Nations Unies

E/C.12/NZL/CO/4

Conseil économique et social

Distr. générale

1er mai 2018

Français

Original : anglais

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Observations finales concernant le quatrième rapport périodique de la Nouvelle-Zélande *

1.Le Comité a examiné le quatrième rapport périodique de la Nouvelle-Zélande à ses 18eet 19eséances (voir E/C.12/2018/SR.18 et 19), les 22 et 23 mars 2018, et adopté les présentes observations finales à sa 28eséance, le 29 mars 2018.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction la soumission du quatrième rapport périodique de l’État partie, élaboré à partir d’une liste de points préalable établie par le Comité (E/C.12/NZL/QPR/4). Il sait gré à l’État partie d’avoir accepté de soumettre son rapport conformément à la procédure simplifiée, qui permet de mieux cibler l’examen du rapport ainsi que le dialogue avec la délégation. Le Comité est reconnaissant du dialogue constructif et franc qu’il a eu avec la délégation intersectorielle de haut niveau de l’État partie.

B.Aspects positifs

3.Le Comité salue les mesures législatives, institutionnelles et de politique générale adoptées pour garantir un niveau élevé de protection des droits économiques, sociaux et culturels dans l’État partie, dont l’application de la Stratégie de prévention de l’exploitation des migrants (2015-2018) et la modification en 2015 de la loi sur l’immigration, qui a érigé en infraction l’exploitation des travailleurs migrants temporaires, ainsi que l’application du plan d’action Ala Mo’ui : Vers la santé et le bien-être dans le Pacifique (2014-2018), qui vise à garantir les droits des Pasifikas en matière de santé. Le Comité prend également acte des progrès accomplis par l’État partie en faveur de l’égalité des sexes dans la vie publique. En outre, il accueille avec satisfaction l’engagement pris par l’État partie de s’attaquer à plusieurs priorités, notamment la réduction de la pauvreté des enfants, l’augmentation du salaire minimum, la refonte du système de santé mentale et du système éducatif et un règlement plus efficace de la crise du logement dans le pays.

4.Le Comité note avec satisfaction le rôle actif joué par la Commission néo-zélandaise des droits de l’homme et par une société civile dynamique − dont les organisations et les représentants des populations autochtones − dans le processus d’examen du quatrième rapport périodique de l’État partie.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Justiciabilité des droits consacrés par le Pacte

5.Le Comité est préoccupé par le fait que, selon la Charte néo-zélandaise des droits, les droits économiques, sociaux et culturels ne bénéficient pas du même statut que les droits civils et politiques. Il regrette aussi les points suivants :

a)Les dispositions du Pacte ne sont toujours pas pleinement transposées dans l’ordre juridique interne de l’État partie, malgré les recommandations formulées par le Groupe consultatif constitutionnel en 2013 ;

b)La loi relative à la Charte néo-zélandaise des droits ne prime pas les autres lois, et des textes législatifs qui ont une incidence défavorable sur les droits de l’homme sont encore en vigueur, bien que le Tribunal des droits de l’homme et d’autres juridictions aient prononcé des déclarations d’incompatibilité en application de la loi relative aux droits de l’homme ;

c)S’il prend note du rôle des notes d’information en tant que mécanisme supplémentaire permettant d’examiner la conformité des projets de loi avec les obligations internationales de l’État partie en matière de droits de l’homme, il constate que les obligations découlant du Pacte n’ont été invoquées dans aucune des notes d’information auxquelles la délégation a fait référence (art. 2, par. 1).

6. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que tous les droits de l’homme, tant les droits économiques, sociaux et culturels que les droits civils et politiques, soient placés sur un pied d’égalité. En particulier, il lui recommande  :

a) De prendre les mesures nécessaires pour intégrer pleinement les dispositions du Pacte dans l’ordre juridique interne, afin de les rendre opposables devant les juridictions nationales et de permettre aux victimes de violations des droits consacrés par le Pacte d’avoir accès à des recours utiles  ;

b) De mettre en œuvre les recommandations du Groupe consultatif constitutionnel, notamment en transposant les droits consacrés par le Pacte dans la loi relative à la Charte néo-zélandaise des droits et en garantissant la primauté de celle-ci par rapport aux autres lois  ;

c) De veiller à ce que les recommandations formulées par les mécanismes chargés d’examiner la conformité des projets de loi aux obligations internationales de l’État partie en matière de droits de l’homme, à la loi relative à la Charte néo-zélandaise des droits et au Traité de Waitangi soient dûment prises en compte par le législateur.

7. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale n o 9 (1998) concernant l’application du Pacte au niveau national.

Droit de disposer librement des richesses et des ressources naturelles

8.Le Comité note avec préoccupation que le Traité de Waitangi continue de ne pas être légalement exécutoire ni mentionné dans la loi constitutionnelle, et que les recommandations du Tribunal de Waitangi ne sont pas contraignantes et souvent, ne sont pas entendues par le Gouvernement. Le Comité est aussi préoccupé par le peu d’efforts faits pour garantir une participation significative des Maoris à la prise de décisions concernant les lois qui ont une incidence sur leurs droits, notamment les droits fonciers et les droits relatifs à l’eau. Il craint également que le principe du consentement préalable, libre et éclairé ne soit pas systématiquement respecté, en particulier dans le contexte des activités de développement et d’extraction menées sur les territoires appartenant aux Maoris ou traditionnellement utilisés par eux (art. 1, par. 2).

9. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De prendre immédiatement des mesures, en partenariat avec les institutions représentatives des Maoris, pour mettre en œuvre les recommandations du Groupe consultatif constitutionnel concernant la place du Traité de Waitangi dans le cadre constitutionnel, ainsi que les propositions formulées dans le rapport « Matike Mai Aotearoa » de 2016  ;

b) De veiller à ce que les recommandations formulées par le Tribunal de Waitangi soient systématiquement mises en œuvre dans leur intégralité, notamment celles figurant dans son rapport de référence « Ko Aotearoa Tēnei »  ;

c) D’élaborer une stratégie nationale pour rendre la législation et les politiques publiques conformes aux dispositions de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et de veiller à ce que des ressources financières et humaines suffisantes soient fournies au mécanisme indépendant de suivi de la Déclaration mis en place par le Groupe des chefs des iwis  ;

d) Compte tenu des recommandations du Tribunal de Waitangi concernant les processus de coopération avec les Maoris, de mettre en place des mécanismes efficaces pour assurer une participation significative des Maoris à tous les processus décisionnels qui ont une incidence sur leurs droits. À cette fin, l’État partie devrait veiller à ce que sa stratégie commerciale comporte des dispositions sur la transparence et la participation du public, et à ce que ses politiques en matière de changements climatiques soient élaborées et mises en œuvre en partenariat avec les Maoris, notamment grâce à leur participation effective à la Commission du climat  ;

e) De prendre des mesures efficaces pour assurer le respect de l’obligation d’obtenir le consentement préalable, libre et éclairé des populations autochtones, notamment dans le contexte des activités d’extraction et de développement, et de procéder à des études d’impact social et environnemental et d’impact sur les droits de l’homme avant d’accorder des permis pour les activités d’extraction et de développement ainsi que pendant le déroulement de ces activités  ;

f) D’envisag er de ratifier la Convention ( n o 169) de l’Organisation internationale du Travail relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989.

Non-discrimination et préjugés inconscients

10.Le Comité est préoccupé par les préjugés inconscients enracinés à l’égard des Maoris dans les domaines de l’éducation, de la santé, de la justice et des services sociaux, qui nuisent à la jouissance, par les intéressés, de leurs droits économiques, sociaux et culturels (art. 2).

11. Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place une stratégie à l’échelle de l’État afin que la nature et l’incidence des préjugés inconscients soient compris es par l’administration et les employés à tous les niveaux, en raison de l’effet préjudiciable sensible des préjugés inconscients sur les Maoris dans tous les domaines de la vie. Le Comité recommande aussi à l’État partie de veiller à ce que cette stratégie s’étende aux procédures de passation des marchés publics et soit soutenue par une formation et une éducation complètes , ainsi que par des mécanismes de suivi efficaces. Il appelle l’attention de l’État sur son observation générale n o 20 (2009) sur la non-discrimination dans l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels.

Protection contre la violence

12.Le Comité est préoccupé par la fréquence de la violence intrafamiliale et de la violence sexiste dans l’État partie, qui touche particulièrement les femmes et les filles maories, en dépit de certaines mesures positives prises à cet égard. Il prend note des réformes législatives du système de protection de l’enfance entreprises par l’État et salue la création du Ministère de l’enfance en 2017. Toutefois, il demeure préoccupé par le fait que l’ampleur des sévices infligés aux enfants dans la famille et dans les structures d’accueil de l’État, en particulier aux enfants handicapés et aux enfants maoris, demeure considérable. Il s’inquiète également du fait que les allégations de sévices infligés par le passé à des enfants placés sous la garde de l’État n’ont pas fait l’objet d’enquêtes en bonne et due forme (art. 10).

13. Le Comité recommande à l’État partie d’adopter une approche globale pour lutter contre la violence intrafamiliale et la maltraitance des enfants. Il lui recommande en particulier  :

a) D’adopter une stratégie globale et transversale pour éradiquer la violence intrafamiliale et assurer l’application effective de la nouvelle loi sur le sujet  ;

b) De renforcer les mesures destinées à protéger toutes les victimes de la violence intrafamiliale et de la violence sexiste, en accordant une attention particulière aux femmes et aux filles maories, tout en gardant à l’esprit les souffrances et le traumatisme qu’elles ont subis par le passé, dans l’élaboration de solutions en partenariat avec les populations maories et les organisations de la société civile concernées  ;

c) De continuer à investir dans la lutte contre la maltraitance des enfants, tout en accordant une attention particulière aux enfants handicapés et aux enfants maoris. À cette fin, l’État partie devrait veiller à ce que le Ministère de l’enfance soit pleinement équipé et opérationnel  ;

d) De prendre des mesures pour traduire en justice les auteurs d’actes de violence intrafamiliale et de violence sexiste et, s’ils sont déclarés coupables, de les punir comme il convient, et d’intensifier les campagnes de sensibilisation et la formation des agents des forces de l’ordre afin de les sensibiliser à toutes les formes de violence intrafamiliale et de maltraitance des enfants  ;

e) D’enquêter comme il convient sur les allégations de mauvais traitements infligés à des enfants placés sous la garde de l’État, de rendre opérationnelle la Commission royale d’enquête sur les affaires anciennes de mauvais traitements perpétrés sous la garde de l’État et de veiller à ce que celle-ci dispose des ressources nécessaires pour s’acquitter efficacement de ses fonctions.

Obligation d’agir au maximum des ressources disponibles

14.Le Comité est préoccupé par le fait que les obligations découlant du Pacte ne sont pas suffisamment prises en compte dans le processus budgétaire et que les crédits alloués aux domaines qui relèvent des droits consacrés par le Pacte restent insuffisants (art. 2, par. 1).

15. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour faire en sorte que le maximum de ressources soit alloué à la réalisation des droits énoncés dans le Pacte, notamment en apportant les ajustements nécessaires à la loi sur les finances publiques de 1989 en introduisant des études d’impact sur les droits de l’homme. Il lui recommande aussi de faire en sorte que ses obligations en vertu du Pacte soient dûment prises en considération lors de la prise des décisions budgétaires et des décisions de création et d’affectation de ressources. Il prend note de l’attachement de l’État partie aux objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030 mais recommande que les initiatives et les ressources consacrées à leur réalisation soient sous-tendues par les obligations du Pacte.

Entreprises et droits de l’homme

16.Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas encore adopté de plan d’action national sur les entreprises et les droits de l’homme et que le cadre réglementaire applicable aux entreprises opérant dans l’État partie et à celles qui relèvent de sa juridiction mais opèrent à l’étranger ne garantisse pas pleinement le respect des droits économiques, sociaux et culturels. En outre, il est préoccupé par des informations selon lesquelles le point de contact national institué en application des Principes directeurs à l’intention des entreprises multinationales de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) manquerait de ressources (art. 2, par. 1).

17. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’accélérer l’adoption d’un plan d’action national sur les entreprises et les droits de l’homme pour appliquer les Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme  : mise en œuvre du cadre de référence « protéger, respecter et réparer » des Nations Unies  ;

b) De renforcer le cadre réglementaire, y compris celui concernant la responsabilité juridique, pour les entreprises qui opèrent dans l’État partie et celles qui relèvent de sa juridiction mais opèrent à l’étranger, afin que leurs activités ne compromettent pas l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels et que les victimes puissent demander réparation auprès des mécanismes judiciaires et non judiciaires de l’État partie  ;

c) De renforcer la capacité du point de contact national.

18. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale n o 24 (2017) sur les obligations des États en vertu du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels dans le contexte des activités des entreprises.

Personnes handicapées

19.Le Comité prend note des mesures positives prises à l’égard des personnes handicapées, notamment la création d’un Groupe de travail sur les données et les éléments objectifs relatifs au handicap afin d’améliorer la collecte de données et d’informations sur les personnes handicapées, et la création d’un poste de commissaire chargé des droits des personnes handicapées, en application de la modification apportée en 2016 à la loi relative aux droits de l’homme. Le Comité reste cependant préoccupé par les points suivants :

a)Les dispositions légales existantes ne sont pas conformes aux normes internationales en matière d’aménagement raisonnable et d’éducation inclusive ;

b)Les personnes handicapées restent désavantagées dans l’exercice des droits consacrés par le Pacte, leur situation sociale et économique restant bien moins favorable que celle de la population en général (art. 2).

20. Le Comité recommande à l’État partie d’harmoniser sa législation nationale, en particulier les dispositions de la loi de 1993 relative aux droits de l’homme et de la loi sur l’éducation de 1989 qui concernent les droits des personnes handicapées (s’agissant notamment des aménagements raisonnables et de l’éducation inclusive) et de rendre celles-ci conformes aux normes internationales. Il lui recommande aussi de poursuivre ses efforts pour améliorer les conditions de vie des personnes handicapées, notamment par une application efficace de la stratégie actualisée 2016-2026 en matière de handicap et du Plan d’action sur le handicap (2014-2018), en étroite collaboration avec les groupes concernés.

Égalité de droits des hommes et des femmes

21.Le Comité prend note de l’augmentation de la représentation des femmes au sein des organes élus, mais reste préoccupé par le fait que si elles représentent la majorité des fonctionnaires (60,5 %), 38 % seulement des responsables des ministères sont des femmes et que, dans le secteur privé, la représentation des femmes aux postes de direction et dans les conseils d’administration reste beaucoup plus faible (art. 3).

22. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre ses efforts pour parvenir à la parité entre les sexes dans tous les organes élus. Il lui recommande également d’intensifier ses mesures visant à accroître la représentation des femmes aux postes de direction dans le secteur public et, à cette fin, de renforcer les campagnes de sensibilisation aux rôles des femmes et des hommes dans la famille et dans la société. Il encourage l’État à prendre des mesures ciblées, telles que des quotas, pour promouvoir l’égalité des sexes dans le secteur privé. Il appelle l’attention de l’État sur son observation générale n o 16 (2005) sur le droit égal de l’homme et de la femme au bénéfice de tous les droits économiques, sociaux et culturels.

Chômage

23.S’il prend note des informations sur la baisse du taux de chômage général au cours des dernières années et des statistiques fournies, le Comité est préoccupé par le fait que le nombre de personnes au chômage partiel a doublé (il est estimé à 221 000 personnes). Il note aussi avec préoccupation que le taux de chômage chez les Maoris et les Pasifikas représente environ le double du taux général, en dépit des mesures prises par l’État partie, et que les femmes et les personnes handicapées sont touchées davantage par le chômage. Il est préoccupé aussi par le nombre élevé de jeunes, en particulier parmi les Maoris, les Pasifikas et les personnes handicapées, qui n’exercent pas un emploi et ne suivent pas un enseignement ou une formation (art. 6).

24. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures ciblées pour lutter plus efficacement contre le chômage partiel. Il lui recommande aussi d’évaluer l’efficacité des mesures prises pour accroître les possibilités d’emploi en général et s’agissant de groupes spécifiques, notamment les Maoris, les Pasifikas, les femmes, les personnes handicapées et les jeunes. Pour ce faire, l’État partie devrait travailler en partenariat avec les groupes concernés afin d’accroître leur participation au marché du travail, et inciter les entreprises à employer des personnes handicapées, par exemple en réduisant les cotisations de sécurité sociale de l’employeur pendant une certaine période. Le Comité invite l’État partie à redoubler d’efforts pour faire face au nombre croissant de jeunes qui n’exercent pas un emploi et ne suivent pas un enseignement ou une formation et appelle son attenti on sur l’observation générale n o 18 (2005) sur le droit au travail.

Salaire minimum

25.Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie concernant l’augmentation progressive du salaire minimum au niveau du minimum vital qui est envisagée. Il est préoccupé toutefois par le fait que, selon la loi sur le salaire minimum, les personnes handicapées puissent être rémunérées à des salaires inférieurs au salaire minimum (art. 7).

26. Le Comité prie instamment l’État partie d’adopter les mesures législatives et administratives nécessaires, notamment en révisant la loi sur le salaire minimum, en abrogeant le système qui autorise des exceptions au salaire minimum, et en apportant, s’il y a lieu, un soutien aux employeurs de personnes handicapées, afin que tous les travailleurs, sans discrimination, reçoivent un salaire minimum leur permettant d’avoir des conditions de vie décentes pour eux-mêmes et leur famille. Il lui recommande de poursuivre ses efforts, au moyen notamment d’inspections du travail, pour faire respecter le salaire minimum en pratique et imposer des sanctions appropriées aux employeurs contrevenants. Il appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale n o 23 (2016) sur le droit à des conditions de travail justes et favorables ( par.  18 à 24).

Conditions de travail justes et favorables

27.Le Comité est préoccupé par les conditions de travail des travailleurs migrants, qui se caractérisent par des horaires excessifs et le non-paiement ou le sous-paiement des salaires. Il note aussi avec préoccupation le nombre significatif de cas de non-respect par les employeurs des lois relatives à l’emploi, notamment dans les secteurs qui emploient des travailleurs migrants. Il est également préoccupé par le nombre de cas de décès et d’accidents dus au travail, en particulier dans les secteurs de l’agriculture, de la foresterie et de la construction, qui emploient une forte proportion de travailleurs maoris (art. 7).

28. Le Comité prie instamment l’État partie  :

a) D’adopter les mesures nécessaires pour que tous les travailleurs migrants bénéficient des mêmes conditions que les autres travailleurs en ce qui concerne la rémunération, la limitation du temps de travail, le repos et les loisirs  ;

b) De prendre des mesures pour sensibiliser les travailleurs migrants aux mécanismes de plainte existants et faciliter leur accès à l’assistance juridique  ;

c) De renforcer la capacité de l’inspection du travail de surveiller les conditions de travail, y compris sur les lieux de travail qui emploient des travailleurs migrants, en vue de faire pleinement respecter les normes d’emploi, de traduire en justice les employeurs qui pratiquent l’exploitation et d’indemniser les victimes  ;

d) D’appliquer effectivement la législation sur la santé et la sécurité au travail.

29. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale n o 23.

L’emploi des femmes

30.Le Comité note que, parmi les pays de l’OCDE, c’est la Nouvelle-Zélande qui présente l’écart salarial entre les sexes le plus faible. Il est toutefois préoccupé par le fait que les femmes sont plus susceptibles d’occuper des emplois à temps partiel, occasionnels et faiblement rémunérés, ce qui constitue un obstacle à l’élimination de l’écart salarial et a une incidence sur les prestations de retraite des femmes. Il note aussi avec préoccupation que les femmes sont beaucoup plus souvent contraintes d’exercer plusieurs emplois. Il regrette que le principe de l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale n’ait pas encore été incorporé dans la législation de l’État partie (art. 7).

31. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’intensifier ses efforts pour diversifier les possibilités d’emploi des femmes, y compris dans les professions traditionnellement à prédominance masculine, et de veiller à ce qu’il soit tenu compte des aspects relatifs à l’origine ethnique et au handicap dans ces efforts  ;

b) D’adopter des mesures ciblées pour favoriser un environnement propice à la réalisation de l’égalité des chances en matière d’emploi pour les hommes et les femmes, notamment en lançant des campagnes de sensibilisation, en adoptant des mesures temporaires spéciales et en continuant de promouvoir des formules de travail souples qui aident les parents à concilier vie familiale et vie professionnelle  ;

c) De s’attaquer efficacement aux causes du pourcentage élevé de femmes contraintes d’exercer plusieurs emplois  ;

d) D’adopter des mesures en vue d’incorporer le principe de l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale dans la législation de l’État partie et de mettre au point un mécanisme simplifié pour l’application de ce principe à toutes les professions.

Droits syndicaux

32.Le Comité regrette que l’État partie maintienne sa réserve à l’article 8 du Pacte. Il est également préoccupé par les restrictions que la loi impose aux droits syndicaux (art. 8).

33. Le Comité recommande à nouveau à l’État partie de prendre les mesures qui lui permettront de retirer sa réserve à l’article  8 du Pacte. Il lui recommande de réviser la loi sur les relations de travail, comme il en a exprimé l’intention, afin de rendre celle-ci conforme aux obligations prévues à l’article  8. Il lui recommande aussi de mettre en place des mécanismes pour protéger les nouveaux employés des licenciements abusifs pendant la période d’essai.

Droit à la sécurité sociale

34.Le Comité note avec préoccupation que les réformes précédentes du système de sécurité sociale ont abouti à ce que des sanctions soient imposées aux bénéficiaires contrevenants, y compris à ceux qui ont des enfants à charge, et à ce que l’on se préoccupe à l’excès de placer les bénéficiaires dans l’emploi rémunéré. Il note aussi avec préoccupation qu’en raison notamment du caractère des activités ou des services fournis et de l’évaluation qui est faite du niveau de risque, les contrats des prestataires de services sociaux maoris risquent davantage d’être renouvelés chaque année, tandis que les contrats des prestataires non maoris sont renouvelés tous les cinq ans (art. 9).

35. Le Comité recommande à l’État partie de traduire en actes son intention de réformer le système de sécurité sociale, y compris la loi sur la sécurité sociale de 1964, en consultant largement les partenaires sociaux, la Commission nationale des droits de l’homme et la société civile, afin de garantir la réalisation du droit à la sécurité sociale. Pour ce faire, l’État partie devrait veiller à ce que l’objectif recherché par la législation et les politiques dans le domaine de la sécurité sociale soit la réalisation du droit à la sécurité sociale. En particulier, le Comité recommande à l’État partie  :

a) De veiller à ce que les personnes qui ont besoin d’une assistance sociale reçoivent effectivement des prestations de sécurité sociale adéquates qui permettent aux bénéficiaires et à leur famille de jouir d’un niveau de vie suffisant  ;

b) D’évaluer l’efficacité du régime de sanctions, en gardant à l’esprit le contenu essentiel du droit à la sécurité sociale et l’intérêt supérieur de l’enfant  ;

c) De garantir l’égalité des conditions de travail, y compris en ce qui concerne le renouvellement des contrats de tous les prestataires de services sociaux et de remédier à toute disparité indirecte à cet égard.

36. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale n o 19 (2007) sur le droit à la sécurité sociale et sur sa déclaration sur les socles de protection sociale  : un élément essentiel du droit à la sécurité sociale et des objectifs de développement durable (2015).

Droit à un niveau de vie suffisant

37.Le Comité prend note de la volonté exprimée par l’État partie de réduire sensiblement et durablement la pauvreté des enfants. Toutefois, il se déclare préoccupé par l’aggravation de la pauvreté des enfants dans le pays. Il regrette aussi le nombre disproportionné d’enfants maoris et pasifikas et d’enfants handicapés qui vivent dans des ménages dont le revenu est inférieur au seuil de pauvreté relative (art. 11).

38. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour lutter contre la pauvreté, en particulier pour les ménages ayant des enfants à charge, notamment des enfants maoris ou pasifikas et des enfants handicapés. En particulier, il l’encourage vivement à accélérer l’adoption du projet de loi sur la réduction de la pauvreté enfantine présenté en janvier 2018 et de veiller à ce que la stratégie pour le bien-être de l’enfant soit dotée de ressources suffisantes et effectivement mise en œuvre. Il lui demande également de présenter dans son prochain rapport périodique des renseignements ventilés sur les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs de la stratégie. En outre, il recommande à l’État partie d’envisager d’élaborer une stratégie globale de réduction de la pauvreté à partir de la stratégie pour le bien-être de l’enfant.

Droit au logement

39.Le Comité prend note des mesures envisagées par l’État partie pour accroître la disponibilité de logements abordables de qualité, notamment grâce au programme KiwiBuild. Il note cependant avec préoccupation que les groupes et individus défavorisés, notamment les familles maories et pasifikas et les personnes handicapées, sont exposés à un plus grand risque de dénuement grave sur le plan du logement, notamment à des situations de surpeuplement. Il est préoccupé également de constater que les coûts de logement ont nettement augmenté, ce qui a abouti à ce que le logement devienne inabordable pour de nombreuses familles et a donc accru le sans-abrisme. En outre, il est préoccupé par le nombre significatif de logements locatifs dangereux et la pénurie de logements sociaux et abordables. Enfin, il est préoccupé par la lenteur du traitement des demandes liées aux séismes dans la région de Canterbury, notamment en ce qui concerne l’accès à un logement suffisant (art. 11).

40. Le Comité recommande à l’État partie d’adopter une stratégie nationale du logement fondée sur les droits de l’homme, en s’appuyant sur le rapport de 2018 de recensement des logements présenté par le Gouvernement. Il lui recommande également  :

a) D’intensifier ses efforts pour accroître la disponibilité de logements abordables de qualité, en accordant une attention particulière aux familles à faible revenu, aux familles maories et pasifikas, aux personnes handicapées et aux personnes âgées, et d’allouer les ressources nécessaires à une mise en œuvre efficace du programme KiwiBuild  ;

b) De s’attaquer plus efficacement au phénomène croissant du sans-abrisme, notamment en appliquant la stratégie d’élimination du sans-abrisme, et de suivre et d’enregistrer plus systématiquement la situation des sans-abri  ;

c) De veiller à ce que toute expulsion soit conforme aux normes internationales en la matière, y compris en respectant les garanties d’une procédure régulière et en proposant des logements de remplacement  ;

d) De redoubler d’efforts pour réglementer le marché privé du logement, notamment en contrôlant l’augmentation des loyers, et de prendre des mesures efficaces pour que les logements locatifs soient sûrs, notamment en renforçant les dispositions légales prescrivant des normes de qualité minimum pour le chauffage et l’isolation des logements locatifs  ;

e) De consolider ses efforts pour traiter rapidement les demandes liées aux séismes survenus dans la région de Canterbury qui restent en souffrance, notamment en créant un tribunal spécialisé doté de moyens suffisants, et de promouvoir la mise en œuvre des recommandations formulées par la Commission des droits de l’homme dans son rapport de suivi, « Staying in the red zones ».

41. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur ses observations générales n o 7 (1997) sur les expulsions forcées et n o 4 (1991) sur le droit à un logement suffisant.

Droit à l’eau

42.Le Comité est préoccupé par les difficultés persistantes d’accès à l’eau potable, qui peuvent être à l’origine d’épidémies (art. 11).

43. Le Comité recommande à l’État partie de prendre immédiatement des mesures pour lever les obstacles à l’accès à l’eau potable, notamment en donnant suite aux conclusions de l’enquête sur l’eau potable de Havelock North et en adoptant les modifications législatives et réglementaires nécessaires pour garantir cet accès à chacun. Il appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale n o 15 (2002) sur le droit à l’eau.

Droit à la santé

44.Le Comité est préoccupé par les disparités persistantes dans l’exercice du droit à la santé, les Maoris et les Pasifikas étant ceux qui en pâtissent le plus. Il est préoccupé en particulier par le fait que les Maoris présentent des taux plus élevés de maladie chronique et d’incapacité, et accusent une représentation défavorable dans les statistiques sur le suicide et les troubles de la santé mentale (art. 12).

45. Le Comité recommande à l’État partie d’accentuer ses efforts pour remédier aux disparités dans l’exercice du droit à la santé en améliorant la situation sanitaire des Maoris et des Pasifikas, en étroite collaboration avec les groupes concernés. En particulier, il lui recommande de rétablir les programmes de santé ciblant les Maoris, d’investir davantage dans les systèmes de santé publique coutumiers maoris, et de veiller à ce que les groupes concernés soient représentés et habilités dans les processus décisionnels liés à la conception, à la planification et à l’exécution des politiques relatives à la santé et au handicap. Il appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale n o 14 (2000) sur le droit au meilleur état de santé susceptible d’être atteint.

Santé mentale

46.Le Comité prend note de l’annonce faite par l’État partie en janvier 2018 de l’ouverture d’une enquête indépendante sur les services de santé mentale et de traitement des toxicomanies. Il s’inquiète cependant du fait que les services ne sont pas suffisamment réactifs pour assurer le respect des droits et répondre aux besoins des personnes souffrant de troubles mentaux, y compris celles qui se trouvent en prison (art. 12).

47. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour garantir l’accès à une offre suffisante de services de santé mentale, y compris de soins de proximité, aux membres de la société qui en ont besoin, y compris aux détenus. Il lui recommande également de veiller à ce que l’enquête indépendante sur les services de santé mentale et de traitement des toxicomanies bénéficie de ressources suffisantes, et de faire le nécessaire pour appliquer les recommandations issues de l’enquête, une fois qu’elles seront disponibles.

Droit à l’éducation

48.Malgré les efforts faits par l’État partie, le Comité est préoccupé par la persistance de disparités dans l’exercice du droit à l’éducation, dans la mesure où les élèves maoris et pasifikas, notamment aux niveaux secondaire et supérieur, obtiennent de moins bons résultats que les élèves d’origine européenne et se heurtent davantage à la stigmatisation et à des mesures disciplinaires dans les écoles. Il est particulièrement préoccupé par le faible nombre d’enseignants maoris ou parlant le maori, qui limite encore davantage l’accès à l’enseignement en langue maorie. Il est préoccupé également par ce qui suit :

a)Le placement d’enfants handicapés dans des systèmes éducatifs spéciaux, en raison notamment de contraintes financières ;

b)Le caractère fréquent des brimades et du harcèlement à l’école ;

c)Les coûts indirects de l’éducation qui se soldent par l’abandon scolaire, la plupart du temps quand les élèves sont issus de ménages défavorisés et marginalisés (art. 13 et 14).

49. Le Comité recommande à l’État partie de donner suite à son projet de réforme du système éducatif. À ce titre, il devrait élaborer des programmes d’éducation culturellement appropriés en partenariat avec les Maoris et les Pasifikas et définir les objectifs éducatifs pertinents, dans le but d’améliorer les résultats scolaires des élèves maoris et pasifikas et de s’attaquer à la stigmatisation et aux mesures disciplinaires dans les écoles. Il lui recommande aussi d’investir afin d’augmenter le nombre d’enseignants maoris qualifiés et de prendre d’autres mesures pour renforcer l’accès à l’enseignement en langue maorie et son taux de rétention. Le Comité recommande aussi à l’État partie  :

a) De prendre des mesures efficaces pour faciliter l’accès des enfants handicapés à l’éducation inclusive, notamment en renforçant les ressources allouées à la fourniture d’aménagements raisonnables et de tout autre soutien complémentaire nécessaire  ;

b) De mettre en œuvre une politique de tolérance zéro contre les brimades et le harcèlement dans les écoles et de garantir une protection efficace aux victimes de ces pratiques  ;

c) De prendre des mesures efficaces pour remédier aux coûts indirects de la scolarité, notamment en appliquant le programme visant à accroître le financement des écoles publiques, de façon à garantir un accès égal à l’éducation à tous les enfants et élèves.

50. Le Comité rappelle à l’État partie son observation générale n o 13 (1999) sur le droit à l’éducation.

D.Autres recommandations

51. Le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

52. Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille ainsi que la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

53. Le Comité recommande à l’État partie de tenir pleinement compte des obligations qui lui incombent en vertu du Pacte et de garantir le plein exercice des droits qui y sont énoncés dans la mise en œuvre au niveau national du Programme de développement durable à l’horizon 2030, avec l’aide et la coopération de la communauté internationale au besoin. La réalisation des objectifs de développement durable serait grandement facilitée si l’État partie établissait des mécanismes indépendants pour suivre les progrès réalisés et s’il considérait que les bénéficiaires des programmes publics étaient détenteurs de droits qu’ils peuvent faire valoir. La mise en œuvre des objectifs dans le respect des principes de participation, de responsabilité et de non-discrimination permettrait de garantir que nul n’est laissé à l’écart.

54. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour mettre au point et appliquer progressivement des indicateurs appropriés à la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels, et faciliter ainsi l’évaluation des progrès réalisés pour se conformer aux obligations que lui impose le Pacte pour diverses catégories de la population. À cet égard, il renvoie, notamment, au cadre conceptuel et méthodologique concernant les indicateurs des droits de l’homme mis au point par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (voir HRI/MC/2008/3).

55. Le Comité prie l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales, dans les langues officielles et les langues courantes, à tous les niveaux de la société, en particulier auprès des parlementaires, des fonctionnaires et des autorités judiciaires, et de l’informer dans son prochain rapport périodique des mesures prises pour y donner suite. Il l’encourage à associer le Tribunal de Waitanga, la Commission des droits de l’homme, les organisations non gouvernementales et d’autres membres de la société civile au suivi des présentes observations finales et au processus de consultation nationale avant la soumission de son prochain rapport périodique .

56. Conformément à la procédure concernant la suite donnée aux observations finales adoptées par le Comité, l’État partie est prié de fournir, dans un délai de dix-huit mois à compter de l’adoption des présentes observations finales, des informations sur la mise en œuvre des recommandations faite s par le Comité aux paragraphes 13  a) (stratégie sur la violence intrafamiliale), 35 b) (régime de sanctions dans le système de sécurité sociale) et 40 (stratégie nationale du logement) ci - dessus.

57. Le Comité prie l’État partie de lui soumettre, le 31  mars 2023 au plus tard, son cinquième rapport périodique. À cette fin, comme l’État partie a accepté de rendre compte au Comité selon la procédure simplifiée de présenta tion de rapports, ce dernier lui soumettra en temps voulu une liste préalable de points. Les réponses de l’État partie à cette liste constitueront son cinquième rapport périodique sou mis en application de l’article  16 du Pacte. Il l’invite aussi à mettre à jour son document de base commun conformément aux directives harmonisées pour l’établissement des rapports à présenter en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (voir HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I).