet.

45.M. DASGUPTA demande quelles mesures concrètes le Gouvernement brésilien a prises pour protéger et défendre les droits des enfants des rues, et s’il est prévu de recueillir des statistiques sur la mortalité maternelle dans les zones reculées, qui font défaut, alors que c’est précisément dans les régions isolées du pays que ce taux doit être particulièrement élevé et qu’il conviendrait d’intervenir.

46.Mme BRAS GOMES croit savoir que les groupes de population qui ont le plus besoin du programme d’aide aux familles − comme les autochtones – n’en bénéficient pas toujours et déplore que 21 % de la population continuent de vivre dans l’insécurité alimentaire. Elle demande si l’État partie s’est fixé des objectifs assortis d’un calendrier précis pour permettre aux 2,2 millions de familles nécessiteuses encore laissées pour compte d’en profiter. Enfin, elle souhaite savoir si le Gouvernement brésilien envisage à terme d’instaurer un salaire minimal.

47.M. ATANGANA demande si depuis l’adoption, en 2006, de la loi Maria da Penha relative à la violence familiale, ainsi nommée en hommage à une femme qui a été victime de deux tentatives d’assassinat par son mari, le phénomène de la violence conjugale a reculé, et comment fonctionnent les tribunaux spécialisés dont cette loi a porté création.

48.La délégation brésilienne pourrait indiquer qui est habilité à juger du caractère «raisonnable» des châtiments corporels infligés aux détenus dans les établissements pénitentiaires et s’il est vrai, comme l’affirment un certain nombre de sources dignes de foi, que la traite des femmes est organisée avec la complicité de certains agents de l’État. Dans l’affirmative, la délégation voudra bien exposer les mesures prises par l’État partie pour endiguer ce phénomène.

49.Mme BARAHONA RIERA dit que le concept de la famille a beaucoup évolué, la législation et la jurisprudence reconnaissant désormais certains droits – et notamment la possibilité de bénéficier d’avantages sociaux − aux personnes vivant en union libre, qu’elles soient de même sexe ou non. Elle regrette que les éléments fournis dans les documents ne permettent pas de dire si les actes de violence familiale – qu’elle qualifie de gravissimes − relèvent du droit pénal ou du droit civil, et s’ils sont punis d’amendes ou de peines de prison. Dans ce dernier cas, il serait important de connaître la durée des peines encourues. En dépit de l’existence du programme visant à combattre les sévices sexuels contre les enfants et adolescents (PAIR), il semblerait que les auteurs d’actes de cette nature ne soient pas poursuivis ni punis. La délégation brésilienne pourrait-elle donner des précisions à ce sujet, et notamment indiquer quels sont les obstacles à l’ouverture de poursuites contre les auteurs de tels actes?

50.La délégation brésilienne pourrait aussi indiquer quelle part du budget de l’État est consacrée à la santé et de quelles ressources dispose le système unifié de santé, universel et gratuit. Elle pourrait en outre préciser si l’État partie s’est doté d’un programme de santé sexuelle et procréative accessible à tous à titre gratuit, ou entend le faire. Par ailleurs, l’État partie devra réfléchir sérieusement à la question de la dépénalisation de l’avortement, sachant qu’interdire cette pratique constitue une entrave à l’exercice des droits fondamentaux des femmes.

Articles 13 à 15 du Pacte

51.M. KERDOUN, notant le taux d’abandon scolaire particulièrement élevé chez les enfants pauvres, les métis, les enfants d’ascendance africaine, les autochtones et les enfants vivant dans des zones reculées, demande ce qui explique que seuls les enfants blancs soient épargnés par ce phénomène, et si l’État partie entend prendre des mesures pour améliorer la situation à cet égard, et plus précisément, élaborer une stratégie pour mettre fin à cette dichotomie. Lisant dans les informations fournies par l’État partie qu’en dépit d’un accès quasi universel des enfants de 7 à 14 ans à l’enseignement, le taux de scolarisation moyen de la population reste très faible en raison du nombre élevé de redoublements, il souhaiterait ensuite savoir si l’État partie a l’intention de faire en sorte que tous les élèves, quelle que soit leur origine ethnique, sociale ou géographique, restent dans le système scolaire pendant les huit ans d’enseignement primaire. Enfin, il déplore que l’accès au marché de l’emploi soit plus facile pour les jeunes blancs que pour les jeunes issus d’un autre groupe ethnique, et invite l’État partie à faire en sorte de corriger la situation.

52.MmeBARAHONA RIERA demande si l’État partie a mis en place des programmes destinés à permettre aux mères adolescentes de poursuivre leurs études − tant dans l’enseignement secondaire que dans l’enseignement supérieur − ainsi que des programmes de formation continue et d’enseignement pour adultes − et dans l’affirmative, de quel budget ceux‑ci sont dotés −, et enfin s’il existe un système de bourses pour que les autochtones puissent entreprendre des études universitaires gratuitement.

53.M. ABDEL-MONEIM déplore que l’exercice des droits culturels soit proportionnel au niveau d’instruction et de revenu, et estime que compte tenu de la situation socioéconomique actuelle, le Gouvernement central devrait intervenir en établissant un système de financement public plus performant afin que chacun puisse profiter d’activités culturelles, comme des sorties au cinéma, au théâtre ou encore au musée.

54.M. SADI demande comment s’organise l’enseignement religieux au Brésil, que ce soit pour les religions majoritaires ou pour les religions dites minoritaires.

55.Le PRÉSIDENT, intervenant en sa qualité de membre du Comité, souhaite savoir dans quelle mesure le Brésil entend intégrer les dispositions de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones dans le droit interne, s’agissant notamment de l’identité culturelle des autochtones et de l’utilisation de leur langue. Il aimerait en outre savoir si l’État partie envisage d’élaborer une loi qui habiliterait les autochtones à créer leur propre régime de propriété intellectuelle en vertu duquel ils géreraient eux-mêmes les revenus qu’ils tirent de leurs productions littéraires, artistiques, culturelles ou encore de leurs savoirs divers, notamment en matière de santé.

La séance est levée à 12 h 50.

-----